Saint-Graal – Lausanne

Mercredi à 14h00 en quittant la Romandie pour Locarno nous partîmes 5, mais par un prompt renfort, nous nous vîmes 600 en arrivant à Saint-Gall, 5 jours après. Comme quoi on se sent parfois plus seul qu’on ne l’est vraiment. Mais quand même, sans respecter les sas de décompression, ça peut tuer ce truc.

Il faut quand même avoir un Master de schizophrénie pour comprendre comment fonctionne cette équipe. Les supporters qui ont vu le LS de Dragani contre Le Mont et à Thoune, ceux qui ont suivi celui de Soos contre Wohlen, avaient de quoi se demander ce que ce LS renforcé à la pause avait vraiment dans le ventre. Même avec la victoire à Locarno, même avec un Tosi en passe d’être retrouvé et avec un Gaspar qui semblait pouvoir au moins entrer en cours de jeu, le miracle de Berne semblait à des années lumières. Et comme ce dernier était en bonne partie celui d’Antoine Gattuso Rey, qui savait comme personne insuffler un état d’esprit à cette équipe, il y avait loin de la Coupe aux lèvres.De leur côté, les enragés du BWFK ont comme souvent retroussé les manches comme si de rien n’était. Collaboration avec le club pour organiser le déplacement en car, création d’une bâche de 15 mètres, distribution de confettis et de 350 grands cœurs en papier (pour un rendu – à part la bâche, magnifique – décevant) et lancement d’un T-Shirt «I LOVE LS» moitié clin d’œil, moitié décalé et moitié funky. Ce dernier a d’ailleurs fait un tabac qui aura surpris tout le monde, avec les 200 pièces vendues en quelques heures, et des commandes par mail qui continuent à arriver aujourd’hui, alors que le stock est épuisé. Nous qui pensions en avoir pour trois ans à les écouler aux puces, et qui craignions de ne pas oser les refiler comme prix de consolation à la tombola du souper de soutien, nous retrouvons ahuris devant le buzz naissant. A suivre.

Alors évidemment, entre la rentrée de Locarno à 3h30 du matin (petit compte-rendu disponible sur http://www.bwfk.com/pages/article_long.php?id_article=898 pour les plus fanatiques), le travail bien dense en cette veille de long week-end et les heures à bosser sur la banderole, certains avaient une teinte légèrement cadavérique au départ des cars, à 7h30 du matin. Sans même parler de ceux qui suivent parallèlement le hockey home et away, ni des trois extraterrestres qui avaient en plus vite fait un petit crochet par le Vélodrome la veille. Et la pression de cette demi n’avait pas contribué à laisser les organismes se reposer.
Puisqu’on parle de pression et de demis, ça tombe bien : les soutes du car dans lequel avait pris place le gros du BWFK (je parle de moi, donc) étaient lestées d’hectolitres prometteurs. S’il fallait retenir une seule preuve que malgré tout nous y croyions dur comme fer, elle serait là. Nous avions de quoi fêter l’éventuelle victoire au moins quatre jours en autarcie complète.
L’ambiance mettra tout de même un peu de temps à décoller. Certes, les trois points de Locarno mettent quasiment le LS à l’abri de toute mauvaise surprise en championnat, et on peut donc jouer libéré (encore que remporter la Coupe d’Europe en évoluant en première ligue aurait eu son petit côté bonnard). Mais tout de même, cela suffira-t-il pour battre les Brodeurs ? Le parcours des Vaudois semblait indiquer que oui : uniquement des matches à l’extérieur (à tel point que même lorsque le tirage nous désigne comme hôte, on inverse le match) et des victoires chez le leader de LNB comme chez celui de LNA… Que pouvait-il bien nous arriver ?
De l’autre côté, les Saint-Gallois évoluent devant un vrai public, l’Auch Für Gossau Stadion est un vrai stade de foot, et tout ce petit monde est averti : LS peut, sur un match, battre la meilleure équipe de Suisse. Un homme averti en valant deux, et le public faisant le douzième homme, c’est donc contre 23 adversaires qu’il faudra lutter.

