4ème pays : la République tchèque

Dernière équipe du groupe A à être présentée, la République tchèque tentera de faire aussi bien qu’à l’Euro 2008 : faire chier le pays organisateur et des milliers de fans. Deux rédacteurs se font la nique et te présentent la nation qui a enfanté Antonin Panenka et Eva Herzigova.

Pourquoi la République tchèque ?

Je me suis toujours senti Tchèque au fond de moi. Jusqu’à mes six ans je portais la même coupe de cheveux que Nedved, même s’il n’était pas connu. Au même âge, je trouvais trop cool qu’il existe un pays au nom impossible. Puis j’ai grandi, j’ai fait une collection Panini Euro 96, et y avait un gars qui portait ma coupe de cheveux quand j’avais 6 ans et un autre qui ressemblait à une fille (ndlr : Poborsky), et je me suis demandé comment ils pouvaient aller en finale avec des gonzesses, j’ai trouvé cool. Puis, j’ai eu un début de pilosité et je me suis intéressé à la vraie culture locale: les filles et la bière. Un séjour par Prague pour comprendre les rudiments de la vie nocturne de l’est en dépensant 3,75 francs pour huit chopes de bières, et criant «zamilovanýà» (en tant que bon occidental, on a réduit à Lovény) à chaque coin de rue. Et aujourd’hui, je regrette mon parcours footballistique dans la mesure que j’aurais pu devenir un grand gardien de foot en portant un casque, 1m70 ou pas.

Pourquoi pas la République tchèque

Si le Sparta Prague laisse un souvenir impérissable au supporter de foot lausannois qui, comme moi, a eu la chance de suivre le LS sur les bords de la Vltava en octobre 2010, l’équipe nationale nous laisse particulièrement indifférent. Autant le pays sait dévoiler ses charmes, au sens propre comme au figuré, autant sa participation à l’Euro semble aussi utile à la réussite de ce dernier qu’un Emil Lyng dans un effectif professionnel.
Sans véritable star, sans joueurs charismatiques ni même têtes connues pour les non-initiés, la République tchèque ne se distingue même pas par un collectif léché ou un football total digne des Oranje de 1978. Juste rien qui ne vaut le détour. Qui plus est dans un groupe aussi passionnant qu’un film de Jean-Luc Godard avec pour adversaires la Russie, la Grèce et la Pologne. Tout juste devrait-on échapper aux cortèges de klaxons quels que soient les résultats de ce groupe.
Ne reste plus qu’à se soûler à la Becherovska, s’envoyer quelques genoux de porc bien gras et finir la soirée au Hot Peppers pour se rappeler que les Tchèques ont de nombreux autres atouts que leur équipe nationale de football pour s’enflammer.

Fais-nous rêver avec un souvenir du foot tchèque !

Il est évident que tout érudit de football tchèque ne peut s’empêcher de frémir en repensant au titre acquis de haute lutte lors de l’Euro 76 en Yougoslavie ce soir de 20 juin 1976. Je me rappelle comme si c’était hier. Dans notre appartement une pièce et demie de České Budějovice, nous nous étions entassés mon grand-père, mon père, mon chat et quatre membres de notre valeureuse armée républicaine pour supporter nos onze vaillants guerriers tchèques et nos cinq couillons remplaçants slovaques. Après avoir éliminé facilement les tulipes 3-1 en demi-finales, nous affrontions ces sales capitalistes d’Allemands. 2-2 au terme de 120 minutes largement dominées par les nôtres. A la guerre comme à la guerre pour une séance de penalties mémorable. Une séance à faire pâlir Robben ou un Suisse ponctuée de manière magistrale par Monsieur Antonin Panenka qui nous invente un tir but sorti de nulle part qui entra dans l’Histoire et imité encore aujourd’hui par les plus grands de Totti à Zidane en passant par Michaël Landreau. Une fête mémorable s’en est suivie sur la place Přemysl Otakar.

Fais-nous rire avec un souvenir du foot tchèque !

