Combat final pour Daniel-(Pedro)San

Après Andy Schleck, on continue ce mois-ci la série des crève-cœurs, ou plutôt des grands malchanceux dans leur sport. Et si on reste sur deux roues, cette fois-ci l’honneur est pour un sport assumant son moteur, la moto. Et l’un des plus grands (et petits) poissards de ce sport est bel et bien Dani Pedrosa.

Mais qui est Dani Pedrosa ?

Daniel Pedrosa Ramal naît le 29 septembre 1985 près de la ville de Sabadell, en Catalogne. Il débute la compétition en pocket bike très jeune, à l’âge de… 9 ans ! Non, en Espagne on ne plaisante pas avec le motocyclisme. Le pays est la nation phare de ce sport et se donne les moyens de le rester, notamment en ouvrant des compétitions dès le plus jeune âge. Et dire qu’en Suisse on n’a même pas de vrai circuit…

Enfin bref, comme vous vous en doutez, il ne tarde pas à percer dans son sport et à gravir les échelons pour arriver, en 2001 – à 15 ans donc – en championnat du monde 125 centimètres cubes (cc). Dès sa première saison, il termine deux fois sur le podium puis gagne ses premières courses l’année suivante. Mais je reviendrai plus en détail sur sa carrière dans quelques lignes.

Car Dani Pedrosa est un personnage à part dans le petit monde de la moto GP. Le poids plume (1m58 pour une cinquantaine de kilos, combi et casque non compris) détonne par sa discrétion en comparaison des Rossi, Marquez ou Lorenzo et cela en fait un coureur très apprécié du grand public. Si l’on ajoute à cela un comportement irréprochable aussi bien en course qu’en interview (contrairement à… Oh, on me dit que je vais me faire détester par les fans de Marquez et de Rossi), une fidélité sans faille à Honda ainsi qu’un style atypique, on obtient l’un des chouchous de ce sport et un pilote très respecté par ses pairs. Mais s’il est dans cette rubrique, vous vous doutez bien que tout ne s’est pas passé comme prévu.

Son impressionnant palmarès

Pourtant, tout avait bien commencé pour le petit Catalan, puisqu’en 2003, à seulement 18 ans, il remporte le championnat du monde 125cc, gagnant 5 courses. Il est donc promu en 2004 en catégorie des 250cc, le niveau supérieur, dans laquelle il remportera le titre dès ses deux premières saisons, raflant rien de moins que 15 victoires et 9 autres podiums en 32 courses ! Son titre en 2005 fait d’ailleurs de lui encore à ce jour le plus jeune vainqueur de l’histoire de la catégorie intermédiaire du championnat du monde (que ce soit en 250cc ou en Moto 2, nom actuel de la catégorie), plus précoce que des Marquez, Biaggi ou Rossi par exemple.

Il est donc promu en 2006 dans la catégorie reine, la moto GP (800 à 1000cc), où il gagne son premier grand prix après seulement 4 courses, faisant taire les sceptiques qui le trouvent trop petit et léger pour maîtriser une moto si lourde et puissante. Il terminera 5ème du championnat du monde cette année-là, pour sa première saison en GP, soit son pire classement général jusqu’en 2016. En effet, entre 2007 et 2015, il cumule trois 2èmes places, trois 3èmes places et trois 4èmes places au championnat du monde. De plus, 2018 mise à part, il a remporté au moins une course lors de chacune de ses 12 premières saisons en catégorie reine, un véritable exploit. A l’heure où j’écris ces lignes, le prodige catalan n’a en revanche pas remporté la moindre course de la saison, comptant même trois 5èmes places comme meilleurs résultats. Il pointe par ailleurs en 12ème place au général, soit le pire classement de sa carrière en championnat du monde, toutes catégories confondues.

Pour résumer tout de même, Pedrosa pèse, en carrière, 54 victoires (dont 31 en catégorie reine) et 99 autres podiums (81 en moto GP) en un peu moins de 300 courses. Donc un ratio loin d’être dégueu d’un podium toutes les deux courses environ ! Je connais un pilote bernois qui doit être sacrément jaloux.

Mais alors pourquoi est-il dans cette rubrique ?

Parce qu’en moto GP, Pedrosa c’est, comme dit précédemment, six podiums au général mais zéro victoire. Soit autant de titre de champion que Tottenham Hotspur sur les 50 dernières années. Pedrosa est très bon certes, mais il lui a toujours manqué un petit quelque chose pour remporter le titre. Et ce petit quelque chose qui l’a toujours empêché de concrétiser sa domination est souvent la poisse, une fois encore. En effet, le Catalan n’a pas été épargné par les chutes et les blessures dans sa carrière.

