Equipe de Suisse : portrait des 23 sélectionnés

Ottmar a tranché et décidé de se passer de surprises ainsi que de Kasami et Derdiyok. Les joueurs en manque de temps de jeu n’avaient pas leur place en sélection, alors il a préféré prendre d’autres joueurs en manque de temps de jeu. A l’inverse, on ne voit pas comment l’Allemand aurait pu faire autrement. Les meilleurs sont là, il n’y a pas moyen d’être traité d’autre chose que de «conservateur» (à moins que ne pas être «conservateur» aurait été de prendre Alain Rochat ou Adriano De Pierro). Voyons donc à quoi ressemble la meilleure équipe de Suisse du monde.

Gardiens

Diego Benaglio (Wolfsburg). Il fut souvent le meilleur joueur de la Suisse lors des dernières compétitions. L’imperturbable capitaine de Wolfsburg qui ne cligne jamais des yeux est un atout important. Bien sûr il n’a pas la meilleure relance du monde, bien sûr son remplaçant peut susciter le débat sur son statut d’indétrônable. Mais sa sérénité ne sera pas de trop devant une défense centrale qui flippera autant que nous devant notre télé. Benaglio c’est le type responsable, celui qui reste toute la soirée devant le barbecue à cuire des saucisses pendant que ses potes picolent à deux mètres (mais viennent quand même toutes les 12 minutes lui dire «Ça va toi sinon ? La famille ? Le boulot ?… bon à toute»).
Yann Sommer (Bâle). Quand on pense qu’à une époque on hésitait entre Zubi et Coltorti, on ne peut que se dire que les choses ont sacrément évolué, au moins dans ce secteur. Sommer ne peut pas encore prendre la place à Benaglio pour cause d’inégalité dans l’expérience, mais il a le profil du gardien promis à un avenir tout à fait acceptable. En plus d’avoir du talent balle au pied. Un mec qui nous donne envie d’acheter du shampoing.

Roman Bürki (Grasshopper). Wölfli devait venir pour faire des blagues sur le banc mais il a tout de même été jugé indécent de prendre un troisième gardien blessé et il a fallu sélectionner un nouveau champion. Roman Bürki a gagné la partie avec son histoire du bègue qui dit bonjour à madame Capinézi. A 23 ans, on pourrait aussi lui promettre un potentiel avenir avec la Nati mais avec les 25 ans de Sommer, ça semble plutôt mal embarqué cette histoire.

Défenseurs

Steve Von Bergen (Young Boys). La fierté romande, le mec intelligent, sympa, souriant, qui a plus de mots dans son vocabulaire que toute l’équipe de France réunie. Tellement bonnard qu’on en préférerait presque qu’il soit sur le canapé avec nous le jour du match plutôt que sur le terrain à rattraper les trous défensifs laissés par ses coéquipiers. Il est lent, il n’est pas spécialement athlétique, il est sans doute trop gentil mais à l’heure actuelle, c’est ce qu’on a de mieux à ce poste.
Johan Djourou (Hambourg). Les mauvaises langues diront qu’il est symptomatique que Hambourg ait attendu son arrivée pour être potentiellement relégué depuis 1963. On avait tellement d’espoir en lui depuis des années que l’on a l’impression qu’on ne le verra jamais à son pic de potentiel. Son impact physique est intéressant mais, tel un piano en sagex, il se blesse tellement souvent qu’on se demande s’il tiendra le coup d’ici à juin.
Philippe Senderos (Valence). Lui et Djourou sont des indissociables dans l’esprit des fans. Grands espoirs à la même époque quand ils jouaient à Arsenal tous les deux et qu’ils étaient des promesses d’avenir en 2006, errances parallèles dans des clubs où ils ont eu tendance à stagner, infirmerie tous les six mois… Le sosie de Stress a retrouvé un peu de confiance à Valence mais, en équipe suisse, on ne sait jamais trop ce que ça va donner quand il entre sur le terrain. Sans doute dernier remplaçant à la Coupe du Monde.
Fabian Schär (Bâle). Avec sa propension à se porter vers l’avant et ses errements défensifs, le Bâlois a toutes les cartes en main pour devenir le nouveau Philipp Degen. Si, à l’inverse, il gagne en maturité et parvient à se concentrer pendant 90 minutes, il peut devenir un excellent élément. Notre meilleur buteur des éliminatoires a tout de même la particularité d’être imprévisible. On espère que cela sera dans le bon sens uniquement.
Stephan Lichtsteiner (Juventus). Sans doute le meilleur joueur de l’équipe. Un acharné à la tâche sortant des saisons extraordinaires en club année après année. Il a aussi réussi à canaliser son agressivité hystérique en certaines circonstances. Il est irremplaçable au sein de l’équipe.

