Sur un terrain ressemblant au champ dans lequel auraient pissé des festivaliers si Paléo durait trois semaines, la Suisse a réussi à faire ce qu’il fallait. Même si dans l’absolu, « ce qu’il fallait » eut été planter douze goals pour rattraper le Portugal.
C’est la fin de l’été, tout le monde avait oublié la qualification pour la Coupe du Monde, entre ceux qui ont été choper des puces de canards au lac, ceux qui ont découvert « leur nouveau moi » dans une auberge de jeunesse de surf et yoga au Nicaragua et ceux qui ont ramené de sympathiques animaux de compagnie sur leurs poils pubiens après trois semaines en Asie du Sud-Est.
Et là on réalise que la Suisse est 4ème au classement FIFA, Xhaka est devenu un pilier à Arsenal, Seferovic plante but sur but à Benfica, Shaqiri ne se blesse plus de manière grave, les mecs jouent tous dans leur clubs et leurs clubs ne sont pas tous Antalyaspor. Ca donne un peu l’impression de se réveiller après une fête avec de nouveaux amis qui vous prennent dans les bras, deux femmes superbes dans votre lit, un panda qui sert des shots et de ne se rappeler de rien et se dire « Mais merde qu’est-ce qu’il s’est passé ? Ça devait être vachement bien ».
Cependant, un peu de réalisme froid et protestant s’impose. La Suisse n’est pas la quatrième meilleure nation du football, aucun fan, même ceux qui s’habillent en gardes pontificaux du Vatican dans les tribunes, ne pourra avoir la mauvaise foi de le nier. Le classement établi à la manière d’un ATP gonfle allègrement les points avec une série de victoires (dont une contre contre le champion d’Europe, ce qui fait « mot compte triple ») qui met la Nati dans une situation grotesquement flatteuse.
Et certes, Xhaka joue bien dans une équipe d’Arsenal qui patauge en ce début de saison, Shaqiri continue à aller au Macdo et Seferovic… eh bien Seferovic c’est un mystère. On était tous tellement persuadés que son transfert à Lisbonne allait être une gigantesque humiliation à user le banc que ses performances nous font presque croire à l’idée qu’il lui suffisait de jouer avec de bons coéquipiers pour montrer l’étendue de son talent. Mais attendons encore de voir les semaines qui viennent.
On a eu des problèmes de droit avec des agences de photos alors j’ai mis une image de Binturong parce qu’ils sont trop marrants.
Petkovic, lui, a vu son contrat prolongé cette semaine. Personnellement, je ne suis pas contre. Simplement, à nouveau, ce renouvellement intervient à un moment bizarre, en plein milieu d’une phase de qualification pas encore acquise. Mais rien que sa composition d’équipe de départ nous permet une fois de plus de donner raison à l’ASF quant à cet excellent sélectionneur (voir un bon vieux léchage de boules dans cet article). Ayant le bon goût de ne pas nous imposer Djourou, il lance Akanji. Fidèle à ses principes de ne pas faire jouer ceux qui sont en manque de temps de jeu dans leur club, il laisse l’immense Behrami sur le banc et tente Freuler. Ayant l’honnêteté d’admettre que tout talentueux que l’on puisse être, la MLS c’est quand même la MLS, il écarte Dzemaili pour laisser sa chance à Zuber. On pourra toujours rétorquer qu’en face, il y a l’équivalent d’un FC Echichens. Mais n’en déplaise aux sceptiques, Vladimir a quand même ce truc que de jeunes étudiantes en Lettres appelleraient « ce courage romantique obstiné », des alpinistes aventuriers appelleraient « ce non-renoncement face au danger » et des campeurs qui boivent du pastis appelleraient « des couilles ».
Et puis, il y a Saint-Gall. Un stade où les mecs ont construit le terrain en pensant qu’ils étaient à Abu Dhabi. Personne n’a envisagé qu’un terrain de foot pouvait être drainé là-bas. Oui je sais, vous avez tous pensé à Suisse-Turquie en voyant ça. Mais là c’était encore pire. Une véritable honte qui fera le bonheur des vidéos des médias étrangers pour se foutre de la gueule des pays du foot qui ne savent pas s’organiser. Les joueurs suisses, pleins de bonne volonté, sont freinés dans leurs ardeurs par cette parodie de pelouse qui condamne les Securitas à pousser des litres de flotte avec un racloir, une méthode aussi efficace que de manger une bière avec une fourchette. Les deux équipes essaient de jouer ce match mais les ballons rebondissent comme dans du sable. Les joueurs, craignant de se blesser, donnent l’impression de taper dans un Popples sur une serviette hygiénique géante après treize jours de règles de la femme de 50 pieds.
Un Popples c’est cette chose abominable si jamais (j’ai renoncé pour l’image de la serviette hygiénique pleine)
Pourtant, dans une situation qui flaire bon le vieux couac abominable, les hommes de Petkovic parviennent à gagner 3-0. Un but de Seferovic, un but manifestement pas valable de Seferovic selon Yves Martin qui ne perd pas une occasion de casser ma mauvaise foi et un but de Lichtsteiner, irréprochable ce soir, tout comme Shaqiri. Les deux starlettes souvent mal aimées de la Nati ont montré qu’on avait toujours besoin d’eux dans des moments critiques. Une victoire 3-0 contre Andorre dans ces conditions, c’est un peu comme gagner 1-0 contre… disons la Norvège ou la Bulgarie.
Dimanche la Nati affrontera la consternante Lettonie. Comme le goal average est impossible à rattraper face au prolifique Cristiano Ronaldo, ce ne sera que la victoire qui comptera. On espère voir le même état d’esprit de la part de joueurs qui ont quand même essayé de gagner ce soir. Et on ne le rappellera jamais assez mais, avec la Suisse, cela n’a pas toujours été le cas.
« …cette parodie de pelouse qui condamne les Securitas à pousser des litres de flotte avec un racloir, une méthode aussi efficace que de manger une bière avec une fourchette… » J’adore ! C’est vrai que c’était pathétique, quoique assez amusant aussi finalement, de voir ça ! D’ailleurs on se foutait de la gueule de nos amis Andorrois au match aller, rapport à leur stade désuet, mais là on a fait encore plus fort qu’eux, hier soir à Sanktrr-Grallenn !!