Les Telê Bubis

Emmenés par un étonnant Felipe « Telê » Santana, les Bubis de Jürgen Klopp ont franchi sans encombre l’obstacle Donetsk au terme d’une prestation extrêmement aboutie. Après quinze ans d’absence, le Borussia Dortmund retrouve les quarts de finale de la Ligue des Champions. On l’a dignement fêté.

On va situer le départ de ce récit dans un train régional, quelque part entre Mülheim an der Ruhr et Wattenscheid. Ouais, on circule en Regionalbahn en ce moment, ça dure des plombes mais ça laisse le temps de boire des bières et ça permet de voyager gratuitement avec notre abonnement du BVB. Bref, on était dans ce train qui nous amenait vers le huitième de finale de la Ligue des Champions Borussia Dortmund – Shakhtar Donestk et on devisait sur le match à venir. D’après quelques bribes d’informations glanées ici ou là sur un quai de gare, on apprend que Mats Hummels, grippé, longtemps annoncé incertain, est finalement forfait pour ce match. Mauvais plan, pensait-on, car son remplaçant, Felipe Santana, a été assez catastrophique lors de ses dernières sorties. Eternel substitut du duo Hummels-Subotic depuis quatre ans, le Brésilien avait réussi quelques intérims brillants par le passé mais, cette saison, ses apparitions ont quasiment toutes été marquées par l’une ou l’autre bourde spectaculaire et généralement dommageable. C’est donc avec une certaine appréhension que l’on a accueilli la présence de Telê (les nostalgiques du Brésil 1982 et 1986 comprendront le surnom) sur la pelouse du Westfalenstadion contre le redoutable Shakhtar Donetsk.

A sens unique

On s’y attendait un peu : même si, après le 2-2 du match aller, c’est le BVB qui est qualifié au coup d’envoi, les Ukrainiens abandonnent l’initiative de jeu au Borussia. La force de cette équipe du Shakthar, ce qui lui a permis de s’extirper brillamment d’un groupe comprenant la Juventus et Chelsea, c’est sa capacité à se propulser très vite en phase offensive une fois le ballon récupéré, elle n’avait pas vraiment de raisons de changer son système. Le problème, c’est que Donetsk va tomber sur un Dortmund des très bons soirs, parfaitement concentré en défense, implacable au pressing et inspiré offensivement, surtout lorsque le ballon transite par les pieds du virtuose Mario Götze. Les vingt premières minutes sont à sens unique et le Shakhtar est complètement étouffé par les vagues jaunes et noires qui déferlent en direction de la Nordtribüne. L’occasion la plus nette échoit à Lewandowski qui se heurte au gardien Pyatov. 

Santana ce héros

Finalement, le but libérateur va tomber au moment où les Ukrainiens commençaient à desserrer un peu l’étau et à tenter quelques timides incursions dans le camp adverse. Mario Götze tire un corner que Felipe Santana, au prix d’une magnifique détente, expédie en pleine lucarne. On l’a un peu critiqué ces derniers temps mais, sur ce match là, on a retrouvé le Telê Santana impérial des victoires capitales de novembre 2011 contre le Bayern et Schalke. Outre son but, le Brésilien a été impeccable dans presque toutes ses interventions et nous a quasiment jamais fait trembler sur ces relances. Il est aussi vrai que sa tâche a été facilitée par l’énorme boulot effectué par toute l’équipe en milieu de terrain, secteur de jeu dans lequel le Shakhtar a été complètement laminé. Là, on a vraiment retrouvé l’équipe du BVB double championne d’Allemagne en titre. Cette démonstration va obtenir une nouvelle récompense sur une déviation de Marco Reus pour Robert Lewandowski dont le centre trouve la subtile reprise de Mario Götze pour le 2-0. C’est sur cet avantage confortable et mérité que l’on a pu aller chercher notre Coca Zero de la mi-temps, on n’allait quand même pas tenter la Clausthaler sans alcool. C’est assez marrant, les soirs de Coupe d’Europe, les buvettes du Westfalenstadion sont quasiment désertes, je serai assez curieux de connaître la différence de chiffre d’affaire entre un match européen sans alcool et une rencontre de Bundesliga où la Brinkhoff’s coule à flot, l’écart doit être énorme. 

Danke Pyatov

Le BVB connaîtra sa seule alerte pendant une dizaine de minutes en début de deuxième mi-temps. Sous l’impulsion de Douglas Costa, qui avait déjà posé pas mal de problèmes à l’aller, les Ukrainiens se montrent enfin dangereux avec deux ou trois frappes un peu angoissantes. On était en train de se dire que l’affaire n’était pas encore tout à fait classée lorsque le gardien Andrei Pyatov a ruiné les dernières illusions de son équipe sur une grossière faute de main. Lors du tirage au sort, on s’était fait la réflexion que le gardien était le point faible de cette formation de Donetsk mais jusque-là Pyatov avait été impeccable. Sauf que, sur une énième intervention impériale de Santana et une course de cinquante mètres de Blaszczykowski, Gündogan arme un tir anodin que le dernier rempart ukrainien relâche sur le Polonais qui avait poursuivi son action pour inscrire le 3-0. Le Westfalenstadion pouvait célébrer la victoire et la Südtribüne utiliser, pour la seule et unique fois du match, les sièges inutiles qui y avaient été installés pour mieux se relever et sautiller en hommage à son équipe.