Ricardo Rodriguez (Wolfsburg). Il y a peu de mots pour lui rendre honneur. Le seul vrai gagnant de la génération championne du monde M17. Une saison à la Frank Lampard avec tous les matchs joués dans leur intégralité pour Wolfsburg. Il a fait son chemin l’air de rien et est en passe de devenir tout aussi immuable que Lichtsteiner. 
Michael Lang (Grasshopper). Il est venu parce qu’on ne savait pas qui prendre d’autre. Bon à la limite, on peut espérer qu’il devienne une sorte de Spycher : n’apporte rien mais on n’a pas des sueurs froides en le voyant sur la pelouse. Il peut faire l’affaire contre le Honduras si le joueur de la Juve doit se reposer.
Reto Ziegler (Sassuolo). Le mec qui bénit son entraîneur junior de l’avoir foutu à ce poste à l’époque, ce qui est bien la seule raison de sa présence au Brésil. Cela fait tellement d’années qu’il est en manque de temps de jeu qu’il devrait être sevré à présent normalement. Certes, sa patte sur les balles arrêtées n’a sans doute pas complétement disparue mais on ne voit vraiment pas en quelles étranges circonstances cela lui reviendrait à lui d’en tirer une.

Milieux

Gökhan Inler (Naples). Le premier Napolitain et indispensable capitaine. Il a été un peu critiqué durant sa saison mais il reste un titulaire indiscutable en Italie et avec l’équipe de Suisse. Bien avant les autres, Inler est clairement celui dont une blessure représenterait le plus grand drame.
Valon Behrami (Naples). Le deuxième Napolitain. Le bon point c’est que les médias ont enfin compris qu’il fallait cesser de l’appeler le Beckham suisse car c’était comme dire que Jean-Marc Richard est le Bruce Willis helvète. Le duo qu’il forme toute l’année avec Inler (même si, oh mon Dieu, il paraît qu’ils ont dit des choses pas gentilles l’un sur l’autre) est l’un de nos meilleurs atouts. Il ne faut juste pas qu’il nous refasse une petite pétée de câble comme il y a quatre ans. Mettons lui peut-être des poches à ses shorts histoire qu’il foute ses mains dedans plutôt que sur la gueule de ses adversaires.
Blerim Dzemaili (Naples). Le troisième Napolitain. Le mal aimé d’Hitzfeld qui ne lui a que rarement laissé sa chance. Remplaçant de luxe de notre duo de récupérateurs même s’il tend à être un peu plus offensif. Alors donc, osons la question : pourquoi le sélectionneur ne tenterait-il pas d’aligner les trois joueurs en même temps en plaçant l’ancien capitaine de Zurich à la place de Xhaka ? Une idée comme ça…
Tranquillo Barnetta (Francfort). L’équipe de Suisse a pour objectif d’obtenir le maximum de records à la con et qui ne servent à rien. Etre éliminé d’une phase finale sans encaisser de but, avoir le plus jeune buteur d’un Euro en se faisant éliminer, battre le futur champion du monde mais ne pas être capable de battre le Chili, le Honduras et de se qualifier… Là on s’est dit qu’on allait avoir le plus grand nombre de sélections données à un joueur à moitié blessé. On a vu que ça avait déjà bien marché en 2008 et en 2010 quand Tranquillo marchait sur une jambe. Alors oui il est super sympa mini-Huggel, mais il n’a clairement plus le talent d’antan déjà quand il est entier. Donc à moitié cassé on a le droit de douter de détenir un atout en sa personne. Son expérience pourrait compenser, espérons.

