Saga des cartons rouges : le coup du coup de boule

Vous pensiez naïvement qu’on allait l’oublier celle-là ! Comment passer à côté d’une expulsion qui a marqué une génération entière et qui restera un des moments les plus mythiques de l’histoire du football tant il a été inattendu, dramatique et polémique. Retour sur le geste le plus fameux de ces dernières décennies du plus grand tournoi mondial.

Lieu : Olympiastadion de Berlin
Date : 9 juillet 2006
Match : Italie-France (1-1 ; 5-3 tab) finale de Coupe du Monde
Fautif : Zinedine Zidane
Victime : Marco MaterazziLe contexte :
On ne va pas vous la refaire. Ça n’a que 8 ans d’âge et, hormis votre petit neveu Enzo, prénommé ainsi par votre imbécile de frère pour faire comme Zizou, tout le monde s’en rappelle comme si c’était hier. Probablement une des trois images de ce début de millénaire, à montrer dans les écoles d’ici 20 ans avec les attentats du 11 septembre et le tsunami au Japon, le coup de boule de Zidane n’est plus à présenter.
Pour la faire résumé, c’est l’histoire de 23 français coachés par un type qui a des gros sourcils et que tout le monde déteste qui se retrouvent en finale après avoir galéré. Lors de la phase de poules, les hommes entraînés par le mec un peu arrogant, se font peur en débutant par un infect 0-0 contre une équipe de Suisse emmenée par un attaquant qui tire la langue avant de rater ses pénaltys. Dans la foulée, l’équipe dirigée par un bonhomme qui a une tête à demander sa femme en mariage en direct à la télévision obtient un second match nul face à une équipe asiatique qui a pour habitude de tricher lorsqu’elle joue chez elle, à domicile. Heureusement pour eux, les footballeurs encadrés par un type qui possède depuis quelques années une phobie aigue des bus gagnent face à une des plus nulles équipes africaines de l’histoire et se qualifient pour les huitièmes de finale. Après avoir été médiocres, les hommes managés par un gars qui a comme grande passion l’astrologie se révèlent et éliminent tour à tour les plus grandes nations du football, jusqu’à se retrouver en finale, chose tout à fait inespérée. Surtout lorsque l’on sait que cette bande de joyeux drilles est quotidiennement conseillé par un sélectionneur qui a pour habitude de se faire jeter des chronomètres à la figure.
En finale, face à eux, se présente une équipe d’Italie qui est, elle aussi, comme elle en a l’habitude, passée plusieurs fois proche de la correctionnelle. Au premier tour, c’est une qualification laborieuse obtenue dans la douleur dans un groupe plus difficile qu’il ne paraissait, notamment en concédant un nul face aux USA lors d’un match digne des meilleures boucheries. Alors bon, autant la Squadra Azzurra a spécialement le chic pour se brouter face à des adversaires jugés plus faibles notamment en phase de poules, autant les groupes dits difficiles conviennent généralement plutôt bien aux Italiens, ce qui est d’ailleurs de bon augure pour elle cet été. En huitièmes de finale c’est un hold-up retentissant obtenu à la dernière minute sur un pénalty inexistant face à … tiens une équipe jugée plus faible, l’Australie (mais qu’est-ce que je vous disais). En quart c’est un score fleuve de 3-0 relativement flatteur face à l’Ukraine. En demi-finale, pour ce qui reste probablement le match référence livré par l’Italie depuis 1982, c’est une victoire en prolongation au bout du suspens face à l’Allemagne, pays organisateur. Ce parcours tantôt laborieux, tantôt héroïque est également à replacer dans le contexte qui touche le football italien à cette période. En effet, le scandale des matchs truqués, le Calciopoli ébranle alors la Botte. Jamais aussi forte que lorsqu’elle est au pied du mur, les Azzurri parviennent à se hisser tant bien que mal en finale pour y affronter la France, un ennemi intime (surtout depuis l’Euro 2000) et c’est généralement là qu’elle se foire d’habitude.

Le match :