A une heure du coup d’envoi, les supporters vaudois entrent dans le stade. Il est temps d’installer la bâche dans un joyeux bordel (et en ayant oublié le scotch, ma foi, c’est le jeu ma pauvre Lucette), d’organiser la distribution du matériel pour l’animation, de s’abreuver la moindre au passage – pas que le risque de desquamation guette vraiment, mais dans le doute… – et surtout d’essayer de se regrouper. Le temps aussi de se compter : environ 400 dans le bloc, une affluence tout à fait correcte au vu des circonstances. Et du bon matos pour assurer un brin d’ambiance, sachant qu’il faudra pour cela profiter des baisses de forme des gars d’en face, qui n’ont probablement pas prévu de nous laisser souvent la parole.
Voilà, l’arbitre a donné le coup d’envoi. Difficile de parler de ce match du point de vue tactique ou technique. D’habitude je raconte peu ou prou n’importe quoi, mais cette fois il y a des témoins. Ma spécialité c’est la science-fiction, pas le roman historique. Et puis franchement, ce genre de partie se vit uniquement dans l’émotionnel. Tout à fait sérieusement, ce n’est qu’à la mi-temps que j’ai compris que l’on jouait avec deux milieux défensifs, alors je vais pas faire semblant. Je retiens surtout de cette mi-temps la pêche de notre capo déchaîné, l’ambiance malgré tout en dents de scie, le goal encaissé, le sang qui se glace lorsque Favre manque de peu de prendre la rouge, le miracle du même Favre (main, poteau, pied…)… et l’égalisation. Marrant ce trou noir lors de ce goal. Ma seule certitude est d’avoir pensé à ce moment-là que le plus dur était fait. On avait blessé le monstre. Et si ça saigne, ça se tue, comme dirait Schwarzie.
En deuxième mi-temps, le soutien décolle vraiment du côté lausannois, avec de vraies bonnes poussées. Pour retrouver une aussi bonne ambiance, il faut probablement remonter au milieu de l’année 2005 et à la double excellente prestation lors de la promotion à Carouge et pour notre retour à Tourbillon. Le LS se crée les occasions nécessaires, tremble aussi parfois, puis Katz se fait expulser. Mais à aucun moment St-Gall n’arrive vraiment à emballer le match. On commence à penser aux prolongations, on se dit qu’on ira la chercher avec les dents aux pénos, cette putain de qualification. Et c’est là que deux défenseurs s’unissent à Vailatti pour nous offrir la finale. Parce qu’au moment où la balle franchit la ligne, le match est joué : c’est fait. Ce serait trop injuste qu’il en soit autrement. L’aventure ne peut pas s’arrêter, on a assez morflé cette saison, si Saint-Gall marque, j’arrête de respirer jusqu’au 9 mai. Et effectivement, après les trois dernières heures de jeu (et le temps supplémentaire d’une année et demie), Busacca confirme ce que nous savions déjà : cette Coupe elle est à nous.

Je suppose que tu devines la suite : on se tombe dans les bras, on pleure, on chante, on finit de perdre sa voix et tout le toutim. C’est ce petit moment-là, ces quelques minutes après le coup de sifflet final, qui appartient tellement à ceux qui se tapent les gonfles depuis des années, de matches de merde en défaites improbables, de déplacements le mercredi à l’autre bout de la Suisse en parties à domicile devant 350 spectateurs, d’illusions perdues en espoirs déçus. Tous les supporters ont eu une immense bouffée de joie à cet instant. Mais j’ai les noms de ceux qui ont joui dans leur froc, et je leur dédie ce papier : les gars, je vous aime (les quelques nanas aussi, mais j’ai pas le droit de l’écrire trop fort).
Ça va être dur de replonger en LNB après avoir regoûté enfin aux émotions des grands matches. Il faudra passer par Bienne, Nyon, recevoir Gossau, battre Servette… Mais à l’horizon, il y aura cette finale, et une dixième Coupe au palmarès. Le petit bonus c’est qu’on ne pensait pas remporter une Coupe d’Europe la saison prochaine. Ma foi, on fera avec, ce serait con de gâcher.
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

St-Gall – Lausanne-Sport 1-2 (1-1)

AFG Arena, 17’197 spectateurs.
 
Arbitre : M. Busacca
 
Buts : 22e Zé Vitor 1-0. 40e Katz 1-1. 79e Gaspar 1-2. 
 
St-Gall : Vailati; Zellweger, Koubsky, Schenkel, Fernando ; Winter (82e Pa Modou), Imhof (82e Owona), Costanzo, Zé Vitor ; Frick (12e Merenda), Frei.
 
Lausanne-Sport : Gianluigi Favre ; Roberto Katz, Paolo Buntschu, Rio Meoli, Carles Sonnerat ; Lassana Ndzomo, Xabi Marazzi; Mathieu Hélin (65e Dani Borges), Zinedine Tosi, Pimentinho (69e Leo Carrupt) ; Wayne Gaspar (83e Cesc Vandenbossche).
Cartons jaunes : 28e Favre, 49e Katz, 79e Gaspar.
 
Carton rouge : 63e Katz. 

A propos Yves Martin 247 Articles
Cette Nati a deux vertus : celle de faire rêver quasi tout son peuple, et celle d'emmerder les connards de la fachosphère. Longue vie à elle.

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18 Commentaires

  1. Basel Basel Basel, sais tu pourquoi on va t’éliminer …
    A toutes ces émotions et à Totof à poil sur le parking
    ALLEZ LAUSANNE !!

  2. J’ai pas pu être de la partie sur place. Mais à la télé, les émotions étaient là aussi.

    Putain, qu’est-ce que ça fait du bien de retrouver du grand Lausanne-Sports ! Vivement le retour en LNA et des matchs de ce genre régulièrement 🙂

  3. Merci pour l’excellent papier!

    J’ai lu que Gaspar serait suspendu pour la finale, quelqu’un peut confirmer? Si c’est le cas je trouver dommage qu’un joueur se sachant sous la menace d’une suspension nous montre ses muscles, au demeurant très bien dessinés, même si la joie est compréhensible…j’aurais préféré qu’il fasse ça à Bâle…

    M’enfin allez Lausanne, j’espère être présent le 9 mai pour vous soutenir!
    Magnifique exploit!

