Clubbing: le guide de la Women’s Champions League (1)

Vous avez du mal à suivre la Ligue des Champions masculine depuis que la RTS en a perdu les droits suite à une surenchère ahurissante© ? De toute façon vous êtes un nostalgique de la Coupe des Coupes et regarder un quatrième de championnat affronter un troisième et se prendre pour des champions nationaux ça vous gonfle ? Le décès de Pierre Tripod n’a rien arrangé ? Bon, en termes de visibilité télévisuelle mainstream, ça risque de pas être beaucoup mieux. Mais on vous explique quand même ce qu’est la Women’s Champions League. A tout hasard, hein.

L’historique

La UEFA Women’s Champions League fête ses 21 ans d’existence cette saison. Du coup elle a légalement le droit de boire plus ou moins partout. Quand vous aurez lu comment elle fonctionne, vous comprendrez que ça tombe vraiment bien. On ne vous parlera pas vraiment de la première mouture créée en 2001 sous le nom de UEFA Women’s Cup puisque même Wikipédia n’y comprend que dalle:

En gros il y avait des équipes, des qualifications, des mini-tournois et une finale aller-retour.

C’est à ce moment qu’on se dit que, une fois n’est pas coutume, on ferait peut-être mieux de bifurquer sur la version francophone du site puisque Lyon est la meilleure équipe d’Europe. Effectivement, au vu de la page, la compétition a l’air bien plus suivie en francophonie (ou peut-être uniquement en Auvergne-Rhône-Alpes, allez savoir). On y apprend d’emblée que les accords encombrants de la langue française font que tout commence par une terrible hésitation entre la Ligue des champions féminine et la Ligue des championnes dans la langue de Wendie Renard. Putain, ce qu’on aime l’anglais et sa neutralité.

Là, on commence à un peu mieux comprendre: seuls les clubs champions de leurs pays sont initialement conviés et il faut plus ou moins être allemand ou suédois pour s’imposer (voilà qui nous rappelle une autre Champions League chère à notre coeur, tiens). A partir de 2009, année du changement de nom, on passe progressivement du Côté Obscur de la Farce. Mais on vous expliquera tout ça en temps voulu.

On ne vous apprend certainement rien en vous disant que le nouvel hymne de la WCL est interprété par le Groot Omroepkoor, littéralement le « grand choeur de diffusion » néerlandais.

Revenons en l’an de grâce 2001. Cette année-là, 33* clubs (ben oui, parce qu’avec 32 ça aurait été trop facile, on aurait pu faire un tableau à élimination directe) participent à la compétition en deux phases. Une première phase qualificative composée de 8 groupes de 4 (euh… mais ça fait 32 tout ça, non ?) et suivie de quarts de finale entre les 8 premiers de groupes (un rapide calcul mental nous dit que cette fois ça semble coller) et ainsi de suite jusqu’à la finale, le tout y compris ladite finale sur un mode aller-retour. La première édition est remportée par le FFC Francfort face au Umeå IK.

Plus rien de très intéressant jusqu’en 2009, si ce n’est que nous apprenons l’existence du FFC Turbine Potsdam, vainqueur en 2005 et finaliste malheureux en 2006, et le fait qu’Arsenal est capable de gagner en Europe lorsqu’il n’est pas encombré par sa section masculine (2007). La première édition de la nouvelle Women’s Champions League accueille 53 équipes (voilà qui va effectivement simplifier les calculs), championnes nationales et parfois vice-championnes (certains pays au bon coefficient UEFA peuvent aligner deux (places 7-16) voire trois (places 1-6 plus le pays tenant du titre) équipes). Vous serez heureux d’apprendre le nom du lauréat de cette grande première: le FFC Turbine Potsdam bien sûr, qui fait feu de tout bois (ou plutôt énergie mécanique de tout vent). Les Allemandes battent l’Olympique lyonnais en finale à… Getafe. Oui, non seulement la finale féminine (jouée sur un match pour la première fois) est servie en entrée deux jours avant le plat de resistance masculin, mais en plus elle est déplacée en périphérie (les hommes jouent à Santiago Bernabéu, 23 kilomètres plus au nord, cette année-là).

Avant d’en venir à la formule actuelle, on vous dira encore que le PSG a mis un point d’honneur à respecter la tradition (pas vraiment) ancestrale de ces messieurs puisque l’organisation qatarie a déjà trouvé le moyen de perdre en finale à deux reprises et de prendre une volée monumentale face à Lyon en demi-finale (7-0, 1-0 en 2016) alors que le FC Barcelone, vainqueur en 2021, est le seul club à avoir remporté la Champions League tant chez les hommes que chez les femmes. Oui, une fois encore, vous allez pouvoir briller en soirée à nos frais. Ne nous remerciez pas, on est là pour ça.

*Si c’est une erreur de calcul, elle existe également sur le site officiel de l’UEFA, source principale de la page Wikipédia. Du coup on n’y comprend plus rien, mais c’est rigolo.