En ce soir du 9 juillet 2006, au Stade Olympique de Berlin ce sont donc une Italie et une France qui reviennent de loin pour s’affronter pour la première fois de l’histoire dans une finale de Coupe du Monde. Une finale qui s’annonce tendue, personne ne l’ignore Italie et France ont une certaine rivalité footballistique. Notamment les Italiens qui restent sur deux matchs amers face aux Français qu’ils n’ont toujours pas digérés (quart-de-finale de 1998 et finale de l’Euro 2000). Côté Français c’est une inespérable occasion d’effacer à jamais le fiasco de 2002. Comme quoi la France ne s’exporte décidément pas bien, mais alors pas bien du tout hors du Vieux-Continent ! On en conclura ce qui s’impose comme une évidence pour le Brésil cet été.
Une finale qui démarre sur les chapeaux de roues, puisqu’après 7 minutes de jeu l’arbitre argentin désigne le point de pénalty pour punir une faute pratiquement inexistante de Marco Materazzi sur Florent Malouda. La grandissime star Zidane transforme de manière un peu chanceuse en tentant une panenka audacieuse qui heurte la barre frappe le sol et rebondit à l’extérieur du but. Dans son ricochet, la balle a bien franchi la ligne, c’est l’ouverture du score pour les Bleus. On pense alors que l’Italie va avoir de la peine à s’en remettre et que, cauchemar ultime, la troupe au mec qui a des gros sourcils va remporter un deuxième titre comme c’était prédit dans une publicité mensongère datant de 2002. Que nenni, surgit alors l’impensable Materazzi sur corner pour placer sa tête et égaliser dix minutes après l’ouverture du score. Materazzi surnommé Matrix, un joueur dont une bonne moitié de l’Italie se fout de la gueule. Il est lent, il n’a pas l’air d’avoir inventé la poudre et surtout il est maladroit et commet parfois des fautes immondes. Pas du tout censé être titulaire au début du tournoi, le joueur de l’Inter profite de la blessure d’Alessandro Nesta, l’homme aux 3 blessures en 3 Coupes du Monde, pour se révéler. Buteur et sauveur en poules face aux Tchèques, expulsé face aux Socceroos en huitièmes, Materazzi devient également buteur en finale ! Mais il ne compte pas s’arrêter là !
La suite de la partie est nettement plus crispée, les occasions de but se font rares. Les Italiens touchent une fois la transversale par Luca Toni et sont dangereux sur coups de pied arrêtés grâce à Pirlo. Les Français se montrent menaçants sur quelques contres misant sur la vitesse de Henry, mais rien y fait les prolongations pointent leur nez. Durant les prolongations, Zidane se procure une occasion en or. Sur un centre de Willy Sagnol, le capitaine des Bleus envoie un missile de la tête que Buffon peut détourner en corner. Cette action a pour effet de mettre ZZ hors de lui, il semble péter une durite et entrer dans un état second. C’est alors que l’homme aux gros sourcils doit probablement regretter de ne pas avoir sélectionné Pascal le Grand Frère (pourtant il n’est pas Scorpion), l’homme aurait pour sûr été capable de calmer le capitaine français.

Les faits :

Dans l’enchaînement (bon il  y a quand même un changement de camp entre deux), le rugueux Materazzi se retrouve au sol, comme s’il avait été victime d’un geste d’humeur d’un de ses adversaires, chose qui lui est arrivé au moins 100 fois dans sa carrière. En tant que téléspectateur (eh non, je n’y étais pas…), on se dit que quelque chose de pas net a dû se passer; comme souvent en football rien de bien méchant. Et là, stupeur, on découvre le ralenti ébahi par ce qui s’est réellement produit… Après plusieurs minutes de flottement et de discussions animées entre joueurs, arbitres, juges de ligne et 4e arbitre (surtout), Monsieur Elizondo exclut le grand Zizou. Celui-ci termine sa carrière de footballeur professionnel de la sorte, une vraie sortie de rockstar. Par la suite les critiques vont bon train en France on pointe notamment du doigt le fait que la vidéo a été utilisée pour exclure le capitaine des Bleus, que Materazzi aurait insulté la sœur de Zidane (le monstre il a osé), qu’il aurait proféré de propos racistes ou encore qu’il aurait tenu des propos injurieux à l’encontre de Pitchou le fox-terrier de la famille Zidane. Bref, quoiqu’il en soit on n’a pas le droit de donner un coup de boule, sauf en cas de légitime défense et ce n’était visiblement pas le cas… A moins que Materazzi soit en réalité un alien ayant pris une apparence humaine depuis des années qui aurait menacé de détruire la Terre, dans quel cas on peut effectivement tolérer ce coup de boule qui a visiblement bien calmé l’infiltré de la planète Zogbi 14.
La suite c’est une défaite aux tirs aux buts pour les Français et un quatrième titre mondial pour l’Italie, avec le seul tir manqué de Trezegol, bourreau des Italiens six ans auparavant, tout un symbole. C’est également une chanson sur le coup de boule, des polémiques et des émissions exclusives spécial coup de boule « on va vous révéler ce qu’a réellement dit Materazzi » et même une statue. On a d’ailleurs probablement évité de peu la marque de vêtement « Coup-de-Boule ». Sans doute le geste le plus médiatisé de l’histoire football, le coup de boule de Zidane restera bien sûr dans les annales. Il faut dire que son auteur est tout de même un coutumier du fait. Pour exemple ce fameux soir de juin 1998, où Zizou alla s’essuyer les crampons sur le Saoudien Fuad Amin alors que la France menait 3-0 ! Il en résulte que le mythique capitaine des Bleus est un des deux seuls joueurs à s’être fait expulsé 2 fois en coupe du monde, égalant le Camérounais Rigobert Song. Au final, c’est probablement à ce moment précis que Zidane est devenu un grand du foot, capable de faire pencher des finales de coupe du monde d’un côté comme de l’autre, mais toujours de la tête quoi qu’il arrive.

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