C’est bel et bien fini

Il y a de cela quelques semaines encore, la Serie A était considérée comme le dernier championnat européen digne d’intérêt, n’ayant pas encore délivré son verdict final. Quelques victoires de la Juve plus tard, force est de constater que le suspense n’est plus au rendez-vous et que le dernier tiers de cette édition 2012-2013 s’annonce quelque peu ennuyeux.

Un titre déjà joué

C’est quasiment officiel, la Juve va s’adjuger pour la deuxième saison consécutive le scudetto. Avec  9 points d’avance sur son dauphin Naples, qui n’a plus connu la victoire depuis cinq journées, on ne voit pas comment les bianconeri pourraient laisser échapper le titre. Le championnat d’Italie va donc rejoindre celui d’Allemagne (Bayern), d’Angleterre (ManU) et d’Espagne (Barça) où le nom du champion est connu depuis plusieurs semaines déjà. Seule la Ligue 1 offre peut-être un semblant d’intérêt, puisque le PSG semble être capable de perdre contre n’importe qui à n’importe quel moment… Heureusement, il reste le formidable bras de fer à venir entre le FC Bâle et GC, ou encore le mano à mano entre Porto et Benfica… Le phénomène n’est pas nouveau en soi, et le suspense dans les divers grands championnats nationaux est devenu un ingrédient aussi présent que le suspense sur un Tour de France du début des années 2000. Pour dire les choses plus clairement, les intérêts des divers championnats se cristallisent bien plus souvent autour de la barre de relégation et des places européennes, puisque les différents champions sont souvent connus après une vingtaine de matchs à peine, et ça devient quand même un peu agaçant pour rester poli. Des solutions ? Je n’en ai pas, mais il faudrait certainement commencer par se pencher sur le problème d’insipidité qui frappe la Ligue des Champions depuis une dizaine d’années (encore que l’édition actuelle n’est pas la pire à ce niveau) et qui entraîne dans sa spirale infernale la plupart des championnats européens.

Le Calcio sera donc remporté par une Juve qui pratique un football relativement séduisant (même si c’est ô combien difficile de l’avouer pour un fervent supporter d’une autre grosse écurie comme moi) et qui plus est, figure toujours dans la course à la Ligue des Champions. Lichtsteiner et compagnie semblaient pourtant vaguement en difficulté lors de la reprise hivernale, mais aucun de ses adversaires directs n’a su en profiter, puisque tant Naples que la Lazio et surtout l’Inter ont proposé la faculté extraordinaire à se planter royalement lorsque la première place leur tendait les bras. Ainsi bien qu’ayant connu sporadiquement quelques coups de mou, la Juve s’achemine pépère vers un 29e titre qui sera marqué par une superbe sortie de son entraîneur Antonio Conte que je me dois de relever. Celui-ci  s’exclamait à la fin du match face à Genoa, durant lequel les turinois avaient soi-disant été lésés (une demi dizaine de pénaltys non sifflés) : «Addesso basta con il fair-play» qui se traduirait par «Maintenant ça suffit avec le fair-play». Il parlait du fait que jusqu’alors son club et lui-même, extrêmement fair-play, ne critiquaient et ne contestaient jamais les décisions arbitrales, mais que cela allait changer. Pas mal pour un mec qui revenait tout juste de 8 mois de suspension pour avoir été mêlé à des matchs arrangés ! Qu’allait-il donc faire ? Critiquer systématiquement les décisions arbitrales et recommencer à truquer des matchs ? Parce qu’il trouve avoir été spécialement  fair-play durant ces dernières années en passant sous silence le trucage de matchs ? Mais surtout cette sortie confirme un de mes dictons préféré du football : c’est facile d’être fair-play quand tu gagnes, par contre quand tu es en difficulté ça se complique quand même. Là il nous a vraiment fait rêver.

Qui pour toucher le gros lot ?

