Joel Untersee ou le défenseur multicolore

Le nom de Joel Untersee ne te dit rien ? Ça tombe plutôt bien parce que c’est pour ça que tu lis cet article. Portrait : Joel Untersee est un Suisse plus Sud-africain que Federer mais moins que Mandela, qui a joué en Super League mais pas dans un club suisse, qui a suivi ses écoles de foot chez les vices champions d’Europe la Juventus, qui a déjà connu 5 clubs à 23 ans (ici, personne ne fait mieux sauf Seferovic), mais qui joue in fine en Serie B. Au fait, le bonhomme est également Zürichois puisqu’il a commencé avec Mehmedi, Drmic et Rodriguez quand leurs mamans les amenaient encore à l’entraînement. Avec une moustache, il ressemble soit à un Behrami en mieux, soit à un Cristiano Ronaldo raté, à toi de voir. Bref, Untersee il est sous un lac parce que tu ne le connais pas, mais suffisamment chouette, atypique et surtout Helvète pour en faire tout un plat.

URS LE PECHEUR

Pour ce faire, il est essentiel de ressortir le dossier Urs Fischer. Bien que Raph Wicky s’en moque parce qu’il lui a chipé la place à Bâle, et que même s’il perd contre Lausanne, il aura toujours Manchester Utd à se mettre sous la dent et le « néo-attaquant » Lang qui lui plantera un doublé après l’autre. Bref, Urs est quand même un pêcheur né. Tout commence en 2009-10 lorsqu’il dirige les voiles du FC Zürich U21. Sous ses ordres, tiens-toi bien, figurent des garçons tels que Rodriguez, Mehmedi et Drmic. Inutile de rappeler que ces trois footeux ont un jour été des espoirs suisses d’exceptions. Notons simplement aujourd’hui leurs reconversions en personnages bien plus polyvalents qu’imaginé. Quand même, Drmic est presque devenu rappeur, Mehmedi ébéniste cirant les bancs publics allemands et surtout Rodriguez un néo-super-héros national. Jadis en Promotion League, grâce à ses probants pions de folie, l’équipe du FCZ termine 3e et Fischer y honore sa profession pêchant un poisson chabot au nom d’Untersee, rampant parmi les autres blanchailles novices zürichoises. A 15 ans, une aventure riche et si différente débute pour cet arrière droit qui parle actuellement mieux l’italien que Lichtsteiner.

J. U. COMME JUVENTUS MAIS SANS LE V DE VEDETTE

Joel Untersee est né à Roodepoort dans la banlieue de Johannesburg en Afrique du Sud et a grandi avec ses géniteurs suisses. Il a appris l’anglais, jusqu’au jour où il se rend soudainement compte qu’il ne jouera pas la Champions League s’il reste dans ce pays. Il quitte alors la nation arc-en-ciel pour rallier les couleurs de Fischer dans l’épisode ci-haut évoqué. A peine arrivé et déjà l’opportuniste Africano-suisse allemand plie bagages. En 2010, c’est l’Italie qui le botte puisqu’il est repéré par la Juventus. Alors entraîneur de l’équipe première, le meilleur ami de Diego Costa, Antonio Conte,  convoque Untersee pour le camp d’été de la Vieille Dame. Durant deux ans, Untersee développe son athlétisme dans le championnat des jeunes d’Italie jusqu’à s’entraîner avec les M19. L’idée d’intégrer l’équipe A reste bien entendu l’objectif premier d’Untersee. En vain, puisque le natif Sud-africain, qui parle anglais, aux parents suisses, écolier en Italie, se retrouve prêté au … Liechtenstein ! Un pays que personne ne connaît sauf les Suisses justement. Qui sait, peut-être certains transalpins le confondent avec Lichtsteiner. La partie devient clinquante pour le jeune homme qui entre désormais dans la cour des grands … polyglottes ? Le pauvre enfant. Il ne devait vraiment plus savoir quelle couleur défendre.