L’Espagnol a cumulé pas moins d’une vingtaine de blessures sérieuses en carrière, qui l’ont bien souvent privé du titre lors de ses grandes années. Yoann Gourcuff, alias le joueur de verre, peut aller se rhabiller. Pedrosa s’est cassé à peu près tout ce qu’il est possible de se briser dans le corps humain, souvent plusieurs fois. Et quand ce n’est pas lui qui chutait tout seul, il s’est également fait plus d’une fois entraîner au tapis par l’un ou l’autre de ses adversaires. Quand on vous parle de poisse…

Une image bien trop habituelle…

Et encore, en 2012, l’une de ses deux seules saisons sans blessure en carrière, alors que tous les éléments sont réunis, il tombe sur un Lorenzo incroyable qui, hors abandon, n’aura signé que des victoires ou des 2èmes places au championnat. Pedrosa termine la saison avec 7 victoires, 8 autres podiums et 332 points au mondial, le plus grand total de l’histoire sans gagner le titre. Quand ça ne veut pas…

Son plus bel exploit

Pedrosa est certes un malchanceux, mais comme nous l’avons vu, son palmarès reste plus qu’honorable. Parmi ses faits d’armes, son plus impressionnant est probablement son premier titre en 250cc. En effet, en 2003, juste après s’être assuré de son second titre en 125cc, le catalan chute – oui, déjà – lors des essais du GP d’Australie, se fracturant les deux chevilles. Par conséquent, il ne peut pratiquement pas se familiariser avec sa nouvelle moto, de la catégorie supérieure, lors de l’hiver 2004. Qu’à cela ne tienne, tout juste remis de blessure, Pedrosa remporte la première course de la saison et survolera le championnat pour remporter un premier titre en 250cc. Il compilera cette année-là 7 victoires et 6 autres podiums en 16 courses, raflant également le prix du rookie de l’année et, comme dit plus haut, le titre honorifique de plus jeune vainqueur de l’histoire de cette catégorie à tout juste 19 ans. Pas mal pour un pilote qui avait pour bolide une chaise roulante quelques mois plus tôt !

Son plus bel exploit Born to lose

En 2006, pour sa première année dans la catégorie reine, le petit catalan a pour chef de file le regretté Nicky Hayden, l’un des grands favoris du championnat. Alors que Pedrosa fait très bonne figure pour une première saison, l’Américain mène le championnat à deux courses de la fin, juste devant Valentino Rossi. C’est alors qu’a lieu le grand prix du Portugal, lors duquel un événement peu banal se produit. En effet, lors d’une tentative de dépassement, Pedrosa chute et emporte avec lui Hayden, son propre coéquipier et leader ! Les deux pilotes doivent abandonner et Rossi se classera second de la course, reprenant la tête du championnat pour huit points.

Heureusement pour Honda (l’écurie de Pedrosa et Hayden) l’Américain remportera tout de même son unique titre de champion du monde lors du dernier grand prix, à la faveur d’une 3ème place et d’une chute de Rossi. Ce sera d’ailleurs le seul titre moto GP du Kid du Kentucky et la première défaite de l’Italien après 5 victoires de suite au général dans la catégorie reine.

Et maintenant ?

Dani Pedrosa a annoncé il y a quelques semaines que 2018 serait sa dernière saison. Après tant de blessures, il est facile de comprendre son choix. Au cours de sa carrière, il aura inspiré de nombreux pilotes par son caractère et sa manière de piloter. Après l’annonce de sa retraite imminente, il a reçu de nombreux hommages, à commencer par celui d’un de ses rivaux de toujours, Valentino Rossi. L’Italien a même déclaré « Dani Pedrosa est le meilleur pilote à n’avoir jamais remporté le championnat du monde MotoGP, et il méritait de gagner au moins un titre. »

S’il boit avec ce verre, pas étonnant que Pedrosa ne tienne pas sur ses roues

Concernant son futur, Pedrosa n’a encore rien annoncé de concret. Il semblerait qu’il pourrait être le pilote essayeur 2019 du team KTM en moto GP, mais cela reste à confirmer. En tous les cas, le résident de Prangins ne devrait pas trop s’éloigner de ses instincts sportifs puisque cet été, il a été l’invité surprise du Grand Raid, course de VTT se déroulant entre Hérémence et Grimentz. Ce qui est sûr, c’est que la simplicité et la modestie du petit Espagnol vont manquer au monde du sport, souvent tiraillé par les guerres d’egos.

A propos Joey Horacsek 84 Articles
Bon ça va, je vais pas vous sortir ma biographie

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2 Commentaires

  1. « …Et si on reste sur deux roues, cette fois-ci l’honneur est pour un sport assumant son moteur, la moto… »
    Excellente, l’allusion !

  2. Il y a aussi Valentino Rossi qui a débuté la compétition en pocket bike. Le facteur économique a favorisé la pratique de la mini moto qui est aussi une bonne école avant de débuter sur des 125cc. Bon continuation pour la suite à Dani Pedrosa en tant que metteur au point.

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