Et si on aimait Nick Kyrgios ?

Depuis quelques années déjà, Nick Kyrgios est le mouton noir du circuit ATP. Entre frasques en tout genre, manque de respect flagrant, pétages de plombs en règle et phrases et gestes franchement déplacés, Kyrgios exaspère le monde de la petite balle jaune au plus haut point. Mais paradoxalement, il possède également de nombreuses qualités qui font se poser une question : doit-on aimer ou détester l’Australien ? Puisqu’il est impossible d’être indifférent sur son cas, je vous propose une liste de 9 raisons (je fais un article sur Nick Kyrgios, tu pensais pas que j’allais me conformer à un top 10 quand même !? Le 10ème point était sur la chaise qu’il a balancée à Rome), en partie en toute mauvaise foi, qui devraient faire pencher la balance.

Il brise les codes du tennis (en plus de ses raquettes)

Les fans de ce sport sont souvent là pour le rappeler, « le tennis, ce n’est pas comme le foot. Ici on a un respect de l’adversaire, de l’élégance, de la classe, … » et je vous passe la suite de la branlette intellectuelle. Kyrgios n’en a rien à cirer non plus. Il fait son match, pète son plomb, gagne ou perd mais à sa manière. Il ne se pliera jamais au protocole, s’il n’a pas envie de faire quelque chose il ne le fera pas. C’est ce point qui énerve beaucoup mais que je trouve personnellement intéressant. Le monde évolue et le tennis avec, et Kyrgios fait en un sens partie de cette évolution. A titre personnel, je trouve que le tennis est un sport chiant au possible dès que les Suisses ne sont plus là, mais je vais quand même suivre le parcours de l’Australien pour voir ses plus beaux coups ou s’il refait des siennes. Il ne dénigre pas le tennis, comme certains l’ont dit (au passage, faut se calmer deux minutes, on ne dénigre pas un sport en faisant le con), il le change. Et les gens n’aiment pas le changement, surtout si celui-ci lance des chaises.

Il fait chier les puristes

Et Dieu sait que c’est agréable de faire chier les puristes, principalement ceux d’un sport aussi supposément élitiste que le tennis. On a tous une connaissance qui nous a tenu des théories pendant des heures sur le fait que « vu la façon dont Kohlschreiber tient sa raquette, il donne une rotation particulière à la balle ce qui devrait en toute logique poser problème à Djokovic », pour au final voir ce même Djokovic gagner 7-5 6-2 6-1. Eh bien ce teneur de théorie n’aime pas Kyrgios, qui a un jeu aussi imprévisible que fluctuant au gré de ses envies.

De plus, ces mêmes puristes sont les premiers à critiquer le kid de Canberra pour son comportement « qui est une honte pour le sport ». Le journaliste ou l’amateur de tennis impose souvent son avis négatif sur Kyrgios, mais d’une part ce dernier s’en cogne pas mal et d’autre je pense qu’il est l’un des rares joueurs de ce sport à être lui-même, sans faire de faux-semblants à la Djokovic pour être apprécié. Mais il arrive souvent que les donneurs de leçons n’aiment pas les gens qui sont eux-mêmes.

Il a l’un des jeux les plus spectaculaires du circuit

Lorsque Nick Kyrgios décide de s’intéresser au match auquel il est en train de participer, il possède l’une des plus belles palettes de jeu du circuit. Si l’on parle souvent de son service, tantôt surpuissant, tantôt à la cuillère, l’Australien sait varier le jeu comme peu de joueurs. Vous ne me croyez pas ? Voici une compilation parmi tant d’autres de ses coups les plus incroyables, qui n’ont parfois rien à envier aux plus grands de ce sport. Pour les fans de beau jeu, les duels Kyrgios-Federer sont souvent à ne pas rater ! Et conjuguez ce tennis spectaculaire à son attrait toujours plus prononcé pour le spectacle ou les pétages de plombs et vous verrez le public se masser pour venir voir le joueur d’origine grecque, sachant qu’il se passe toujours quelque chose dans ses matches.