JOUER SON VA-TOUT A VADUZ

Nul doute que Joel s’est senti déçu quand il a appris qu’on le prêtait finalement pour Vaduz, qui plus est en Challenge League. Après avoir porté les maillots de l’académie de Zürich et de la Juventus Primavera, se retrouver dans un club inconnu dans un championnat de seconde zone en a sûrement fait rire plus d’un. A commencer par les Mehmedi & Cie du FCZ dont j’ai fait mention. Que veux-tu qu’il réponde quand sa famille d’Afrique du Sud lui demande de ses nouvelles ? « Alors, comment ça se passe mon petit Pirlo ? ». Encore une couleur de plus à porter pour le défenseur natif de Johannesburg. Bien entendu que « Vaduz » sonne nettement moins bien. Quoique le mot commence par la lettre « v », comme « vedette ». Un peu à l’image de ce qu’aurait pu devenir Untersee après tant de matchs joués pour l’académie turinoise. Heureusement, durant son énième aventure étrangère, Joel a pu trouver stabilité dans l’effectif liechtensteinois. Quelques mois après son arrivée, l’équipe remporte le championnat, puis est promue dans l’élite du football suisse. Le poids du latéral pluri-naturalisé n’aura pas été des moindres.

EMPOLI LE CLUB DES JEUNES

Si bien que ses excellentes performances ne laissent de loin pas indifférents les dirigeants bianconeri qui décident de le garder jusqu’en 2019. Un prêt dans l’atmosphère du calcio s’impose cependant en raison de l’évidente rude concurrence dans l’équipe première de la Juventus. Néanmoins, le double finaliste 2015 et 2017 de la Coupe aux grandes oreilles invite Untersee à rejoindre derechef son traditionnel camp estival pas plus tard que l’été passé. Signe que l’équipe d’Allegri ne l’a pas oublié. Quoique beaucoup se posent encore des questions quant à la qualité des choix effectués par le Mister Massimo. Celui-ci ne semble vraiment pas adhérer à l’idée d’aligner un latéral suisse en tant que titulaire régulier. Incompréhensible et surtout énigmatique a été sa décision de préférer « la plaisanterie De Sciglio » à l’excellent Lichtsteiner pour l’actuelle Champions League.

Après un bref détour l’année passée au Brescia où il a su marquer les esprits de son estampille, Untersee franchit un cap en rejoignant l’Empoli l’été dernier après le camp juventino. Remarquablement, il ajoute à l’équipe cette fine touche qui bonifie son jeu : que ce soit sa qualité de frappe sur les coups francs indirects, sa vision du jeu qui n’a rien à envier à un bon ailier moderne ou encore sa vitesse sur les débordements. Untersee s’est intégré de plus belle au sein d’un club adepte de la tactique à 3 défenseurs, à la mode depuis quelques saisons. A Empoli on aime la jeunesse et la montée en première division nationale est plus qu’envisageable pour Untersee et ses campagnards toscans. Quoiqu’il en soit, à ce rythme, l’horizon devrait continuer à s’éclaircir s’il ne s’arrête pas à cette belle moyenne d’une passe décisive tous les trois matchs et si la formation des florentins bleus ne cale pas en cours de route.

A ce jour, et en marge de toutes ces aventures étrangères vécues et couleurs défendues, Joel Untersee n’a pas renoncé à une éventuelle possibilité de porter un jour le maillot de la Nati. Passé par toutes les catégories de jeunes, il a eu la chance de côtoyer des patriarches tels qu’Yves Débonnaire ou Claude Ryf, aujourd’hui de grands accoutumés de la pédagogie dictée par les pieds. Prend garde Petko’, le sélectionneur des Bafana Bafana Stuart Baxter n’arrêtera pas d’amadouer le jeune Untersee pour qu’il vête encore une fois de nouvelles couleurs : celles de l’équipe nationale d’Afrique du Sud. Heureusement, Untersee déclare rester attaché à notre pays. Une situation qui aurait pu être autre si les Sud-africains avaient pris part au Mondial 2018. A suivre.

 

A propos Thomas Christen 27 Articles
C'est dans la chronique FOOTURO, chers lectrices et lecteurs, que vous en apprendrez plus sur les perfs' actuelles des athlètes suisses qui ont joué les mercenaires du monde. A vous de voir : footuro ou footu pour la Nati ?

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