Le nom du champion étant déjà connu depuis belles lurettes, le suspense se concentre autour des places européennes et plus particulièrement autour des places qualificatives pour la Ligue des Champions (2e et 3e places). Comme dans bien des championnats, le but des grandes équipes n’est plus tant de remporter le titre mais davantage d’accéder au pognon de la Ligue des Champions. A ce petit jeu, les favoris semblent être l’AC Milan, revenu de nulle part, et Naples qui s’accroche tant bien que mal à sa deuxième place, sans oublier la Fiorentina, qui continue à impressionner ou encore la Lazio et l’Inter (mais là on y croit plus trop).
L’AC Milan était donné pour mort à l’automne passé, les Rossoneri végétaient alors aux alentours de la dixième place et tout semblait indiquer que la saison allait être très longue du côté de Milanello. Pourtant la bande Berlusconi  s’est refaite une santé, avec notamment le retour en forme d’éléments comme Pazzini et Boateng, l’explosion complète d’El Shaarawy  et surtout l’arrivée hivernale en grande pompe du bambino préféré des italiens, Mario Balotelli. Adulé comme le nouveau messie par une moitié de la ville et copieusement insulté par l’autre moitié (parfois avec des cris de singes !), Mario a rejoint la longue liste des «traîtres milanais» (Cassano, Pazzini, Muntari ou si on remonte à quelques années en arrière Ronaldo, Ibrahimovic, Vieri, Favalli, Seedorf,…) qui passent sans scrupules d’un ennemi à un autre. Force est de constater que de changer de camp n’est absolument plus un problème dans le football moderne, bien triste quand même… Pour en revenir à la bande à Silvio, au vu du régime auquel tournent les Rossoneri en ce début d’année, ils semblent largement favoris pour finir sur la deuxième marche du podium au mois de mai, même si l’élimination face au Barça va sûrement peser sur le moral des milanais (et peut-être même sur le vôtre).

La troisième place sera probablement plus disputée. Quatre équipes peuvent encore y prétendre même si toutes connaissent régulièrement des amnésies importantes. Les dernières en date ? Pas plus tard que ce weekend : défaite 2-0 pour Naples sur la pelouse de Chievo et ridicule défaite à domicile 1-0 de l’Inter face au modeste Bologne. Ces deux candidats à la troisième place traversent une crise importante et tant Walter Mazzarri à Naples qu’Andrea Stramaccioni à l’Inter se trouvent sur un siège éjectable. L’élimination cinglante en Europa Ligue des deux équipes y est également  pour quelque chose, tant la baffe subie par Naples lors de la double confrontation en 16es de finale face aux tchèques de Viktoria Plzen, que la déculottée prise par l’Inter à White Hart Lane face à Tottenham (défaite 3-0) jeudi passé, auront finalement laissé des traces. La Lazio est elle aussi dans une passe difficile, notamment avec deux défaites d’affilées face à des concurrents directs en championnat (Milan et Fiorentina), mais les bonnes performances du club romain en Europa Ligue et une place en finale de Coupe d’Italie viennent tempérer un éventuel sentiment de crise. La Fiorentina semble finalement la mieux armée pour une place en tour préliminaire de Ligue des Champions, puisqu’elle a dernièrement terrassé tant l’Inter (4-1) que la Lazio (2-0) ! De quoi en faire un favori notoire pour la troisième place.

Au revoir, et à bientôt peut-être

La lutte pour la fameuse barre est elle aussi relativement peu palpitante. Bon on exagère un peu, en réalité quatre équipes sont plus au moins aux coudes à coudes pour une seule place, la 17e synonyme de maintien. Parmi ces quatre équipes, deux semblent déjà condamnées à la Serie B. D’un côté, sans grandes surprises, Pescara qui n’a tout simplement pas le niveau pour évoluer dans cette catégorie, et de l’autre Palerme qui a été complètement flingué par des changements incessants d’entraîneurs, de joueurs et probablement de coupeurs de citrons, bref une mauvaise gestion de son sulfureux président Zamparini nommé à juste titre parmi les candidats au titre de meilleur volatile urbain du mois de février. Certes, ces deux équipes ne sont qu’à 5 points de la fameuse 17e place et tout espoir devrait encore être possible, mais la dernière victoire de Pescara remonte au tout début de l’année 2013 et celle de Palerme date carrément de l’année passée… On voit donc mal comment ces deux équipes aux abois pourraient refaire un retard de 5 points, à moins de truquer des matchs, ce qui est toujours possible en Italie.
 La lutte devrait donc se cantonner à un duel entre Sienne et Genoa. Deux petits points, c’est tout ce qui sépare ces deux équipes. Si pour l’instant Genoa est en position favorable, c’est bel et bien Sienne qui part favori pour le maintien. La raison principale à cela s’explique par le fait que les Toscans ont eu la bonne idée de recruter Innocent Emeghara. Pas besoin de relater grand-chose à ce sujet, puisque tous les fans de foot suisses sont au courant des exploits du futur avant-centre revenant de la Nati qui a claqué 5 buts en 7 matchs. Autre argument de poids plaidant en faveur des Toscans : sans les 6 points de pénalité infligés en début de saison, ils pointeraient tout simplement à quatre longueurs devant leurs adversaires directs à la relégation. En continuant à ce rythme, les Bianconeri des très pauvres devraient être en mesure de sauver leur peau comme chaque année. Pourtant Genoa, club en difficultés financières, n’a pas encore baissé les bras et a obtenu quelques résultats intéressants et encourageants ces derniers temps. En allant par exemple tenir en échec la Juve sur son terrain, ou encore en profitant d’une fameuse amnésie de la Lazio, Genoa peut encore largement espérer garder sa place parmi l’élite. Il faudra par contre mettre fin à la stratégie qui consiste à changer la moitié de l’équipe à chaque session de mercato estival et hivernal si le club entend prospérer encore durablement en Serie A. On y verra probablement un peu plus clair après le 30 mars prochain, jour d’un certain Genoa-Sienne qui s’annonce malgré tout comme une des affiches de cette fin de championnat… et non pas l’Inter-Juve qui aura lieu à la même date, ce qui est quand même bien triste.

