On a eu plus chaud que froid…

Il est toujours assez amusant de parler du fait que la Suisse ne s’en sort pas si mal malgré «notre faible réservoir» de population. Surtout quand on joue un pays doté d’un nombre d’habitants aussi grand que Lausanne et agglomération. La Suisse (plus grand pays démographiquement de son groupe) affrontait donc, hier, l’Islande, dans un stade, paraît-il, semblable à la Pontaise (au niveau du froid c’est vrai que ça doit être la même chose).

Il y avait ces derniers jours comme une vieille odeur de sapin avant ce match, qui faisait pressentir un retour des calamiteuses prestations que l’on a connues lors de la campagne suisse pour l’Euro 2012. Des déclarations pleines d’ambition de la part des joueurs comme quoi «un nul, ça serait pas si mal». Des désastreuses statistiques supposées être rassurantes, fournies par un fameux quotidien orange qui qualifiait Mario Gavranovic de «meilleur buteur de l’histoire de la Nati» en termes de buts marqués par minutes de jeu. Et sans parler d’un sélectionneur qui se fait des f**ck à lui-même (coutume diablement répandue).Dès le début de première mi-temps, les inquiétudes ne semblent pas tombées de nulle part. Les Islandais sont rugueux et montrent un grand impact physique. Chez les Suisses, c’est le festival des passes ratées et des centres imprécis. A part deux-trois timides occasions de Inler et Xhaka, les velléités offensives rouges ne donnent rien et à l’arrière on défend à l’arrache malgré un bon Von Bergen qui ne lâche rien. Il faut s’en remettre à Benaglio par deux fois pour ne pas être pris à froid.
On commence à se dire qu’au lieu d’un Derdiyok qui aime s’éloigner de la zone de jeu pour être seul et faire ainsi des appels impossibles, on a hérité d’un Gavranovic qui, lui, préfère se coincer entre trois défenseurs, histoire de ne pas faire mieux. Les statistiques du Matin ne nous font plus rêver et on commence à se rappeler qu’après avoir raté sa carrière en Allemagne, Mario joue dans un club qui occupe la huitième place du championnat suisse.

On espère du mieux en seconde période. Mais les 20 premières minutes sont encore pires. Une succession d’actions islandaises offertes par les joueurs suisses, Djourou et Xhaka complètement aux fraises et aucun tir cadré des joueurs de Hitzfeld jusqu’à la 59e. Le poteau de Bjarnason une minute plus tard présage d’une aussi jolie fin que contre le Monténégro il y a deux ans.
Mais soudain le Deus ex Machina Barnetta sort un coup de patte magique que l’on attendait vraiment pas, tant lui non plus n’était pas formidable jusqu’à présent. L’action qui mène au but de Tranquillo est d’ailleurs à l’image du match : des défenseurs paniqués qui se jettent dans tous les sens, des actions offensives désordonnées et irréfléchies comme une armée de lapins Duracell qui s’efforceraient de shooter obstinément, puis, soudain, une action individuelle magnifique qui sort du lot. Un peu comme si le joueur de Schalke était le seul à savoir où était la cage.

Vue de l’esprit

Ce match c’est un peu comme quand on passe la soirée à draguer une fille moche : une fois qu’on a finalement couché avec, on essaie de se convaincre qu’elle n’était pas si mal. C’est exactement le phénomène qui se développera dès le second but signé Gavranovic, auteur d’un adroit opportunisme amené par un petit geste de Xhaka qui, comme vendredi contre la Norvège, sauve son match calamiteux par un moment de grâce unique. A 0-2, l’affaire semble pliée et on se sent soudain au Brésil alors que quelques minutes plus tôt, on se voyait en vacances à Majorque avec Streller et Huggel (oh mon Dieu…).
On oublie du coup que Benaglio a sauvé les meubles davantage qu’il n’aurait dû, qu’on a frémi en voyant Behrami venir défendre en collant son adversaire dans les seize mètres et que, franchement, franchement, on s’est fait au froc que ce brave Ottmar nous refasse une spéciale quand Barnetta fut sifflé scandaleusement hors-jeu. 
Au passage, on pourra avoir une pensée pour la énième réaction tiède et lâche de l’ASF concernant «l’affaire du doigt». Sur le coup, cela semble être dans la même lignée que le crachat de Frei en 2004. On déclare que c’est pas bien mais on a peur de punir. Manière classique de ne se faire mal voir de personne et attitude de pleutre sur laquelle la FIFA va se régaler d’intervenir pour montrer qui est le chef. Au moins cela donnera l’occasion à Michel Pont d’occuper enfin, le temps d’un match ou deux, la place de chef de banc après 10 ans. D’ailleurs, le jour où Pont ne sera plus entraîneur adjoint de l’équipe suisse, ça fera comme quand la TSR a supprimé Les Babibouchettes de son antenne, ça ne nous intéressait plus vraiment mais ça fait bizarre que ça ne soit plus là.