Des 208 nations figurant au classement officiel de la FIFA, il ne doit pas y en avoir beaucoup dont la plus large défaite de leur histoire a été infligée par la Suisse. C’est pourtant le cas de la République tchèque. Bon certes ce n’est pas une immense baffe non plus mais avouez qu’en avoir pris 3 contre la Nati, même si c’était en 1994 face à l’une des meilleures équipe de Suisse de l’histoire, ça la fout mal.
Le 20 avril 1994 donc, à Zurich, les gars de Roy Hodgson s’imposent 3-0 grâce à trois réussites inscrites en première mi-temps pare Georges Bregy et un doublé de Stéphane Chapuisat. En face, les Kuka, Suchoparek, Smicer ou Poborski ne s’en souviennent peut-être pas tous mais gageons qu’ils n’en seraient pas très fiers si on le leur rappelait.

Pourquoi la République thèque va être championne d’Europe ?

Car Petr est Cech.
Car, chaque deux éditions, les Tchèques sortent de leur mutisme international pour exposer à la face de toute l’Europe de nombreux talents méconnus mais qui sévissent non seulement déjà en Europe, mais aussi au pays, puisque un tiers de l’effectif retenu pour l’Euro joue dans le championnat tchèque. Tel fut le cas en 96 et 2004.
Car Pavel Nedved illuminera les travées du stade de sa chevelure blonde.
Car ils sont tombés dans le groupe le plus facile de l’Euro. Euh… Ce n’était pas la même chose déjà en 2008 ?
Car la Pilsner c’est bon.
Car ils ont les plus jolies supportrices.
Car Milan Baros dit qu’ils vont gagner ! Et s’il le dit…

Pourquoi la République tchèque va se vautrer lamentablement au 1er tour ?

Le premier adversaire des hommes de Michael Bilek dans le tournoi sera la Russie. Telle l’opération Danube décidée par Brejnev par l’envoi des chars de l’armée rouge de la défunte URSS sur Prague en août 1968 pour remettre au pas les partisans d’un socialisme à visage humain, les troupes de Dick Advocaat, emmenées par les Arshavin, Pavlyuchenko et Pogbrenyak  vont déferler sur Wroclaw et renvoyer les Kadlec et consorts à leurs études tel Alexandre Dubcek il y a 42 ans.
Dans un remake de la demi-finale de 2004 à l’Estadio do Dragao de Porto, la Reprezentace va de nouveau de faire avoir par le jeu pourtant sans génie des bouffeurs de moussaka. En pleine déconfiture économique, risée de tout un continent et nation mal-aimée du moment, la Grèce n’a bientôt plus que le football pour rêver et pour exister. Prêts à tout pour se faire repérer à l’étranger pour pouvoir fuir un pays exsangue, les Fotakis, Ninis et consorts vont surclasser les pauvres lointains cousins de l’immense Milan Fryda.
Dans l’ambiance survoltée du Stadion We Wroclawiu, la rencontre face au co-organisateur polonais et accessoirement voisin, risque bien de finir en véritable chemin de croix pour les joueurs de la fédération présidée par l’ancien joueur Ivan Hasek. Bien que sûrement assez nombreux vu la proximité du pays, les supporters tchèques auront bien de la peine à se faire entendre face au chaud bouillant public polonais. En tout cas, si une comparaison avec le saut à skis peut paraître quelque peu hasardeuse, on peut toutefois clairement affirmer que l’ambiance au bord du tremplin de Harrachow est bien loin de celle qu’on peut trouver du côté de Zakopane.

Comment la République tchèque va être championne d’Europe ?

Après un premier match difficile soldé par un vieux 0-0 des familles face aux Russes, les Tchèques vont gérer leur statut de favoris en s’imposant facilement face à une équipe de Grèce qui ne court que sur une patte, attendant de voir les primes de participation confisquée lui être rendues et contre la Pologne qui fêtait déjà à la vodka depuis 3 jours sa qualification pour le second tour après deux victoires 1-0.
Une première place et un rendez-vous face à l’Allemagne qui joue sans Lahm de l’équipe. Match disputé, Rosicky ouvre le score, mais Suchy fait des soucis à son arrière-garde en marquant un auto-but. Séance de penalty, c’est du toujours du 60-40 : Schweinsteiger ajuste le poteau. Les Tchèques, comme à leur habitude très habiles dans cet exercice, ne manquent aucun de leur tir. En demi contre l’Espagne, la Národní tým attend son heure. Cech sort tout, et sur le seul corner tchèque de la partie Pekhart du haut de son mètre 94 trouve les filets de Casillas en s’appuyant comme un malade sur Sergio Ramos. Et comme si c’est goal, c’est but, les Tchèques vont en finale et retrouvent la Croatie pour la finale le plus improbable mais la plus belle de l’histoire. Deux équipes qui jouent au foot, un match d’anthologie qui se ponctue d’un 4-4 (oui, Cech est suspendu car il a pris son second jaune pour anti-jeu en fin de match contre l’Espagne). Tirs au but, et Panenka fait son apparition…

Comment la République tchèque va se vautrer lamentablement au 1er tour ?