Xherdan Shaqiri (Bayern Munich). Il y a comme une gêne à propos de Tyrion Schwarzenegger. Ok, il a le talent offensif que personne d’autre n’a dans le pays. Ok, il a le profil d’un potentiel génial joueur qui est une chose inédite en Suisse (depuis Julian Esteban, l’ex-futur Michael Owen suisse, cela va sans dire). Il y a quand même un malaise à toujours porter aux nues un joueur qui ne s’est pas imposé au Bayern en deux saisons. Même si la concurrence en Bavière est élevée et même si cela ne veut pas dire qu’il y a fait mauvaise figure, il reste que notre star est un remplaçant, qui plus est beaucoup blessé cette saison. Si on est totalement honnête, on admettra qu’en ce qui concerne Shaqiri, contrairement à ce qu’on ressent par rapport à un Inler ou un Lichtsteiner, on en est davantage à «espérer» qu’il montrera l’énorme joueur qu’il est plutôt qu’à s’y «attendre». Mais bien évidemment, à choisir, on préfère notre lutin de couloir à celui des Français parce que Valbuena cela ressemble limite à une blague.
Valentin Stocker (Bâle). Martin McMouche finit une saison tonitruante à Bâle. Il est énorme en Coupe d’Europe depuis deux ans et infiniment au-dessus du lot dans le championnat suisse. Oui mais voilà, il est baraqué comme Elie Semoun et attend toujours que sa barbe pousse pour qu’on le laisse entrer enfin en boîte. On a vraiment peur que Ribéry lui dise d’aller jouer avec sa pelle et son seau (et d’ailleurs que lui même ait peur en voyant Ribery).
Granit Xhaka (Mönchengladbach). Avec son comportement de sale gamin, le Cristiano du pauvre a fait craquer Papy Favre à Gladbach qui lui a confisqué son temps de jeu. Peu importe, il sera sans doute titulaire en neuf et demi, tant Hitzfeld semble lui vouer une confiance totale. Tout le monde parle du manque de temps de jeu de celui-ci ou celui-là, mais Xhaka est l’un des premiers dans une situation compliquée. Il a un talent de malade mais s’il garde la nonchalance gygaxienne qui a pu être la sienne lors des dernières sorties suisses, cela risque d’être un peu léger. Tant mieux, il a trois matchs pour nous contredire.
Admir Mehmedi (Freiburg). Llewyn Davis est un sacré mystère. Il est excellent à Freiburg, marque une douzaine de buts mais se transforme en tracteur diesel une fois dans le maillot de la Nati. Même ses 12 buts en Bundesliga n’ont pas réussi à convaincre les supporters qui lui sont hostiles. Il faut dire que le poste de demi droit où Hitzfeld l’a mis parfois ne lui convient pas du tout. Admir est fait pour jouer tout devant. Mais avec sa grâce de lanceuse de poids, on ne sait pas quelle voix s’élèvera pour réclamer sa présence en titulaire.
Gelson Fernandes (Freiburg). Le Valaisan a toujours répondu présent lorsqu’on parle d’engagement. Il a marqué ce fameux but contre l’Espagne. Il accepte sans broncher d’être remplaçant, ou numéro 6, ou latéral gauche, ou milieu droit, ou cuisinier, ou jongleur, ou dresseur de koalas pour un programme de psychogériatrie… Gelson accepte tout tant qu’il peut se mettre au service de l’équipe. Si Hitzfeld lui demandait, il mettrait des mines antipersonnelles dans un jardin d’enfants si cela peut servir l’équipe. Il a fait tellement de clubs dans différents pays que le Guide du Routard lui a prévu un poste pour sa carrière post-football. Comment peut-on se passer d’un mec pareil ? Rien à redire sur sa sélection.

Attaquants

Josip Drmic (Nuremberg). Le fucking Deus ex-machina ! Il y a à peine cinq mois, tout le monde chialait à l’idée de partir au Brésil avec zéro attaquant qui sorte du lot. Et soudain, Papa Noël nous offre l’un des meilleurs buteurs de Bundesliga dans un club tout pourri. Il a toutes les qualités du vrai avant-centre moderne : grand, puissant, technique, sans tergiversation. On attendra bien sûr une confirmation plutôt que des merveilles, mais Drmic a d’ores et déjà changé la donne. Peut-être complétement.
Mario Gavranovic (Zurich). Fut prometteur à une époque mais semble condamné à rester un honnête travailleur de Super League. Ça ne dérange personne de le voir, il a un bon sens de vieux renard et a surtout payé dans sa carrière une ingratitude crasse de ses chefs. Il ne deviendra pas le nouveau Maradona au Brésil mais il peut marquer le but qu’il faut au bon moment.

Haris Seferovic (Real Sociedad). Un but contre Chypre lui vaut sa sélection. Clairement la plus grosse polémique de la sélection. Une saison tout aussi miteuse que Kasami ou Derdiyok, des prestations moyennes avec la Nati… pas sûr qu’il ait été pris pour ses qualités de joueurs. Sa gueule de jeune premier servira davantage à semer le caca auprès des Allemands dans le cas d’un éventuel affrontement vu que les femmes des joueurs de la Mannschaft ont été placées dans le même hôtel que la Nati au Brésil (si si). D’ailleurs, on ne lui a pas préparé d’équipement de foot mais des chemises et des bons boissons pour le bar de la plage. C’est sûr que si la Coupe du Monde doit se coupler avec l’île de la tentation pour Schweini et cie, cela risque de ne pas aider la concentration. Une Coupe du Monde ça se joue sur plusieurs tableaux.