Une soirée presque parfaite

Donetsk est resté dangereux jusqu’au bout mais Weidenfeller a été parfait pour assurer un blanchissage. Bien sûr, ce Shakhtar qui vient de reprendre son championnat et qui a perdu son joyau Willian durant l’hiver était sans doute plus vulnérable à cette époque de l’année qu’à l’automne dernier. Il n’empêche, le BVB a réussi une grosse performance contre un adversaire talentueux et expérimenté. C’est assez plaisant de passer cet écueil des huitièmes de finale, contrairement à d’autres, uniquement grâce à ses propres mérites. Et de pouvoir dérouler en fin de partie, histoire de permettre aux fans de préparer le match le plus important de la semaine, le Revierderby samedi à Gelsenkirchen, en répétant les chants d’amitié et de fraternité envers Schalke 04. Sachant qu’on a en plus pu s’offrir la première terrasse de l’année dans l’Innenstadt avant la rencontre, on peut dire que cette soirée a frôlé la perfection. Le seul bémol, c’est cette frappe de Marco Reus à côté au terme d’un slalom dans la défense orange qui, s’il s’était terminé par un but, aurait fait le tour du monde. On s’en remettra.

Tout sauf le Bayern

A la base, on n’attendait pas grand-chose de cette Ligue des Champions. Mais, maintenant que le titre et la Coupe d’Allemagne sont perdus et que la place sur le podium en Buli est en très bonne voie, c’est la compétition qui, en dehors du Derby de samedi, recèle désormais le plus fort potentiel d’exaltation pour cette fin de saison du Borussia Dortmund. Lequel n’avait plus figuré dans les huit meilleures équipes d’Europe depuis 1998, année où son parcours en Ligue des Champions s’était arrêté en 1/2 finale contre le Real Madrid. C’est donc bien un retour au premier plan après une longue éclipse et pas mal de galères. On attendra avec une certaine impatience le tirage au sort des quarts de finales pour lesquels je n’ai qu’un seul souhait : tout sauf le Bayern !
En attendant, le récit avait commencé dans un train régional, il se termine également dans un train régional, en l’occurrence le Lausanne – Echallens – Bercher qui m’amène frais et dispo au travail sur le coup des midis au lendemain de cette qualification historique. Le tout après avoir fêté la victoire jusqu’à quatre heures du matin dans un bar dortmundois, quitté uniquement pour attraper miraculeusement un avion aux aurores à Cologne, puis, tout aussi miraculeusement, deux trains pour regagner mon cher Gros-de-Vaud. Définitivement, j’adore mon existence pantouflarde et casanière. Et samedi c’est Derby…

Borussia Dortmund – Shakthar Donetsk 3-0 (2-0)

Signal Iduna Park, 65’829 spectateurs (guichets fermés).
Arbitre : M. Skomina.
Buts : 31e Santana (1-0), 37e Götze (2-0), 59e Blaszczykowski (3-0).
Dortmund : Weidenfeller; Piszczek, Subotic, Santana, Schmelzer; Bender (46e Kehl), Gündogan (82e Sahin); Blaszczykowski(69e Grosskreutz), Götze, Reus; Lewandowski.
Donetsk : Pyatov; Srna, Rakitskiy, Kucher, Rat; Fernandinho, Hübschman (82e Stepanenko); Alex Teixeira, Mkhitaryan, Taison (46e Douglas Costa); Luiz Adriano.
Carton jaune : 15e Kucher.
Notes : Dortmund sans Owomoyela (blessé) ni Hummels (malade), Donetsk privé de Chygrynskiy, Ilsinho (blessés), Maicon et Ismaily (non qualifiés).

Écrit par Julien Mouquin

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3 Commentaires

  1. Il me semble qu’il n’y a pas de tirage au sort et que les prochains matchs soient déjà programmés non?
    Le Real (saloperie de mafia) devrait jouer contre le Bayern Munich…

    Info à vérifier.

  2. Tirage au sort le 15 mars, il me semble.

    Honnêtement, sur les équipes encore en compet, seul le Bayern fait vraiment peur. Je pense que Dortmund a sa chance dans cette LDC.

    Il faudra quand même se méfier des italiens, qui avancent sans trop faire de bruit, mais à mon sens, le Real est tout à fait prenable.

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