  4. Quel match, quelles émotions, quel grand LS !!! Et quel joli tifo du BWFK… j’étais en tribune et j’ai apprécié !

    Maintenant il faut que le canton se mobilise pour qu’on soit nombreux à Bâle !!! On peut viser les 10’000 Vaudois en finale !

    A part ça, quelqu’un peut m’expliquer pourquoi cette finale se dispute à Bâle (bordel de m…) ? L’année passé c’était à Berne… Et en 2011 au Letzigrund ?!?! Choix incompréhensible de l’ASF, une fois de plus.

  5. Bravo aux joueurs et aux fans!!

    Magnifique, faites revenir cette coupe sur les bords du Léman!

    Je rejoints Carlos…pourquoi la finale se joue à Bâle sachant que le FC Basel est qualifié pour la finale? …la tradition c’est de jouer à Berne non de Zeus.
    Bon ben tant pis y aura pas de tournées de blancs au bar des Pyrénées sur la Kornhausplaze….

  6. « C’est ce petit moment-là, ces quelques minutes après le coup de sifflet final, qui appartient tellement à ceux qui se tapent les gonfles depuis des années, de matches de merde en défaites improbables, de déplacements le mercredi à l’autre bout de la Suisse en parties à domicile devant 350 spectateurs, d’illusions perdues en espoirs déçus. Tous les supporters ont eu une immense bouffée de joie à cet instant. Mais j’ai les noms de ceux qui ont joui dans leur froc, et je leur dédie ce papier : les gars, je vous aime (les quelques nanas aussi, mais j’ai pas le droit de l’écrire trop fort).  »

    Tres bien exprime, c’est pas un sentiment donne a beaucoup ca 😉

  7. Mouai moi je serais pour d’inverser, si YB est en finale, à Bâle, si Bâle est en finale à Berne et si c’est les 2 à Zürich. Pourquoi pas ?

    Enfin bref, LS a gagné à Lugano à Berne et à St-Gall, alors pourquoi pas taper Bâle à Bâle `?

    LAUSANNE EST MAGIQUE

  8. Héhé…excellent la composition d’équipe du LS à la mode CR ;-))

    A part ça bravo à cette belle équipe lausannoise ! Le supporter du FC Sion que je suis a vibré devant son poste !

    Les gars…soyez des Valaisans en finale !!

  9. Rendons à César… La composition de l’équipe du LS est un pur « rajout » CR, je n’ai rien à voir là-dedans. Merci à celui qui l’a faite.

  10. LHC en LNA…
    LS a Basel pour la Coupe
    SO et BWFK reunis pour la Gloire
    15’000 lausannois en bleu et blanc et rouge
    TOUS ENSEMBLE TOUS ENSEMBLE TOUS TOUS
    TOUS ENSEMBLE TOUS ENSEMBLE HEY HEY
    (pour une fois)

    LAUSANNE ALWAYS et FOR EVER

  11. @ Carlos, Captain Marvel et LS LNA…

    Ben vu que Lausanne a gagné toute ses parties de coupes sur le terrain de l’adversaire, je trouve que c’est plutôt un bon point de jouer Bâle chez lui… non?

    Sinon, Bravo Bravo Bravo Lausanne… 2010 pourrait être une sacrée année pour le sport de notre beau village de pêcheur… Une promotion en hockey et une coupe de Suisse en foot: Je signe!!!

    Allez Lausanne et tous à Bâle pour la finale!!!

    p.s.: c’est con, j’était sûr que c’était complet sinon je serais monté sur St-Schübliggallen.

  12. Je trouve également bizarre le fait de jouer la finale de la coupe à Bâle, sachant que la « finale » de LNA se jouera aussi à Bâle (Bâle-YB).

    Du temps du Wankdorf, personne n’aurait eu l’idée d’aller jouer une finale de coupe ailleurs.

    Vive nos amis de Muri!!!

    Et comme dit plus haut par un compatriote valaisan, mettez leur la pâtée en finale!!!

  13. Dan..

    Alors de 1, la « finale » du championnat comme tu appelles ça, aura lieu à Berne et pas à Bâle. D’autre part, ce match risque de ne pas être décisif du tout, puisque pour l’instant YB a une avance suffisante.

    Et de 2, la finale de la Coupe Suisse, c’est à mon sens illogique, mais il a été décidé d’alterner enter Berne et Bâle (Berne pour des raisons historiques et Bâle parce que le stade est plus grand). Le lieu de la finale 2010 est connu depuis longtemps. Rien à voir avec la présence de Bâle..

  14. LOL…
    merci Yves, tu as toujours la plume aussi leste… Est-ce que c’est toujours inversément proportionnel à ta démarche? 😉

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