Zoom sur… «Borisov l’a fait et c’est tout sauf une surprise !»

Ça y est, le football biélorusse tient son exploit ! Le FK BATE Borisov accède en effet pour la première fois de son existence au tour final de la Ligue des Champions en ayant disposé hier soir du Levski Sofia lors du troisième tour préliminaire de la C1. Et ça, ça rend la rédaction de CartonRouge.ch folle de joie ! Mais oui ! Juste avant de commencer, je demande juste à chaque lecteur qui est en train de se dire «comme si j’allais lire un article sur le foot biélorusse, y a vraiment des cinglés partout !» de faire l’effort. C’est pas trop long et le BATE Borisov en vaut vraiment la peine. Si vous avez vraiment lu ça pour rien, sentez-vous libre de m’insulter dans les commentaires, je suis de bonne humeur ces temps, ça devrait passer.
En fait, j’ai une affection toute particulière pour le BATE Borisov depuis la Coupe des Etats Indépendants en janvier 2003 à Moscou. Déjà, c’est quoi, la Coupe des Etats Indépendants ? C’est un peu l’équivalent de la Coupe des Rois aux Vernets mais en un peu plus classe quand même. Cette Coupe se dispute à Moscou en janvier (en salle, donc) et se dispute à onze contre onze sur un terrain synthétique couvert qui coûte des millions, mais les Russes s’en foutent, ils ont les moyens, merci pour eux. Tous les champions des anciennes républiques soviétiques sont invités, donc le champion d’Ukraine, celui d’Ouzbékistan, le letton, le kazakh, le russe bien sûr et donc, au milieu de tous ceux que je n’ai pas cités, celui qui nous intéresse aujourd’hui, le champion de Biélorussie, le fameux BATE Borisov. J’ai tout de suite eu le coup de foudre pour cette équipe, dès le premier instant où je l’ai vue arracher un piteux match nul contre le Pyunik Erevan (champion d’Arménie) sur cette pelouse synthétique devant quelques militaires biélorusses en faction à Moscou agitant tendrement leur drapeau rouge et vert à destination de ces footballeurs bien éloignés de leurs préoccupations.

En fait, le BATE Borisov, c’est l’exact contraire de ces clubs de nouveaux riches qui fleurissent de tous les côtés de l’ex-bloc soviétique à l’exemple de l’infâme PFC Kuruvchy de l’ignoble Karimov, despote même pas éclairé obligé d’affamer le peuple ouzbèque (son peuple…) pour se payer le cadavre de Rivaldo, ça me rend fou. Bon, le BATE Borisov, c’est pas ça et c’est une des raisons pour lesquelles ce club est respectable et ses dirigeants sains d’esprit. Le BATE Borisov, c’est un club au budget de… 3 millions de francs suisses. Budget de Neuchâtel Xamax pour la saison 2008 ? 15 millions. Budget du Zénit Saint-Pétersbourg pour la saison 2008 ? T’imagines même pas. Là, rien à voir.
Alors à quoi tient le succès du BATE Borisov ? A sa formation, exclusivement. Refondé en 1996 (je vous passe les détails, les changements de nom, l’implication dans la structure communiste de l’URSS de l’ancien club de Borisov mais si ça vous intéresse vraiment, vous pouvez toujours laisser un commentaire, je vous répondrai volontiers), le BATE est soutenu par la modeste industrie automobile, d’ailleurs BATE est l’anagramme de Borisovskii Zavod Avtotraktornogo Elektrooborudovania ce qui signifie (bien évidemment) Entreprise d’équipement électrique pour l’industrie du tracteur et de l’automobile. Si c’est pas la classe. Bref, le BATE Borisov est un club sans grands moyens financiers, avec un stade tout à fait modeste (5’500 places au stade Gradski) et c’est donc vraiment génial de les voir passer les trois tours de qualification de la Ligue des Champions (à ma connaissance, c’est les premiers à avoir réussi un tel exploit, mais quelqu’un de plus érudit me contredira peut-être).


