Pigeon de mai 3 : Christian Gross

19 novembre 1997. Ma nouvelle vie sur la perfide Albion commence à s’effondrer, sans que je le sache. Mon meilleur ami en Angleterre est un fan absolu des Spurs. Vous savez, le club des Steve Archibald, Oswaldo Ardiles ou encore du plus connu de tous, Gary Lineker (ou pour ceux qui sont nés après 1999, des Kane, Lloris et… Serge Aurier, voilà, voilà). J’avais promis à mon pote que ce nouvel entraîneur suisse, totalement inconnu même auprès du MI5, allait non seulement les sortir de leurs misères du moment mais surtout leur amener des titres de champions, comme ceux qu’il avait conquis avec GC en 1995 et 96.

Mais voilà, Christian Gross fit ceci à son arrivée à White Hart Lane :

Juste à voir la gueule du PDG du club anglais Sir Alan Sugar sur la vidéo, on pouvait imaginer que neuf mois plus tard, ça n’allait plus vraiment le faire au nord de Londres pour le coach zurichois. Et patatras, après le licenciement de Gross, j’avais perdu un bon ami anglais, mais seulement temporairement car après quelques pints de stout dans le pub local, tout était déjà rabiboché et reparti comme en 40.

Le problème avec ta carrière d’entraîneur, mon cher Kojak, c’est qu’elle a laissé, à l’image d’une première rencontre avec une copine à qui on voulait tant rouler une pelle mais qui s’y est refusée obstinément, un goût d’inachevé. Certes tu as malheureusement mis Wil sur la carte géographique du football suisse, certes tu as amené deux titres de champion suisse à l’équipe corporative du Crédit Suisse, certes tu as accumulé quatre titres de champion au FC Novartis, certes tu as gagné cinq Coupes de Suisse (note que c’est toujours moins que le FC Sion). Pour tout cela, bravo Christian ! Tes méthodes caporalistes et ta vision du foot rigoureux avec un respect sans fin du replacement défensif t’ont amené six titres et aux alentours de 55% de victoires dans notre belle Helvétie.

Oui mais.

Carton-Rouge.ch est passé par là et veut se rappeler, à l’heure où tu sonnes ta propre retraite, au bon souvenir de tes dix dernières années de coaching depuis ton départ forcé du FC Bâle. Ce sont, hélas, des années marquées d’échecs sportifs dans tous (absolument tous) les clubs que tu as tenté de coacher. En fait, tes dix dernières années de coaching ressemblent plutôt à la gestion du coronavirus par le duo Bolsonaro-Trump qu’à celle de l’autre Kojak suisse, Alain Berset.

Commençons par ton passage chez les voituriers du VFB Stuttgart. Sur ta lancée bâloise, tu les as sauvés de la relégation et même amenés en Europa League. Seulement au début de la saison 2010/11, après six défaites de rang, Freddy Bobic te fit passer par le tourniquet à bourricots. Bon perdant, tu affirmais encore : « Dommage, j’étais sûr que j’aurais réussi à remettre mon équipe sur le chemin du succès ». Oh mais comme tu étais devenu idéaliste après tes titres glanés en Suisse… Sans le savoir, cette expérience mi-figue mi-raisin dans le Bade-Wurtemberg fut le chant du cygne de ta carrière d’entraîneur. Certes, les frères Rhis te redonnèrent une chance à YB mais après t’être mis à dos les spectateurs, les sponsors et les box VIP, le directoire te pria rapidement de plier bagages avant que les millions de pertes du club bernois (dont ton salaire astronomique) n’en deviennent des dizaines. Tout ce que tu trouvas à dire après cette dernière défaite mortifiante face au Servette FC, ce fut une très « cholie » : « J’ai de très bonnes relations avec mes joueurs ! « … comme si cela suffisait dans le foot business !

Sans le savoir, tu venais de tirer un trait à tout jamais sur l’espoir de coacher à nouveau en Suisse… ou de reprendre la Nati. C’est alors que tu décidas de partir là où tu as le plus excellé, à l’étranger. Tu partis t’ensabler en Arabie Saoudite, où comme dirait si bien Daniel Riolo, les coaches et les joueurs vieillissants se rendent pour le projet sportif. Car c’est vrai que l’idée d’entraîner une équipe de Bédouins doit être vachement motivante, surtout à la vue des 150 spectateurs qui garnissent ton stade. Et quand on sait que les gardiens du Royaume des puits de pétrole sont nettement plus mauvais que Guy Bürren et Marco Wölfli réunis, on ne peut qu’admirer le béguin que tu as ressenti pour ce foot « en devenir ». Finalement, au bout de ton pensum de coach, tu réussis tout de même à gagner la CAF (une sorte d’Europa League africaine) avant que le président du club égyptien de Zamalek ne te congédie en résumant à sa manière les dix dernières années de ta carrière : « Gross est un spécialiste, oui mais un spécialiste de la défaite« .

Au final, ton aventure dans les sables aura permis de t’offrir un magnifique chalet dans les Grisons et des costumes Armani pour aller parader sur Teleklub, mais elle aura surtout couronné une seconde partie de carrière totalement foirée. Tu as été simplement rattrapé par l’évolution du football en direction du beau jeu, du pressing mais surtout du réalisme du totomat. Heureusement, les sympathiques lecteurs et lectrices de Carton-Rouge.ch sauront être magnanimes à ton égard en t’offrant un Pigeon d’Or pour que tu ne partes pas à la retraite sans un dernier trophée « made in Switzerland ».

A propos Paul Carruzzo 207 Articles
Elle est pas un peu belle notre Nati et tout le bonheur qu’elle nous amène ? Alors, Rickli et compagnie, si vous ne vibrez pas devant cette équipe, vous n’êtes pas non plus monstrement obligés de regarder. Profitez d’un bon match de hornus et foutez la paix à nos joueurs, qui comme vous, ont un joli passeport rouge à croix blanche.

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