C’est pas le Pérou (ni encore le Brésil d’ailleurs)

Alors certes, on est en tête, on est bien, on n’a pas à se faire trop de soucis de perdre Benaglio pour affronter Chypre. Il faut aussi savoir apprécier ce qu’on n’a pas eu souvent le luxe d’avoir. Et il y a une certaine satisfaction nouvelle d’avoir l’impression d’être la meilleure équipe du groupe, même au niveau du jeu (et ça, ce n’est pas comme si on en était coutumier). Mais il serait de bon ton d’éviter des mauvaises surprises sur le double affrontement chypriote l’année prochaine.
Parce qu’en toute honnêteté on se passerait bien d’un barrage contre le Portugal, la France ou la Croatie (bien sûr on se passerait encore davantage d’une troisième place). Le seul bémol reste les doutes qui entourent la prochaine échéance. Si les choses continuent telles qu’elles tendent à être, quels joueurs seront les remplaçants Barnetta et Shaqiri et les mauvais en club Derdiyok, Rodriguez et Xhaka ? Et surtout est-ce Johan Djourou pensera toujours qu’Arsène compte sur lui, même quand il n’aura plus de contrat avec Arsenal ?…
Photos Pascal Muller, copyright www.mediasports.ch

Islande – Suisse 0-2 (0-0)

Stade Laugardasvöllur, 8369 spectateurs.
Arbitre : Kelly (Irl).
Buts : 65e Barnetta 0-1. 79e Gavranovic 0-2.
Islande : Halldorsson; Steinsson, Arnason, Ragnar Sigurdsson, Skulason; Gislason (70e Gudmundsson), Jonsson (81e Baldvinsson), Hallfredsson, Bjarnason; Gylfi Sigurdsson, Finnbogason.
Suisse : Benaglio ; Lichtsteiner, Djourou, Von Bergen, Rodriguez ; Behrami, Inler ; Shaqiri (80e Dzemaili), Xhaka, Barnetta (91e Klose) ; Gavranovic (83e Mehmedi).
Cartons jaunes : 20e Jonsson. 31e Gislason (suspendu au prochain match). 64e Steinsson (suspendu au prochain match). 81e Benaglio (suspendu au prochain match). 82e Arnason (suspendu au prochain match). 85e Hallfredsson.

A propos Robin Chessex 70 Articles
...

Commentaires Facebook

7 Commentaires

  1. Ah ah ah toujours la même chose ! Après avoir gagné en Slovénie : « ouais ouais c’est bien, mais il faudra voir contre l’Albanie, parce que pour l’instant c’est pas terrible.
    Après le match de l’Albanie : « ok mais attention contre la Norvège. C’est elle la tête de série alors si on continue comme ça, ça va pas le faire ». Après la Norvège : « on a eu la chance d’avoir le nul, mais maintenant on va se faire avoir contre l’Islance, typique de l’équipe Suisse, on connaît comment… »

    Et maintenant, quoi ? « Ah ben il faudra aller gagner les deux matchs à Chypre mais au niveau du jeu c’était nul, tous plus mauvais les uns que les autres »

    Sérieux, il vous faut quoi ? Y a toujours des mécontents.

  2. C est vrai qu on est pas la meilleure équipe du monde et que même si on se qualifie on sera éliminé du mondial, mais soyez quelques fois content de cette équipe… À chaque fois y a des gens pour cracher dessus même si on s’en sort pas trop mal. Devenez supporter de l Espagne (comme 50% de la planète et 100% des arbitres) comme ça vous serez pas déçu!

  3. Joli papier, notamment le coup de la fille moche, ce qui nous est tous arrivé un jour !

    Sans Benaglio, on serait probablement à 4 matches/1 point… On a de la réussite en ce début de campagne, profitons-en et savourons !!

    Et mention à Barnetta pour ce goal absolument magnifique. L’éclair de la soirée.

  4. honnetement, on s’en tape, pour l’instant on est premier avec 6 points a prendre contre chypre alors que les autres vont en perdre entre eux….un article sympa mais tellement suisse, jamais content. Moi je le suis – content – et a mon avis on ira au bresil avec la premiere place du groupe, que demande le peuple? De jouer comme le Bresil? C’est pas possible, donc voila….donc jouons comme on peut, ca marche pour l’instant, et franchement c’est pas si degeu que ca

  5. En tout cas on a la meilleure génération depuis 2006, si Gavranovic confirme devant, et qu’on trouve une charnière digne de ce nom (cessons de faire jouer Djourou qui ne joue pas à Arsenal, alors qu’on a de garçons comme Klose ou Rossini qui jouent chaque w-e en Bundesliga ou Série A, faut leur donner leur chance), franchement on aura une équipe solide.

    Au milieu c’est vraiment du costaud et y’a pas mal de réservoir.

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*


Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.