Le kop du BATE Borisov !

Après avoir fumé le Valur Reykjavik au premier tour, les hommes du tout jeune coach Viktor Goncharenko ont en effet éliminé Anderlecht au deuxième tour avant de s’offrir le Levski Sofia au troisième. Bien joué et… guère surprenant pour les rares occidentaux à suivre avec attention le parcours du BATE Borisov depuis quelques années. Déjà l’an dernier, il avait quasiment rien manqué face au Steaua Bucarest (2-2 à la maison en ayant dominé tout le match et 4-2 à Bucarest au retour) et cette année, ça a fait bam ! Je le disais un peu plus haut, Borisov a façonné son succès non pas grâce à une manne financière quelconque mais quasiment exclusivement grâce à la qualité de sa formation. Le meilleur joueur à être sorti du centre de formation ? Aliaksandr Hleb, milieu de terrain du FC Barcelone, quand même ! Autre bon exemple, l’attaquant Vitaly Kutuzov, repéré à l’époque par Milan. Bon, c’est pas devenu le nouveau Chevtchenko mais un attaquant tout à fait honnête du Sporting Lisbonne, de la Sampdoria et de Pise.
Bon, heureusement, le championnat biélorusse reste toutefois assez confidentiel pour nos yeux d’occidentaux remplis d’œillères qui préférons nous abrutir de Premier League ou de Liga et découvrir Roman Pavlyuchenko ou Semih Sentürk à l’Euro 2008 que de nous intéresser à ce qui se passe un peu plus à l’est (oui, ils jouent aussi au foot là-bas), donc les jeunes espoirs du BATE ont pu rester au club cette année encore et construire une fort jolie équipe, ma foi. Tous les joueurs ou presque sont issus de l’académie des juniors du club (quelle équipe de Champions League peut en dire autant ?) grâce notamment à Yuri Puntus, véritable architecte de cette jolie maison. Puntus était le responsable de l’académie ainsi que le sélectionneur de l’équipe nationale M-21 (qui a participé à la phase finale de l’Euro M-21 en 2004 avec 9 joueurs de Borisov). Puntus est parti depuis, mais Igor Kriushenko a pris le relais et a continué cette brillante politique de formation avant de prendre les rênes de l’équipe-fanion et de «monter avec ses juniors». Le club a ensuite recruté un peu en Russie (les tout jeunes Vladimir Rijevski, Anton Sakharov ou Vitaly Kazantsev) afin de composer une équipe très jeune, très enthousiaste et très vive. Le fer de lance du BATE Borisov n’a pourtant pas été formé au club mais est un vrai enfant du pays, l’excellent attaquant Gennadi Blizniuk (28 ans), international biélorusse très réputé au pays et qui est prêt à se frotter aux meilleurs défenseurs du continent. Et à les faire plier ? Qui sait…


Gennadi Blizniuk en action

On termine avec un coup d’œil sur l’effectif du BATE ? 17 Biélorusses, 4 Russes. Moyenne d’âge, 24 ans. Tout est dit. Borisov ne gagnera (peut-être) pas la Ligue des Champions, mais il va lui amener un formidable air frais, une bouffée d’oxygène phénoménale. C’est pas l’équipe qui joue le mieux au foot, ils ont joué de manière très défensive pour éliminer Anderlecht et le Levski, mais ils jouent avec cœur, technique et amour du maillot et ça, c’est beau. Espérons juste que les dirigeants biélorusses n’auront pas la tête qui tourne avec le pognon qui va rentrer (rentrées d’argent estimées : 13 millions de francs suisses… pour un budget de 3 millions !) et profitent de cette manne pour améliorer leurs infrastructures et ne pas aller acheter quelques vieilles stars dépassées à la Jimmy Floyd Hasselbaink pour grappiller quelques goals. Le BATE Borisov est l’unique raison qui me donne envie de m’intéresser un tant soit peu à la Ligue des Champions cette année, je serai assez reconnaissant aux dirigeants de ce club absolument génial de me laisser rêver un peu, merci !

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