Pigeon de septembre 2: Sacha Weibel

Au LHC, le cahier des charges de chacun est soigneusement défini afin que tout le monde sache à quoi s’en tenir et que le club puisse communiquer d’une même voix dans un discours aussi limpide que la rosée du matin. Les plans machiavéliques de la direction sportive germent sous le crâne du Lex Luthor du Pays de Vaud et véritable kryptonite des coiffeurs lausannois John Fust. A moins que ce ne soit le marionnettiste tchèque Petr Svoboda qui ne tire les ficelles en coulisses. Encore que, encore que – merci Yannik – John Gobbi est peut-être l’éminence grise qui se cache derrière tout ça après tout. Bref, on vous le répète, tout est clair comme de l’eau de roche. En ce qui concerne la direction générale, le tout est géré d’une main de fer dans un gant de maraîcher par le survitaminé Sacha Weibel, qui n’est jamais le dernier à ramener sa fraise avec autant d’à-propos qu’une intervention potentielle de Jean-Michel Blanquer sur un podium de la Fashion Week 2020. Il est donc temps pour nous de cueillir l’ancien numéro 85 lausannois comme un fruit mûr. 

Pour vous prouver que c’est une question très sérieuse, retour sur l’historique rhétorique récent du CEO des Lions. Le 2 septembre dernier, les deux clubs phares de notre magnifique canton (y en a point comme nous, surtout quand il s’agit de collectionner les nouveaux cas de COVID) sont invités à donner leurs impressions sur les mesures prises pour la saison 2020/21 dans les colonnes du 24 heures. On imagine bien que la situation actuelle n’est idéale pour personne, et sûrement pas pour le LHC et son écrin tout neuf qui ne pourra être rempli qu’aux deux tiers au maximum. Certes. De là à envoyer Monsieur Tact représenter votre club dans les médias après lui avoir donné tout l’été pour se documenter sur le dossier à grand renfort de vidéos d’Ema Krusi et d’articles de Jean-Dominique Michel, il y avait un pas que l’organisation vaudoise a franchi en patins de sept lieues.

Morceaux choisis: « Les mesures de sécurité qu’on doit mettre en place sont tellement extrêmes qu’on ne peut pas décemment obliger des gens à mettre un masque pendant quatre heures. » Outre la syntaxe aussi boiteuse qu’Agecanonix de cette phrase, on encourage fortement l’ancien fer de lance du SC Herisau à faire un stage au CHUV, ou même tout simplement à la Coop ou à la Migros, et à faire le décompte du nombre impressionnant de membres du personnel infirmier et commercial qui tombent comme des mouches, frappés d’apoplexie, à la fin d’une journée de 8 heures sous un masque. Notre docte PDG n’en reste naturellement pas là: « Sur la base de quoi ? D’un test, des chiffres, personne ne peut m’expliquer les raisons pour lesquelles on doit enfiler ces masques et prendre toutes ces mesures. » En voilà une bonne question (et très sérieuse celle-là aussi) ! Un changement de sources semble s’imposer pour ce brave Sacha, qui pourrait par exemple trouver quelques éléments de réponse ici.

On a évidemment gardé la cerise sur le gâteau (si on ose dire) pour la fin: « Que vous soyez dix dans une forêt ou 10 000 pour chercher des fraises, c’est la même chose, non ? On détruit des entreprises, des clubs, pourquoi ? Cela m’énerve au plus haut point. Arrêtons d’être des moutons. » Là, on vous avoue que même en compulsant fiévreusement notre Petit Guide Illustré du Complotisme (disponible aux éditions Raoult ou sur NousSachons.com), on ne sait pas par où commencer. Peut-être par faire attention à ne pas confondre les fraises récoltées avec certains types de champignons aussi indigestes que le discours réactionnaire de l’un des (trop) nombreux hommes forts du Lausanne Hockey Club.

Le plus rigolo dans cette histoire… enfin non, le plus rigolo c’est quand même les 10 000 personnes qui cherchent des fraises avec un masque (et probablement un filet à papillons et une camisole de force) dans la forêt, on est bien d’accord. Bref, même si le sommet du blues avait déjà été atteint, on a quand même bien ri en entendant la réaction un brin plus réfléchie du président Patrick de Preux la semaine dernière sur les ondes de la RTS. On ne saura jamais si Sacha Weibel avait vraiment fait cavalier seul sur cette affaire, mais force est de constater que ses collègues ont sorti la sulfateuse pour le remettre à sa place: « J’ai présenté mes excuses au médecin cantonal lors de la séance qui réunissait le Conseil d’Etat, le Lausanne-Sport et le LHC. Parce que bon, les propos qui ont été rapportés, je ne sais pas dans quelle mesure ils ont été tenus de cette manière-là, mais quoi qu’il en soit je les condamne. » On notera tout de même en passant l’obligatoire référence aux Grands Méchants Médias qui ont probablement inventé cette histoire à dormir debout.

Au vu de la liste de citations rocambolesques qui précède, le dossier nous semble assez solide pour que les efforts répétés de notre vengeur non masqué afin de figurer au palmarès des pigeons d’or portent enfin leurs fruits. Et on avoue que si le plus célèbre amateur de randonnées sylvestres de l’Ouest lausannois ne remportait pas le volatile suprême à la fin du mois, on en resterait bouche… baie.