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7 Commentaires

  1. Des solutions pour redonner de l’interêt aux compétitions de clubs existent .
    Pourquoi ne pas envisager des mesures telles que le plafonnement des salaires et des budgets de façon à éviter ces écarts de 1 à 30 qu’on peut voir dans certains championnats ?
    Pourquoi ne pas revenir sur l’arrêt Bosman en n’autorisant que 3 joueurs non sélectionnables par équipe de façon à ce que les bons joueurs locaux aient plus de mal à s’exiler ?
    Pourquoi ne pas exiger des effectifs à 50 pour cent de joueurs formés au club afin de permettre aux clubs de bénéficier de leur bonne géneration quand elle arrive ?
    Pourquoi ne pas organiser une ligue des champions où ne jouent que les champions afin de ne pas retrouver tous les ans les mêmes ?
    A mon avis , si on veut des solutions , il faut déjà comprendre pourquoi on en est là .

  2. Très sympa l’article sur le football italien, merci à l’auteur pour cela.

    Par contre pitié arrêtez de pleurnicher avec vos championnats sans intérêts, c’est toujours la même rengaine. Vous l’avez voulu votre beau football business. Continuer à vous abonnez à Anal +, Swisscom TV, etc… Les droits TV pour l’Euro 2016 viennent d’atteindre des sommes historiques, moins de la moitié des matchs seront visibles « en clair », c’est pas demain la veille que ça va se changer.

  3. Il ne me semble pas que l’année dernière fut particulièrement sans intérêt au niveau du suspense pour le titre dans les différents championnats..
    Un simple souvenir de la première ligue le confirme!

  4. Ayé, encore un qui ne sait pas de quoi il parle lorsqu’il s’agit d’aborder la suspension de Conte…
    Parce qu’à titre d’exemple, un certain Paolo Cannavaro a vu sa suspension annulée alors qu’à la base il avait été condamné pour les mêmes « faits » (non dénonciation) que l’entraineur bianconero.
    Suspension justifiée principalement, voire uniquement, « parce qu’il ne pouvait pas ne pas savoir »…

    Quant au Milan, avec ses petits coups de pouce hebdomadaires, il finira en CL à coup sûr. Mais si c’est pour se prendre des tôles comme mardi, ça peut être assez divertissant, on ne va pas se le cacher.

  5. Je rejoins Lanfeust. Cher Olivier, avant d’écrire un article, il vaut mieux retourner son stylo sept fois dans sa main. Et peut-être faire ton métier de journaliste comme il se doit. Et de t’intéresser plutôt à la différence des systèmes arbitraux et judiciaires en Europe, qui peuvent conduire à la suspension d’un entraîneur en Italie « pour n’avoir pas dénoncé les arrangements de ses joueurs », sans preuve directe « mais parce qu’en tant qu’entraîneur, il ne pouvait pas ne pas être à connaissance de tels faits dans son vestiaire », alors qu’en Suisse par exemple, le scandale des matches truqués (spécialement en Challenge league) n’a conduit qu’à une seule procédure contre 3 joueurs de Gossau, finalement acquittés, simplement parce que le droit suisse ne connait pas l’institution de la fraude sportive. Pour info – et ça pourrait être un sujet d’article – la Confédération planche sur un projet qui irait dans ce sens.

  6. Bien vu JC. l’arret bosman est le pire fléau que le football ai connu, et ce sport court à sa perte en étant aussi aveugle.

  7. Plein de connaissances le journaliste… Sait-il qu’un des principaux accusateurs de Conte vient de reconnaitre qu’il avait inventé ses propos… Le niveau est tellement faible dans l’article…

    Et le pire, c’est qu’il est surement fan de l’Inter… Seul coupable avéré dans le Calciopoli!

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