Le 8 juin, à peine quelques heures après la défaite surprise du rival voisin polonais lors du match d’ouverture face à la Grèce, les Tchèques abusent de Spirytus polonais et pénètrent fortement alcoolisés sur la pelouse pour affronter la Grande Russie. A la ramasse du début à la fin, les défenseurs de la 26ème nation au classement FIFA ne font pas vraiment honneur à leur rang et sont plus proches des performances du Lesotho ou du Vanuatu.
Après avoir été fortement sermonnés par leur président Vaclav Klaus, l’homme qui dit ne pas connaître d’argent qui soit sale, après le fiasco du premier match, c’est le couteau entre les dents que les joueurs de Michael Bilek entrent sur le terrain pour leur rencontre face aux Grecs. Les joueurs hellènes, eux, semblent moins concernés depuis qu’un mystérieux donateur inconnu leur a offert à chacun la toute dernière Skoda. Pourtant, ils l’emportent 1-0 sur un but de raccroc de Charisteas. Comme pour montrer au monde que la Grèce est un pays où la corruption n’a pas droit au chapitre. Ce que personne ne doutait.
Reste donc un match couperet face au rival honni polonais. Pour déstabiliser l’adversaire et sur une brillante proposition de Jakub Wawrzyniak, tout récemment élu plus moche de l’album Panini, les Polonais arborent tous une moustache à la Adam Malysz. Incapables de se concentrer, les Tchèques balbutient leur football et Robert Lewandowski rappelle à Julien Mouquin qu’il n’y a pas qu’avec les Schwarz-Gelben qu’il arrive à planter des buts. Fou de rage d’évoluer continuellement avec des équipes de bras cassés, le gardien Cech annonce sa retraite internationale, quitte Chelsea et signe au LS pour profiter d’une fin de carrière paisible au bord du Léman.

Les forces de la République tchèque

C’est son collectif. Pas de stars misent sur un piédestal, ici on joue pour son pays, ses couleurs, pas pour sa propre gloriole à la recherche d’un contrat avec Genoa, Hoffenheim ou West Bromwich Albion. Puis, on n’oubliera pas que l’équipe possède le meilleur gardien au monde. C’est l’assurance d’avoir une assise défensive solide. Et comme Rosicky, s’il se remet de sa blessure au mollet, est dans une forme dortmundienne cette saison, tout est possible.

Les faiblesses de la République tchèque

Avec 13 points en 8 matches, la République tchèque est le plus mauvais deuxième des phases de qualification. Sa qualification obtenue en barrage contre le faible Monténegro, qui n’avait pas eu à forcer son talent pour devancer une pathétique Nati, ne suffit pas à donner de l’optimisme à ses supporters.
Si Petr Cech peut être considéré comme le point fort de l’équipe, il ne va pas sortir à chaque fois un match comme contre le Bayern en finale de Ligue du Pognon avec ses copains millionnaires de Chelsea. Déjà parce qu’en face il n’aura pas toujours la chance d’avoir un Robben aussi mauvais qu’agaçant mais aussi parce que tout le monde se souvient de la bourde monumentale réalisée à Genève face à la Turquie lors de l’Euro 2008, qui laissait filer la qualification pour les quarts de finale au profit de leur adversaire du soir.
Du côté de la défense, ses largesses risquent de se payer cash. L’absence de joueurs réputés et d’un véritable pilier expérimenté ne va pas sécuriser ce secteur bien friable. Et ce n’est pas la pauvreté dans l’animation offensive qui devrait leur permettre de faire le poids dans cette compétition. Les stars locales ont pour nom Hübschman, Plasil, Polak ou Stajner. Pas de quoi pavoiser donc.
Si elle pourra tout au plus profiter d’un groupe très ouvert pour arracher un passage en quarts, on les voit tout de même mal se défaire de la Russie, de la Grèce ou de la Pologne. Pas franchement des ogres du tournoi, mais des équipes assurément bien plus fortes que la République tchèque.

