Le contribuable neuchâtelois, encore plus «pigeon» que Bulat ? (2/2)

La semaine dernière, lors de la première partie de cet article, j’évoquais le fait que les contribuables neuchâtelois méritaient, vraisemblablement, plus le titre de Pigeon d’Or 2011 que l’ami Bulat que l’on avait. Place à la deuxième partie qui traite de l’utilisation de la Maladière et de la faillite du club.

Des événements pour financer l’exploitation de la Maladière : que des promesses ?

Ainsi, la ville a perdu le locataire principal de son magnifique complexe. Il lui faudra donc trouver d’autres apports financiers pour limiter les frais qu’une telle infrastructure engendre. Est-ce que les contribuables neuchâtelois doivent se faire du souci pour leurs prochaines tranches d’impôts ? Tournons-nous vers un passé récent et souvenons-nous des promesses faites et des manifestations déjà organisées sur le toit de la plus grande Coop de la région.

On attend toujours la FIG

Je l’avais oublié, vous aussi probablement, mais la Fédération Internationale de Gymnastique avait montré, il y a quelques années de cela, un certain intérêt pour s’installer en ville de Neuchâtel ; pour goûter aux tripes à la neuchâteloise et à son Chasselas millésimé ? «Nous allons collaborer avec la Fédération Internationale de Gymnastique, qui s’installera prochainement à Neuchâtel afin d’accueillir une manche de la coupe du monde de gymnastique artistique» révélait le responsable des sports de la ville en 2007. Pour des raisons qui échappent au «commun-contribuable» des mortels, cette fédération a actuellement son siège à Lausanne… La FIG ne diminuera donc pas le manque à gagner de l’exploitation de ce magnifique complexe ; le responsable des sports de 2007, était pourtant très clair: «nous voulons faire de la Maladière un haut lieu sportif».

Une fête permanente au stade

«Nous attendons plus de 100’000 personnes au cours de ces trois jours de festivités», annonçait fièrement Olivier von Gunten, responsable du service promotion de la Maladière peu avant les «Fêtes du stade» en juin 2007. Le déjà précédemment cité Pascal Sandoz  estimait qu’il n’y a eu que 25’000 visiteurs dans un article de L’Express du 5 mars 2008 resté dans les mémoires. Résultat, entre l’inauguration du stade et ces «Fêtes du stade», Pascal Sandoz parle de 200’000 francs de perte. Et celle-ci n’est pas due uniquement au fait que Cindy Santos, l’ancienne nouvelle star, ait été invitée à pousser la chansonnette peu avant le premier match officiel à la Maladière…

A l’occasion de ces désormais célèbres «Fêtes du stade», des concerts avaient été prévus ; Patrick Bruel, La Star Ac’ et Hélène Segara devaient en être les têtes d’affiche. Alors que depuis 2006, il est estimé que ce stade peut accueillir jusqu’à 19’000 personnes environ en configuration concert, ils ne furent finalement qu’environ 10’000 pour crier Patriiiiiick toujours selon L’Express. Echec monumental de la programmation? Optimisme naïf des organisateurs ? Absence d’Hélène Segara ? Le franc fort (ah non, merde, je dois me tromper d’époque…) ? Je vous laisse vous faire votre opinion sur cette différence entre la capacité maximale du stade et la réalité décrite dans la presse locale peu après la manifestation.

Un stade pas vraiment fait pour

Visiblement, un service des sports d’une ville de province ne s’improvise pas organisateur de grands concerts populaires ; même avec le soutien de Michael «bonne mine» Drieberg, l’homme qui divertit toute la Suisse romande. Mais, s’il ne fallait que changer d’organisateurs, l’avenir des manifestations populaires à la Maladière pourrait être envisagé, peut-être, plus sereinement. Malheureusement, de nombreuses contraintes architecturales compliqueront la vie de tous ceux qui se lanceront dans l’organisation de rassemblements de masse au dessus d’un parking, d’une caserne de pompiers et d’un centre commercial.
En 2007, le toujours très optimiste Drieberg, lui-même, mettait le doigt où cela fait mal. Construire une scène sur des piliers porteurs et ne pas endommager une pelouse artificielle renchérissent le coût des productions. «L’accès (au stade) est assez rock’n roll», ajoute-il dans L’Express du 21 juin de cette année-là. En effet, les semi-remorques ne peuvent même pas accéder à la pelouse.
Si cela ne suffisait pas à compliquer l’organisation de ce type de manifestations, les voisins immédiats de ce stade sont pour beaucoup des patients du plus grand hôpital du canton de Neuchâtel. Il n’aura pas fallu plus d’un concert pour qu’un certain nombre d’entre eux fassent connaître leur difficulté à comprendre que de telles manifestations aient lieu à moins de 200 mètres d’un endroit où l’on soufre, se soigne et se repose.