Réservistes

Eren Derdiyok (Leverkusen). Le drame que représente ce joueur dépasse celui de Vonlanthen. Derdiyok a clairement bouffé sa carrière en une saison et demie. Aurait-il pu amener quelque chose ou non, on ne le saura qu’en cas de blessure d’un sélectionné. Mais il y avait sans doute moins de chance qu’il se tape la femme de Neuer que Seferovic.
Pajtim Kasami (Fulham). LE gros débat est un peu un trompe-l’œil. Kasami a certes du talent mais il ne faut pas oublier qu’il est remplaçant dans un club relégué. On aurait pu le mettre à la place de Barnetta mais de toute façon aucun des deux n’aurait été titulaire.
Fabian Frei (Bâle). Le petit frère de Lichtsteiner. Hitzfeld n’a pas voulu le prendre pour éviter que la moitié de la planète ne se demande si les Suisses ont tous la même gueule (celle de l’assassin de Sean Connery dans Les Incorruptibles).
Marwin Hitz (Augsburg). Saison honorable, une promesse pour l’avenir mais ses blagues étaient moins bonnes que celles de Bürki.
Timm Klose (Wolfsburg). Au moins les choses sont claires : le joueur qui est réserviste de notre défense centrale est un mec qui a été titularisé zéro fois cette saison. Ce n’est pas pour rien qu’on a Djourou et Senderos.
Pirmin Schwegler (Francfort). Il n’est pas blessé de toute façon ? Ah mais oui c’est juste : ça n’a aucune importance pour Hitzfeld !
Silvan Widmer (Udinese). Dans le fond, cela ne nous aurait pas déplu de le voir à la place de Lang ou Ziegler. Mais comme il n’est jamais apparu avec l’équipe A, c’était un risque que personne ne souhaitait prendre.
Photos Pascal Muller, copyright EQ Images

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19 Commentaires

  1. Le passage sur Bürki m’a tué ! Le nombre de fous rire que j’ai chopé grâce à vous ! Un grand bravo et un immense merci !

  2. Excellentissime présentation de nos vingt trois taulards ! J’adore ! Et un immense plaisir de voir que CR (CartonRouge.ch bien sûr, pas la danseuse à ciseaux portugaise) est en pleine bourre à un mois du début de la Coupe du monde ! Let’s go, les gars !

  3. Je me tiens au courant de mon équipe avant de mettre le drapeau Suisse dans l’immeuble bien en vue à Valence.
    Avec cette équipe de bras cassé qui vient d’être dépeinte, je vais avoir du succès avec ce drapeau : c’est sur !! merci pour ces commentaires de chaque joueur, effectivement, à chacun son carton Rouge et blanc…
    Allez la Suuuisse…

  4. Sympa l’article, vraiment de bonnes piques. Juste dommage que tu n’arrives pas à garder ta neutralité car quand je vois comme certains joueurs ramassent des fions alors que tu ne les as sûrement pas vu jouer 2x de la saison et qu’en parallèle, tu te paluches sur… Fernandes le type le plus inutile d’une équipe, ça casse un peu le truc.

  5. « Alors donc, osons la question : pourquoi le sélectionneur ne tenterait-il pas d’aligner les trois joueurs (de Naples) en même temps en plaçant l’ancien capitaine de Zurich à la place de Xhaka ? Une idée comme ça…  »

    Entièrement d’accord ! Mais faut pas rêver… le petit prince du foot suisse (lol) a sa place assurée dans le 11 d’Ottmar…

    Concernant Gelson, du même avis que le commentaire précédent… il ne sert à rien dans cette sélection. Au mieux ca fait un mec frais et pas trop transpirant à interviewer par la RTS à la fin du match… mais autrement je vois pas ! Hitzfeld à doublé tous les postes, mais en le sélectionnant il a d’un coup triplé quasi tous les postes… inutile !

    Pour ma part un Steven Zuber aurait été un choix bien plus audacieux… qui peut concrètement apporter du danger sur 15-20 minutes à la fin du match tendu !

  6. Oh c’est génial!!! Un immense bravo, j’ai mal au ventre à la fin de l’article tellement j’ai rit!!
    On en redemande des comme ça!

  7. Alors la merciiiii pour cet article bourré d’humour noir!!! C était a tomber!!! Effectivement le passage sur Gelson m a tuée!!! J arrivais pas a lire l article a mon homme tellement j étais morte de rire!!!

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