Quels joueurs tchèques vont illuminer l’Euro ?

La première se nomme Theodor Gebre Selassie. Non, ce n’est pas un coureur de fond de l’Afrique de l’Est, mais le Badile Lubamba tchèque en plus talentueux. Un très bon latéral qui perce sur le «tard», puisqu’il a 25 ans. D’une maman tchèque et d’un père éthiopien, Theodor est devenu le premier joueur noir à évoluer en équipe nationale il y a une année. Huit sélections plus tard, il est le nouveau latéral droit de l’équipe de Michal Bilek. Il est d’ailleurs le seul joueur de Liberec, récent champion de République tchèque, à avoir été sélectionné. Dans son club, il n’a pas manqué une seule minute cette saison.
Le second est déjà plus connu puisqu’il sévit déjà en Bundesliga. Tomas Pekhart (22 ans) peut être le buteur révélation de cet Euro. Attaquant longiligne dans la même direction que son illustre prédécesseur grand pin Jan Koller, il a réalisé une très bonne première saison à Nuremberg. Non pas qu’il a évincé Bunjaku de la pointe de l’attaque des Bavarois, ce qui n’est pas un exploit en soi, mais il a inscrit neuf réussites. Avec seulement neuf petites capes à son compteur, l’ancien buteur de Jablonec voudra exploser lors de ce mois de juin.

Quels joueurs tchèques vont faire rire l’Europe ?

Présenté comme un grand espoir du football international lors de sa jeunesse, Milan Baros n’aura, et c’est peu dire, jamais confirmé les attentes placées en lui. Bon en même temps quand celui qui a en premier cru en lui à 17 ans se nomme Gérard Houiller, qui a tout de même également vu en Florian Sinama-Pongolle par exemple un génie, on peut douter des réelles qualités qu’il possédait déjà à l’époque.
Aussi peu prolifique à Liverpool, Aston Villa, Lyon ou actuellement Galatasaray qu’un Eren Derdiyok avec la Nati, Milan Baros est typiquement l’attaquant à la réputation surfaite qui n’a finalement jamais donné satisfaction partout où il a évolué. Si ses 40 réalisations en 87 sélections lui assurent un bon ratio en équipe nationale, il les doit presque exclusivement au fabuleux remiseur qu’était Jan Koller. Seul en pointe depuis le départ à la retraite du géant chauve, il traîne son spleen et son unique but de la phase qualificative fut inscrit contre le bien modeste Liechtenstein. Son titre de meilleur buteur de l’Euro 2004 reste une erreur de l’histoire pas prête de se répéter à nouveau.
Souvent plutôt mal servis par ses milieux, et notamment le presque tout aussi décevant que lui Tomas Rosicky, il fait qui plus est bien trop régulièrement preuve d’une nonchalance très ibrahimovicienne et d’une maladresse devant le but adverse que ne renierait pas Aleksandar Prijovic.

Ton gage si la République tchèque sort au 1er tour ?

Si les Tchèques sortent après trois petits matches, je passe toute une soirée/nuit sur Lausanne et notamment au Bamee Bar avec une perruque pour ressembler à Nedved.

Ton gage si la République tchèque est championne d’Europe ?

Si par un incroyable concours de circonstance digne de l’aventure danoise de 1992 ou grecque de 2004, la République tchèque finissait championne d’Europe, je m’engage à porter un casque semblable à celui de Petr Cech lors du prochain derby lémanique à la Pontaise. Après m’être descendu une bouteille de Becherovka bien entendu !

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2 Commentaires

  1. C’était pas le bon jour pour critiquer les performances de Derdiyok avec la Nati…
    Bon faudra quand même qu’il songe à marquer dans des matches qui comptent !

  2. J’ai adoré la réplique: « avec pour adversaires la Russie, la Grèce et la Pologne. Tout juste devrait-on échapper aux cortèges de klaxons quels que soient les résultats de ce groupe »… et j’ai souris sur le « aussi peu prolifique (…) qu’un Eren Derdiyok avec la Nati » qui est tombé au mauvais moment, mais qui renforce le sourire qu’on a de lire l’article.
    Bravo aux auteurs qui ont si joliment encensé ou trashé les équipes du groupe A… je me réjouis de passer aux équipes plus auréolées d’Europe pour lire les coups bas de mauvaise fois, tranchants, qui me font bien marrer!

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