Top 8 : le jeûne du tennis (1/2)

Les amateurs de tennis le savent. L’année civile 2020 est peut-être celle d’un tournant. Alors que l’homme aux 20 Majeurs vient de passer sur le billard pour traiter son genou, les Djokovic et Nadal sont à l’affût pour lui rafler son record. Le Bâlois à présent écarté pour quelques mois, il reste deux possibilités pour entretenir l’espoir de notre pays. Soit le Serbe et l’Espagnol capitulent avec une blessure ou une autre déconvenue à l’instar de 2017, soit les jeunes de la génération prometteuse prennent le dessus. Souvent proches de l’exploit, Thiem, Medvedev et Tsitsipas n’ont pas encore passé le cap. Au grand dam des supporteurs suisses qui se consolent avec le ski en hiver et le millepertuis en été. Pour vous distraire, Carton-Rouge vous parle de jeunes en marge des deux catégories évoquées, mais sur lesquels il faudra jeter un œil les mois qui viennent.

La visée de cette présentation est de s’ouvrir sur d’autres horizons prometteurs moins exposés au large public. Mais soyons honnêtes, elle est aussi un prétexte pour faire un « flexi-jeûne » tennistique tout en se voilant la face. Roger oblige. Au final, notre méthode est largement soutenue puisque c’est le tennis lui-même qui s’est arrêté. Personne ne s’y attendait. Si les joueurs progressaient aussi vite que le Coronavirus, Yann Marti serait l’actuel 100e mondial. Dire que le type qui s’est mangé un pangolin ou une chauve-souris a mis toute la planète en PLS.

Andrey Rublev : la doublette rousse

La liste commence avec un premier jeune du tennis particulièrement en forme depuis l’automne dernier. Rappelez-vous, le Moscovite a goûté à une carrière à succès très rapidement avec un ¼ de finale à l’US Open à ses 20 ans puis avec une finale au Masters de la Next Gen la même année. Aujourd’hui, il en a 22 et semble sur une excellente lancée. Son coup d’arrêt en 2018 lié à des problèmes de dos est oublié. Depuis octobre, il retrouve des sensations malgré son manque de patience qu’il dit lui-même travailler. Ses frappes de balle s’alourdissent et ses cheveux se roussissent en parallèle à sa détermination sur le court. Vainqueur à Moscou il y a 5 mois, il enchaîne sur un formidable doublé à Doha puis à Adélaïde début 2020. Prêt mentalement à affronter l’Open d’Australie, Rublev ne s’attendait absolument pas à performer de la sorte. Si bien que malgré son bon résultat en Australie, il sait que les heures passées sur les terrains lui ont joué des tours. C’est Zverev qui lui a brûlé la politesse en 1/8^ede finale. Un match qui aura mis fin à une série formidable de quinze victoires de rang pour le Russe. Au passage, en ce début d’année, il compte notamment des succès face à des talents comme Bublik, Auger-Aliassime et Moutet. Son ascension remarquable dans le top 15 mondial est ainsi justifiée.

Notre prono : Sauf pépin, Rublev participera à son second Roland-Garros où il n’aura aucun point à perdre. Une montée dans le top 10 n’est pas à exclure d’autant qu’il sera très attendu sur dur que ce soit aux Masters 1000 ou à l’US Open.

L’avis du pangolin : Pointer au 14e rang est un peu court pour se qualifier pour le prochain tournoi, les ATP Finals en novembre prochain.

Le Russe à Vienne en 2017.

Denis Shapovalov : l’enfant de la mondialisation

Il est sans conteste une des étoiles montantes les plus talentueuses du circuit. À l’image de Rublev, Shapovalov a atteint son meilleur classement en ce début d’année (top 15). À 20 ans, le jeu du jeune gaucher est presque aussi riche que le sont ses origines. Accrochez-vous, de parents russes, il nait à Tel-Aviv et grandit à Toronto. Il réside officiellement aujourd’hui à Nassau aux Bahamas. Ainsi imprégné de cultures différentes, Shapo a pour idole le GOAT Roger Federer, ce qui ne constitue pas une particularité singulière. A contrario,  bon nombre de joueurs ne tarissent pas d’éloges sur le Canadien, ce qui n’est pas anodin. En effet, ces dernières semaines Dimitrov, Bublik ou encore Djokovic l’ont loué chacun à leur tour. Rien que ça. Et pour cause, Shapo est un joueur dont on a l’impression qu’il pourrait exploser à tout moment et bousculer la hiérarchie. Cependant, s’il a brillé lors de l’ATP Cup avec des victoires sur Tsitsipas et Zverev, il ne réussit pas encore à confirmer malgré des étincelles émises çà et là. En Grand Chelem par exemple, ses résultats ne tiennent pas encore leurs promesses. Partie remise ?