C’est l’un des rares joueurs à pouvoir battre tout le monde

Découlant de son jeu qui frôle parfois le génie (même s’il touche par moment le néant également), l’Australien possède la faculté de pouvoir battre absolument n’importe quel joueur. Jugez plutôt : Si Kyrgios n’a battu qu’à une reprise Federer et Murray pour cinq défaites à chaque fois, il ne perd que quatre à trois dans les confrontations directes face à Nadal, fait trois partout contre Wawrinka et bat Medvedev et Djokovic deux victoires à rien ! On ne va pas parler en outre de ses statistiques plus que favorables face à la minable Next Gen et à ses représentants aussi charismatiques que la serviette blanche avec laquelle ils s’épongent le front en cours de match. Ces statistiques prouvent, s’il était besoin, que Kyrgios peut, s’il décide de s’y mettre, battre n’importe qui et ne craint personne. Cela démontre, aussi, qu’avec un peu de constance et de contenance il pourrait réaliser de grandes choses. Mais ce ne serait plus le même joueur.

Il critique l’ATP, Djoko et Nadal

Kyrgios est également connu pour avoir donné son avis sur à peu près tout et tout le monde et quand il le fait, il ne prend pas de gants. Si Roland-Garros et de nombreux arbitres ont notamment déjà ramassé, ce n’est rien en comparaison de ses critiques au sujet de l’ATP, la FIFA du tennis masculin. En effet, le joueur a déclaré récemment que l’instance était corrompue et que c’était systématiquement deux poids deux mesures concernant les sanctions des différents joueurs. Sachant que l’ATP n’est pas aussi polémique que la FIFA mais a quand même de jolis travers, difficile de lui donner totalement tort. Et ça ne fait pas de mal de voir un joueur un minimum critique et pas trop lisse en conférence de presse…

De plus, il ne fait aucun secret que, comme tout les suiveurs suisses de tennis, l’Aussie n’aime pas du tout Novak Djokovic ni Rafael Nadal. Popeye s’est fait allumer pour son manque de fair-play en cas de défaite, lui qui cherche en permanence une bonne excuse et critique souvent le joueur d’en face lorsqu’il ne gagne pas. Le Djoker, face à qui l’interprétation de Heath Ledger fait enfant de cœur en comparaison, s’en est quant à lui ramassé plein la gueule pour son attitude générale totalement hypocrite visant à se faire apprécier du grand public, lui qui n’a de loin pas la même aura que le Maître ni que le Majorquin plein de TOCs. En plus de cela, Kyrgios a dit que selon lui, Djokovic ne serait jamais plus grand que Federer, pour la simple et bonne raison que le Serbe n’a jamais réussi à battre le natif de Canberra. Comment ne pas l’apprécier ?

La tête de Djoko quand il voit qu’il tombe sur Nick au tirage au sort.

Il est le centre d’attention

Comme précédemment dit, Nick Kyrgios possède un pouvoir d’attraction qui remplit les stades. Les gens viennent le voir en quête de spectacle ou de quelque chose d’insolite et sont rarement déçus. Et quand il ne se passe rien durant un match, c’est qu’il garde ses smashes pour la conférence de presse ou pour son compte Twitter. L’Australien fait le bonheur des journalistes et du grand public et il le sait. Il a d’ailleurs récemment répondu à Pat Rafter, lequel regrettait que son cadet ne soit pas suspendu suite à ses tirades sur l’ATP, qu’il fait venir les gens au stade et gagner de l’argent aux tournois et que c’est pour cela que l’instance ne sévit pas plus. Si l’on repassera pour la modestie, on peut difficilement lui donner tort. Surtout à une époque où le tennis se cherche de nouveaux publics cibles.