Le format actuel

Jusque-là, après une phase de qualifications et autres barrages, les 32 (on imagine, hein) dernières formations en lice se retrouvaient en seizièmes de finale et ainsi de suite jusqu’à la finale. Dès 2021/2022, une phase de groupes fait sa réapparition avec quatre poules de quatre escouades. Les deux premières de chaque groupe se qualifient pour les quarts de finale. Et comment fait-on pour obtenir le droit de participer à ce last 16 de haut vol ? Figurez-vous que c’est ici que notre Bac+7 commence à nous être utile.

Les tenantes du titre et les championnes des trois contrées les mieux classées à l’indice UEFA sont qualifiées d’office pour les poules. Jusqu’ici c’est très simple, vous en conviendrez. C’est ensuite que ça se corse (comme le disait fort justement Napoléon): deux tours de qualification sont prévus pour toutes les autres candidates au Graal. Euh, enfin non, pas toutes. Les vainqueurs des championnats classés au-delà de la sixième place européenne débutent leur parcours en août au premier tour du Champions Path (chemin des championnes), qui consiste en un mini-tournoi à élimination directe (11 mini-tournois de 4 équipes chacun* avec donc 11 qualifiées pour le deuxième tour à la clé, merci de suivre). Au mois de septembre, les qualifiées retrouvent les championnes des pays classés entre les places 4 et 6 au niveau continental pour un deuxième tour qui fait office de barrage (aller-retour, fini les blagues) et enverra 7 équipes en phase de groupes qui débute en octobre. Même chose pour le League Path (chemin de la ligue) avec 4 mini-tournois concernant les deuxièmes des championnats classés entre les rangs 7 et 16 et les troisièmes des six premières associations du continent. Fort logiquement, 4 clubs rejoignent les deuxièmes des six premiers championnats européens qui les attendaient au deuxième tour, le tout histoire de parachuter 5 nouvelles équipes en phase finale, pour un total de 12 qui s’ajoute aux 4 qualifiées d’office. 16, le compte est bon. Simple comme bonjour.

Pour nos lecteurs les plus visuels, voilà à quoi cela ressemblait dans le cas de l’élimination du Servette FC Chênois Féminin au premier tour:

La présence d’une petite finale pour la troisième place est difficilement explicable autrement que par le fait qu’il fallait rentabiliser le voyage en Ecosse

Le site de l’UEFA n’y va pas par quatre chemins pour justifier la réforme que l’on vient de vous narrer: on veut augmenter le nombre de matches de 20% pour toucher plus de public (on jurerait avoir déjà entendu ça quelque part). Mission accomplie, même Carton-Rouge s’y est mis. Pas trace d’argument sportif par contre (vous admettrez que c’est bien accessoire dans le monde dans lequel on vit).

*Euh en fait pas tout à fait. Inexplicablement, deux de ces mini-tournois semblent avoir des équipes bénéficiant d’un bye au premier tour, et même pas systématiquement l’équipe recevante… Un papier-caillou-ciseaux a-t-il eu lieu en amont de cette décision cruciale ? Bref, voyez plutôt:

L’équité c’est pour les faibles.

La compétition

Comme on vous le disait, avant que la plupart des grands pays de foot masculin s’y mettent, il fallait plutôt être nordique pour devenir champion d’Europe et empocher un prize money maximal estimé à 1,4 million d’euros (au total) destiné au vainqueur (on ne vous dira pas que la Champions League masculine offre un maximum de 85 millions d’euros, ça gâcherait la fête). Depuis, Jean-Michel Aulas a fait office de pionnier du côté du Groupama Stadium lyonnais et quelques autres ont suivi. L’époque où la Brésilienne Marta, considérée comme la plus grande footballeuse de tous les temps, signait pour trois clubs suédois et participait avec eux à quatre finales de WCL semble aussi révolue que la jeunesse de Joe Biden.

La Coupe aux petites oreilles un peu décollées.

On avait failli oublier: évidemment que les clubs russes ne sont pas autorisés à participer cette saison, comme il se doit.

L’ambiance

Pas vraiment de raisons d’aller au stade, 61 rencontres sont retransmises gratuitement sur la chaîne YouTube de DAZN, détenteur des droits internationaux de la compétition. Et pourtant, ça a l’air de pas trop mal se passer quand même au niveau affluence, comme nous le rappelait notre collègue Florent Gonnet en mai dernier dans cet article consacré à la finale de l’édition 2021/2022.

32’257 spectateurs ont assisté à la dernière finale au Juventus Stadium.

En ce qui nous concerne, le simple fait que la finale 2011 (qui a opposé l’OL au Turbine Potsdam, qui d’autre ?) a eu lieu à Craven Cottage, avec lequel seul l’Ilfis peut rivaliser en termes de charme désuet et de vague crainte que les gradins s’effondrent sous notre poids, suffit à nous convaincre.

Rendez-vous dans deux jours pour la présentation des équipes !

 

Crédit photographique :

La Coupe aux petites oreilles un peu décollées: Steffen Prößdorf/CC0/Wikimedia Commons https://commons.wikimedia.org/wiki/User:Stepro

A propos Raphaël Iberg 174 Articles
"Chaque matin on prend la plume parce que l'on ne peut plus faire autrement sous peine de malaise, d'inquiétude et de remords." Maurice Leblanc

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