« La façon dont il joue me rappelle moi-même » John McEnroe, légende du tennis également gaucher au revers à une main.

Notre prono : Depuis août dernier, Shapo est coaché notamment par l’ex-pro Youzhny qui devrait lui apporter son expérience. Le jeune Canadien a un penchant pour le gazon, sa surface de prédilection, y connaîtra-t-il le déclic ?

L’avis du pangolin : Il est vrai que mathématiquement, Shapovalov a actuellement autant de chances de triompher que Federer ou Nadal, c’est fort.

Félix Auger-Aliassime : le mobile du dream

Décidément, les Canadiens ne manquent pas de qualités. Aux côtés de Shapovalov, Auger-Aliassime est récent finaliste de la néo Coupe Davis 2019. Et il est même devenu un habitué malheureux des finales. A ce jour, il n’a encore remporté aucun titre sur le circuit, pour 5 finales perdues. Cependant, il n’a que 19 ans. Entre 2010 et 2017, aucune finale de l’ATP n’avait opposé deux joueurs de moins de 22 ans. Depuis 2018, la finale à Marseille à peine disputée entre Auger-Aliassime et Tsitsipas est seulement la 4^eaprès De Minaur-Medvedev, Zverev-De Minaur et De Minaur-Fritz.

Originaire du Togo, Félix rêvait d’être un artiste. Et c’est les courts qui le remercient tant le joueur déborde de créativité. Sans oublier son aisance dans le jeu qui devrait prochainement faire de lui un des athlètes les plus mobiles de l’ATP. Il met en valeur cette caractéristique en montant très souvent au filet. Et ça lui réussit avec brio. De plus, sa spécialité est le revers gagnant le long de la ligne. Un coup que les amateurs de tennis ne se lassent jamais de voir. Et ils ont été gâtés ces dernières semaines. Auger-Aliassime a en effet épaté la galerie en atteignant deux fois la finale d’un ATP 500. Quelle frappe, le petit !

Notre prono : On le sait, sauf exception de quelques légendes, les joueurs de tennis arrivent à maturité plutôt sur le tard. Mais ce Félix peut rêver grand. Personne ne sait s’il se révélera parmi les meilleurs déjà cette année. Il n’en restera non moins épatant à regarder. On lui souhaite de performer notamment à la Rogers Cup, son tournoi favori.

L’avis du pangolin : Au point où on en est, Félix a le temps de se faire une carrière de peintre acrylique sur chauve-souris.

A gauche, Auger-Aliassime et à droite en haut, Shapovalov : le poing de la victoire !

Alex De Minaur : l’Australien open à tout

En début d’année, De Minaur a été brillant en Australie lors de l’ATP Cup. Sa préparation était alors optimale pour attaquer « son » Grand Chelem domestique : l’Australian Open. Mais coup de tonnerre, De Minaur se blesse aux abdos. Contraint de déclarer forfait, le jeune homme est anéanti. Dommage, son ascension a vraiment été fulgurante. Deux fois finaliste du Masters de la Next Gen, il atteint 5 finales ATP en 2019. En fin d’année dernière, il avait également fêté ses premiers 1/8^ede finale au Masters 1000 de Paris ainsi qu’à l’US Open. Il est extrêmement rapide et déterminé à s’arracher sur chaque point. C’est pour cette raison que le garçon aux origines uruguayennes et espagnoles est surnommé « Demon » par ses équipiers. Par ailleurs, il manque encore de puissance, son gabarit oblige (183 cm pour 69 kg). Néanmoins, l’Homme au Grand Chelem, l’ex-star Rod Laver est convaincu par le garçon de Sydney :

« Dans deux ans, il devrait réussir à gagner un majeur ».

Il ne reste plus qu’à.

Notre prono : De Minaur possède le mental pour titiller les patrons du tennis. Il l’a prouvé cette année encore contre Nadal et Zverev. Dorénavant, il est prêt à tout. Si son corps le lui permet, il devrait prochainement atteindre le statut des Tsitsipas et cie.

L’avis du pangolin : L’avantage est que tant que le tennis sera suspendu, Rod Laver restera convaincu par De Minaur.