Clubbing : Le guide du championnat du Belarus

Nous sommes en 2020, coronavirus oblige aucun championnat de foot européen ne se déroule comme prévu. Aucun vraiment ? Non, un seul se moque toujours du Covid-19 c’est la Vysheyshaya Liha, première division du Bélarus. Parce qu’un pays qui a pris l’essentiel des retombées de Tchernobyl dans la gueule ne craint pas un virus qui tue moins de 0,5% des personnes atteintes. Pourtant le pays doit compter nombre de personnes à risques…

L’occasion était donc trop belle de parler de la saison 2020 du championnat de la dernière dictature d’Europe. Le Bélarus anciennement appelé Biélorussie (parce que ça c’est l’ancien nom russe et les autorités font tout pour qu’on ne parle pas trop russe là-bas) est, qu’on se le dise, dirigé par le même mec depuis son indépendance, soit depuis 26 ans. Un gars qui possède une fort belle moustache, ce qui est la moindre lorsqu’on a vocation à être le président à vie d’un pays. Pour lutter contre la pandémie qui met l’économie mondiale à genou, le chef du pays encourage à boire beaucoup de vodka et… ben c’est vraiment ce qu’il a dit. Visiblement, on ne compte pas céder à la psychose du côté de Minsk si bien que son championnat continue d’avoir lieu comme si de rien n’était ou presque.

Il faut bien avouer qu’une si belle moustache ça mérite au moins 26 ans de pouvoir!

Le but n’est bien sûr pas de dresser le portrait d’un pays ô combien fascinant, mais sache juste que le Bélarus est assez compliqué à cerner. Contrée qui était encore difficile d’accès aux étrangers il y a quelques années (il fallait un visa et surtout un guide), le Bélarus semble petit à petit s’ouvrir. Son identité et sa relation avec les pays voisins (et notamment l’immense Russie) demeurent des sujets assez délicats. Par exemple, le biélorusse est la langue officielle du pays mais la majorité de la population continue à parler russe. Dans le présent article, on a choisi d’utiliser la terminologie qu’on retrouve le plus fréquemment dans la presse occidentale même si celle-ci a souvent tendance à mélanger biélorusse et russe et à faire n’importe quoi. Nous allons donc aussi faire n’importe quoi.

Le format :

Un championnat à seize équipes qui s’affrontent en match aller-retour. Seule petite différence avec la majorité des compétitions européennes, le printemps marque le début de la saison et l’automne la fin (comme dans les pays scandinaves et baltes). Ce qui signifie qu’au Bélarus on joue durant l’été, l’hiver étant trop rigoureux. A la fin de la saison, le premier du classement est déclaré champion, et reçoit des médailles à mettre sur son uniforme militaire. Les deux derniers sont relégués et tout l’effectif est envoyé en prison et les entraîneurs sont fusillés. On est dans une dictature, il ne faut pas l’oublier.

La compétition :

Autant le dire tout de suite, une seule équipe domine totalement le championnat : le BATE Borisov. L’an dernier, un véritable séisme s’est produit, puisque le club qui restait sur treize titres consécutifs a dû abandonner sa couronne au profit du Dinamo Brest, une équipe bretonne exilée. Malgré cette parenthèse 2019, seul le BATE Borisov est jusqu’ici parvenu à s’illustrer sur la scène européenne et parvient à attirer des joueurs de qualité. Sans surprise, le championnat compte beaucoup de clubs de la capitale Minsk et de ses environs. Le niveau n’est bien sûr pas extraordinaire, on doit osciller quelque part entre Super League et bonne Challenge League. Les effectifs sont composés d’environ deux tiers de joueurs biélorusses auxquels on peut ajouter bon nombre de Russes et d’Ukrainiens souvent de seconde zone. Pour le reste, quelques joueurs européens de l’Est et africains dont le Camerounais Gabi Kiki.