Le show devait continuer mais…

Malgré les nuisances, Pascal Sandoz l’affirme le 27 juin 2007 dans la presse régionale: «Les manifestations à la Maladière ne seront pas remises en cause. Mais nous nous limiterons, comme prévu, à deux concerts par an. Par respect pour le voisinage.» Il s’agissait d’un objectif déjà évoqué par Olivier von Gunten en 2006 : «Organiser un, voire deux grands concerts par année à la Maladière, il sera d’ailleurs difficile d’en programmer plus, en raison du calendrier des matches.» Résultat : depuis 2007, seule une nouvelle «fête du stade» a eu lieu avec comme «guest star» le sympathique Jacky Lagger ; Muse et Placebo étaient pourtant évoqués en 2006…   
Un observateur éclairé pourrait interpréter cette absence de productions musicales comme une démarche sensée des responsables de l’animation de la Maladière : les concerts génèrent des nuisances pour les voisins et ne sont pas un succès populaire ; alors, arrêtons ! Malheureusement, de nombreux décideurs politiques et la population locale ont été bercés par une douce musique parsemée de promesses sur l’utilisation du stade. La Maladière n’est pas (encore ?) un «haut lieu sportif». Il n’y a pas 2-3 concerts par année dans ce stade alors que cela a été dit et redit ; récemment, après la dernière «fête du stade» en 2009, Olivier Von Gunten déclarait encore ce qui suit : «L’organisation est lourde, raison pour laquelle nous continuerons à un rythme bisannuel». Je n’ai pas le souvenir d’une véritable «fête du stade» organisée par la ville dans ce complexe en 2011.
Il est clair que cette absence de manifestations destinées au plus grand nombre ne permet pas à la ville d’espérer combler le manque à gagner par la faillite du locataire principal.  Alors que l’après-Xamax a déjà débuté, pouvons-nous faire confiance à des organisateurs au bilan mitigé et qui promettent des compétitions de kin-ball et de rugby à 7 pour remplacer partiellement les loyers – pas toujours payés – par Xamax ? Comment trouver un soutien populaire local alors que  l’ouverture d’un «sport bar» dans les locaux de la Maladière par les gestionnaires du complexe a vexé un grand nombre des restaurateurs du quartier ? Après 2008, le Portugal de Cristiano Ronaldo reviendra-t-il finir d’abimer la pelouse synthétique de la Maladière ? Est-ce que les mariages, les soirées «slow dating» ou «meurtres et mystères» organisées dans les coulisses de ce stade vont rapporter plus que des cacahuètes ? Permettez-moi d’en douter. Et, qui finit par payer l’addition ? Si, si, c’est vous, c’est nous.

Une faillite déjà payée par tous les contribuables neuchâtelois ?

Le 26 janvier 2012, 20 Minutes rappelait que l’ardoise xamaxienne était estimée à 8 millions de francs. Bulat  Chagaev est toujours en prison alors qu’Islam Satujev a pu en ressortir. D’autres personnalités plus locales vont-elles aussi devoir rendre des comptes à la justice de ce canton ?
Qui paye(ra) la facture ? Evidemment, il s’agit d’abord des créanciers du club qui vont (presque) tout perdre ; ces PME, ces indépendants et ces anciens salariés de Neuchâtel Xamax qui avaient, notamment, fait confiance aux dirigeants précédents avant qu’ils ne cèdent le club à un quasi-inconnu.

Vous n’êtes pas créancier du club et vous vous dites que cela ne vous concerne pas ? Que nenni ! Les 200’000 francs de loyers du stade évoqués dans la première partie de cet article ont-ils été finalement payés à la ville de Neuchâtel ? Qui finance, même partiellement, la détention du Tchétchène le plus médiatique de Suisse ? Est-ce que l’augmentation du nombre de personnes au chômage suite à la faillite du club aura un impact sur les comptes des collectivités publiques ?
Le club devait environ 1’000’000 d’impôts à l’Etat de Neuchâtel, à la fin de l’année 2011 ! De plus, les frais de sécurité engagés par l’Etat à l’occasion des matchs à la Maladière ont-ils été réglés ? Le 8 juillet 2011, Jean Studer, responsable des finances du canton de Neuchâtel, annonçait qu’il restait à payer 750’000 francs depuis la saison 2008-2009 ! Il s’agit bien d’argent public qui devait rentrer dans les caisses de l’Etat. Comment sera comblé ce manque à gagner ? Des licenciements dans la fonction publique ? Moins de prestations de la part du canton ? Plus d’impôts ?
Même si cette triste faillite ne vous affecte guère, cet article en deux parties avait comme but principal de vous rappeler que l’ensemble d’une région est concernée – financièrement, en tout cas – par la vie et la mort d’un club de football, même lorsqu’il s’agit d’une S.A. La justice fait actuellement son travail. Le mouvement junior du club est provisoirement sauvé. Que reste-t-il à faire ? S’engager pour créer un nouveau club, plus régional, probablement, et faire table rase du passé récent ? Certainement. Toutefois, ne pas oublier ce qui s’est passé depuis l’inauguration de la nouvelle Maladière est indispensable ; surtout ne rien oublier ! Lorsque de l’argent public sera sollicité pour financer une partie des rêves de passionnés de sport en général et de football en particulier, il s’agira de se souvenir de toutes les promesses non tenues ; celles qui sont financées – même partiellement – par l’ensemble de la collectivité et pas seulement à Neuchâtel.
Photos stade Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

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3 Commentaires

  1. Belle analyse de la situation. Ce constat fait froid aux yeux et montre l’immense incompétence ce tous ceux qui ont entouré ce stade ces dernières années. Politiciens, présidents, même combat! Cette Maladière est vouée à être un gouffre à fric pour de longues années. Et c’est nous qui allons payer… Y’en a marre!!!

    SOLUTION: Détruisons ce stade et construisons un bel immeuble locatif…

  2. Il est clair que chaque stade construit tous les 30 km (Genève, bientôt Lausanne, Neuchâtel, Berne, etc.) ne pourra pas être rentabilisé par l’organisation de concerts qui concernent le même public.

  3. Neuch, c’est la honte, on a les autorités publiques les plus incompétentes de Suisse et la charge fiscale la plus lourde qui va avec!

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