Il est parfois franchement drôle

S’il est par moments imbuvable, l’Australien sait aussi mettre son vice au service de l’humour. Comme lorsqu’il joue au Bottle flip pendant les changements de côtés et qu’il a l’air plus concentré pour cela que pour son match. Comme lorsqu’il ramène les chaussures de Stefanos Tsitsipas en plein match et avec le sourire. Comme lorsqu’il trace le nom de Djokovic du t-shirt d’un fan de tennis qui voulait le lui faire signer. Comme lorsqu’il regarde un autre match pendant le sien. Ou encore comme lorsque, en pleine conférence de presse à Wimbledon, il reconnaît un journaliste qui était dans le même pub que lui lors de sa très médiatique soirée passée à siroter des ales dans la capitale anglaise. L’Aussie est toujours spontané et fait souvent sourire. Il apporte un brin de fraîcheur dans un sport qui en manque cruellement, notamment lors des interminables changements de côté durant lesquels les autres joueurs tentent délibérément de cacher leurs émotions. Kyrgios cherche en permanence à rendre moins sérieux un sport qui l’est devenu beaucoup trop.

Peut-être le moment le plus drôle de Kyrgios en 2019 : Quand il met en photo de couverture le doigt d’honneur polémique de Medvedev à New-York !

Il a un cœur immense

S’il est un aspect de l’Australien qui est souvent méconnu, c’est qu’il est très accessible et a surtout un cœur énorme. Ainsi, il n’a pas hésité à verser 50 dollars par ace en faveur des rescapés de l’ouragan Maria en 2017, ni à aider une femme en panne au bord d’une route en Australie, bien loin de l’image d’égoïste qui lui colle pourtant à la peau. Il s’est également signalé cet été pour avoir préparé un match… en jouant pendant plus d’une heure au ping-pong avec des enfants, ravis de partager ce moment avec une star du tennis ! Il possède du reste sa propre fondation en faveur des enfants défavorisés en Australie, qu’il finance notamment via la vente de ses T-shirts et de ses souvenirs personnels. Notons enfin qu’il s’est également impliqué dans la lutte contre le cancer par le passé. Contrairement à beaucoup de sportifs qui s’achètent une image en posant sur Instagram dans les hôpitaux ou dans des pays pauvres, Nick agit, pour une fois discrètement, mais fait des choses concrètes et positives. Et curieusement, on n’en parle que très peu.

Il s’en fout

Finalement, l’aspect que je trouve le plus remarquable chez Nick Kyrgios, c’est qu’il est lui-même. Il ne se considère pas comme une star. C’est l’un des rares joueurs du circuit qui discute volontiers avec ses fans en entrant sur le court et avec les staffs techniques des stades dans les vestiaires. Comme déjà dit, il prend volontiers de son temps, même en plein tournoi, pour l’offrir à des enfants qui ont les yeux qui brillent. Il est même allé jusqu’à demander, à plusieurs reprises, à des supporters de le conseiller sur comment servir le dernier point du match, avec un certain succès à la clé ! Il n’a d’ailleurs pas manqué de remercier chaleureusement ses entraîneurs d’un soir.

L’Australien est critiqué, souvent par des anciens joueurs (tantôt légitimes comme Rod Laver, tantôt par des tocards comme Marion Bartoli), souvent à raison ; mais aussi parfois salué, souvent par des joueurs actuels (Federer, Medvedev, …), souvent à raison également. Même le vrai Marc Rosset en est un contre-exemple et en dit du bien dans cette géniale interview. Mais au final, le natif de Canberra s’en fout, des critiques comme des louanges. Il ne cherche qu’à s’amuser et passer du bon temps sur le court et en dehors, même si parfois cela passe par toutes sortes d’excès. Nick Kyrgios n’est pas un joueur comme les autres. Il n’est pas formaté. Il est lui-même. Et c’est sûrement cela qui agace tant.

A propos Joey Horacsek 84 Articles
Bon ça va, je vais pas vous sortir ma biographie

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