L’ambiance :

Pour être honnête c’est très fade… le championnat biélorusse n’attire pas les foules. Exceptés les deux Dinamo (Minsk et Brest) et dans une moindre mesure le BATE Borisov, les stades sont plutôt vides. La moyenne doit avoisiner les 2’000 spectateurs et faire des pics de nullité à quelques centaines de pelés, notamment pour les équipes de seconde zone de la région de Minsk. Bien évidemment, le fait que le BATE Borisov archidomine le championnat y est pour quelque chose.

Les équipes :

BATE Borisov

Mastodonte qui domine totalement le championnat biélorusse depuis 20 ans. Une sorte de moissonneuse à titres dans son pays qui a même réussi l’exploit de se faire connaître en Europe en disputant la phase de poule de la Ligue des Champions à maintes reprises. Cette année, le club de la modeste ville de Barysaw (ou Borisov en russe) est très fâché car il s’est fait chiper son titre la saison dernière. On dirait le FC Bâle issu du monde fascinant de la machine agricole (BATE étant à la base une immense entreprise de véhicules agricoles). Un club par lequel sont passés tous les joueurs de foot biélorusse connus : Aleksandr Hleb.

Belshina Babruysk

Si ta passion secrète dans la vie est le pneu, ce que tu n’avoueras jamais en public bien sûr, ce club est pour toi ! Cette équipe néo-promue a comme particularité de porter le nom de l’entreprise pneumatique de Babruysk qui emploie une bonne partie des habitants de la ville.

Une partouze de pneus à Babruysk

Dinamo Brest

Champion en titre qui a mis fin à la dictature du BATE Borisov et fait renaître l’espoir des amateurs de foot dans le pays. Club qui fait partie de la longue tradition des Dinamo des pays de l’Est. L’expression tonnerre de Brest est d’ailleurs attribuée à Diego Maradona himselfprésident d’honneur du club. On en a la preuve, Brest est sûrement une plaque tournante de la cocaïne dans le pays.

Dinamo Minsk

Club de la capitale également estampillé du label Dinamo, une franchise socialiste dont les couleurs sont le bleu et le blanc. Equipe la plus prestigieuse du pays par le passé, ses supporters sont réputés pour être de droite et contre le pouvoir de Lukashenko. Il n’en fallait pas moins pour que le Dinamo bascule au rang d’éternel second, derrière le BATE et ne glâne plus le moindre titre depuis 2004. Si un jour je dois fonder une équipe de foot, je l’appellerai le Dinamo Saxon.

Energetik-BGU

Petit nouveau parmi l’élite, il s’agit de l’équipe de l’université technique de la capitale Minsk. Tactiques effectuées par équations complexes, entraînement donné par des robots. Le Libérien David Tweh a été le premier joueur au monde à être recruté par un algorithme mis au point par le physicien biélorusse, le Dr. Stasevchuk. Une collaboration avec l’EPFL et le FC Sion est prochainement envisagée.

FK Gorodeya

Gorodeya est une petite ville de 4’000 âmes située dans la région de Minsk. C’est donc un peu comme si Sainte-Croix possédait une équipe en Super League, quelle horreur. Pour rajouter du glamour, ce club a un grand trouble de l’identité. Quand tu possèdes un blason rouge et jaune, tu n’es pas censé jouer tout de vert vêtu.

Isloch Minsk

Equipe de la banlieue de Minsk dont le logo fait l’unanimité parmi les motards, les Valaisans et les fans de Johnny Hallyday. Notre rédacteur Paul devrait s’y intéresser de plus près étant donné qu’à la rédaction on le soupçonne de faire partie des trois catégories.

FK Minsk

Manque d’originalité complet. Alors fondons une équipe dans la capitale et appelons le… ben le Football Club de Minsk. C’est bien ça, c’est original et ça marque les esprits. Bref, tu l’as compris, ce club a autant de charisme que le FC Zurich et Stéphane Henchoz réunis.

Neman Grodno

La ville de Grodno se trouve à quelques kilomètres de la Pologne et de la Lituanie. Là où ça devient un peu croustillant, c’est que l’équipe de foot de la ville, le Neman Hrodna, évolue en jaune et en vert, soit les couleurs de la Lituanie voisine. Oui car à Grodno on se sent très proche des pays voisins (voire on les envie). Allez Servette sors ta tunique bleue à deux étoiles !

Rukh Brest

Club de la ville de Brest, on y croise donc pleins de marins en ciré, qui a été fondé en 1922 mais qui a cessé d’exister entre 1939 et 2016. Le club de Rukh Brest a ainsi été ressuscité il y a 4 ans… par l’autre club de la ville, le Dinamo. Ce dernier l’a utilisé comme club ferme un moment, avant que son avorton ne gravisse rapidement les échelons jusqu’à son ascension dans l’élite la saison passée. Autant te dire que les derbys sont aussi chauds qu’entre un LS-Stade.

Shakhtyor Soligorsk

Encore un club de mineurs en Europe de l’Est. Si la plupart de ces clubs miniers font dans le charbon, à Soligorsk on fait dans la potasse, un minerai qui sert à fabriquer de l’engrais. Comme c’est charmant. On doit adorer ce genre d’équipe à Estavayer-le-Gibloux. Mine de rien, la potasse rapporte car le club de Soligorsk dispute souvent les premiers rôles et participe même à des tours préliminaires de coupes européennes où il se fait éliminer par des clubs moldaves ou autrichiens.

Ca c’est de la bonne potasse !

Slavia Mazyr

Club qui a connu ses heures de gloires dans les années 90, avec deux titres de champion de Bélarus, le Slavia a enchaîné pas mal de déboires depuis. Relégation, changement de nom (6 fois depuis 1994), fusions avec d’autres clubs ont rythmé l’histoire du club. Et puis à part ça, la ville de Mazyr était en première ligne lorsqu’un certain nuage s’est échappé de Tchernobyl, je ne sais pas si ça te dit quelque chose.

FK Slutsk

Oui c’est rigolo si on enlève le dernier -k, ça fait le FC Salopes en anglais. Cette particularité absolument débile a donné au club de la ville de Slutsk une certaine renommée dans le monde anglo-saxon en ces temps de pandémie où le pays est un des seuls à jouer au football. Une bonne plaisanterie qui a permis au club en proie à de graves difficultés financières de se faire connaître et ainsi d’attirer quelques sponsors bienvenus. Comme par hasard le club réalise un début de saison tonitruant.

Smolevichi FC

Oh le beau logo ! Servette peut sans doute porter plainte pour plagiat. Club de la région de Minsk totalement insignifiant, le FC Smolevichi a comme caractéristique d’avoir été créé il y a dix ans et d’avoir changé déjà quatre fois de nom. Bon, lorsque les mecs se rendront compte que leur acronyme SFC est le même que celui de Servette, ils voudront sans doute le changer une cinquième fois. Je propose le Wild Crocodiles Smolevichi ça a de la gueule.

Torpedo BelAZ Zhodino

On a eu droit aux machines agricoles, aux pneus en tout genre, à la potasse, il était logique que les poids lourds aient également leur moment de gloire. La ville de Zhodino compte en effet une immense fabrique de camions (BelAZ) qui emploie plus de 10’000 salariés, un bon vestige de l’époque soviétique. Finalement Torpedo Saxon c’est encore mieux et en plus c’est sans doute l’antre de la blague camion pouët pouët .

FK Vitebsk

Vitebsk a beau être une des villes principales du pays, son club reste modeste. Même après 24 saisons au plus haut niveau, il ne compte aucun titre dans sa vitrine de présentation, hormis une prestigieuse coupe du Bélarus glanée en 1998 quand l’équipe évoluait encore avec des maillots en coton. Autant te prévenir que Vitebsk a changé plus de fois d’appellation qu’il n’a gagné de titre durant son histoire.

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