La Superliga, une poule aux Europe

Après deux articles lors desquels je me suis penché sur des championnats asiatiques (chinois et nord/sud-coréens) j’ai décidé de changer de continent et de m’intéresser à un championnat plus célèbre que les précédents mais au sujet duquel j’ignorais tout de même de nombreuses informations. Aujourd’hui, je vous présente le championnat argentin.

Le championnat de première division argentine est appelé la Superliga Argentina de Fútbol et a été créé en 1891. Il est très célèbre à travers le monde pour différentes raisons dont certaines que nous allons voir dans cet article. Tout d’abord, il a toujours été classé dans les meilleurs championnats mondiaux selon l’IFFHS (International Federation of Football History & Statistics) dont une 3e place en 2008, derrière la Premier League (Angleterre) et la Serie A (Italie). De plus, il a la particularité d’être le plus titré internationalement avec 73 titres.

Le changement, c’est constant !

La structure du championnat argentin a changé à de très nombreuses reprises et n’a probablement pas encore trouvé sa formule de prédilection tant elle a été modifiée ces dernières années. Je vais tout de même tenter de vous présenter l’histoire de ce championnat le plus clairement possible. Après mon article sur la Coupe Intertoto, disons que ce n’est pas la première fois que je me frotte à une compétition qui a connu autant de changements de structure que Valon Behrami a connu de clubs.

Cet homme a quand même de quoi faire jalouser les dirigeants du football argentin. Le confinement risque d’être plus long que son passage au FC Sion. 

A ses débuts professionnels (1931), le championnat argentin était ouvert uniquement aux équipes issues de la ville de Buenos Aires et aux provinces de Buenos Aires et de Santa Fe. En 1967 il s’est progressivement ouvert à d’autres équipes du pays.  De ce fait, le championnat était divisé en deux phases qu’étaient Metropolitano (Ville de Buenos Aires et les provinces de Buenos Aires et de Santa Fe) durant la première partie de l’année civile, et Nacional (intégrant d’autres équipes du pays s’étant qualifiées) au cours de la seconde phase de l’année. Durant l’année 1980, Metropolitano devient le championnat de première division et d’autres équipes du pays y prennent part. Dès la saison 1985-1986, le championnat ne contient plus qu’une unique phase et la majorité des équipes du reste du pays jouent désormais dans une nouvelle division qu’est la Nacional B et dont les meilleures équipes accèdent à l’élite. Le calendrier du championnat est désormais calqué sur celui des championnats européens, c’est-à-dire deux semestres répartis sur deux années distinctes. Comme vous pouvez le constater, le football argentin était très largement centré à Buenos Aires et ses environs (jusqu’aujourd’hui), ce qui rend la tâche plus compliquée aux clubs issus d’autres villes du pays. Ce qui me fait penser à notre championnat national où le football est totalement dominé par ces maudits Suisses alémaniques.

Par la suite, l’Association du football argentin a décidé de mettre en place lors de la saison 1991-1992 deux tournois distincts que sont les tournois d’Apertura (ouverture) et de Clausura (clôture). Deux tournois au cours d’une saison ? Oui c’est exactement ça ! Lors de la première partie de la saison se joue le tournoi d’ouverture, puis lors de la seconde partie le tournoi de clôture. Chaque tournoi se déroule en matches simples (pas d’aller-retour) qui donnent deux champions au bout du compte. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, une réelle réflexion a eu lieu derrière cette décision. Ce système permet d’avoir deux champions au cours d’une année, alors il y un enjeu plus élevé à chaque match, des droits télévisuels vendus plus chers et plus de monde dans les stades.  Avoir le mot « Argent » dans le nom de son pays, ça se mérite ! A noter que ce système de tournois d’ouverture et de clôture n’est pas exclusif à l’Argentine. On le retrouve dans de nombreux pays d’Amérique latine (Mexique, Colombie, Uruguay, etc.) même si la formule varie selon le pays.

Au cours de l’année 2012-2013, les deux phases deviennent Inicial et Final puis une finale est désormais disputée entre les deux champions…

OK je vous ai perdus. On va se simplifier la tâche parce que les changements de structure en Argentine sont aussi fréquents que ceux au FC Sion. A ce jour, le championnat se joue avec un calendrier similaire au nôtre et il n’y a qu’un champion en fin de saison.

Malheureusement il faut que je vous explique encore une particularité de ce championnat. Je suis désolé de vous faire ça mais il le faut. Depuis 1993, il existe un système de moyennes qui détermine quelles équipes vont être reléguées en fin de saison. Et pour ce faire, ce système fait une moyenne des points engrangés au cours des trois dernières saisons (pour les équipes qui sont présentes dans l’élite depuis au moins 3 saisons). Dans le cas contraire, la moyenne est calculée en fonction du nombre de saisons passées en première division par une équipe. Ce système est vivement critiqué parce qu’il permet aux grands clubs d’éviter la relégation dans le cas d’une saison médiocre. En tant que Lausannois, je suis tout de même déçu de me dire que même ce système ne nous aurait pas sauvé la peau en Super League ces dernières années.

Une passion nationale

Sur le sol argentin règne une énorme passion pour le ballon rond et une immense ferveur pour les équipes locales. Cinq clubs sont considérés comme les « grands » : Boca Juniors, River Plate, Independiente, Racing et San Lorenzo. Ils sont issus de Buenos Aires et sa province, dominent nettement le football argentin (119 titres de champion) et regroupent la majorité des supporters du pays. River Plate domine historiquement le championnat avec 36 titres de champion mais devance de très peu Boca Juniors (34 titres). D’ailleurs, une énorme rivalité existe entre ces deux équipes (les deux plus célèbres du pays) dont la rencontre est nommée le Superclásico et est un des derbys les plus célèbres au monde, notamment pour son ambiance. En atteste l’annulation du match retour de la finale de la Copa Libertadores 2018 (équivalent de la ligue des champions en Amérique du Sud) où le bus de Boca Juniors avait été attaqué lors de son arrivée à l’Estadio Monumental de River Plate. Les joueurs de Boca étaient de vraies têtes de Turc ce jour-là, tout comme la Nati en novembre 2005.

J’aurais pu écrire tout un article sur ce que représente ce match, mais ce petit reportage tourné par Telefoot (2013) est assez démonstratif de l’ampleur de cet événement. Pas de crainte pour les âmes sensibles, les nombreuses insultes n’ont pas été traduites, c’est une émission familiale !

On trouve une ambiance exceptionnelle en Superliga et l’exemple le plus éloquent est celui de la Bombonera (Boca Juniors) dont Pelé disait « Je n’ai jamais senti un tremblement de terre comme celui-ci se produire » ou encore Romario qui assurait que « La Bombonera est la chose la plus proche de l’enfer ». Mon ami, viens voir un match à la Pontaise, tu verras ce qu’est réellement l’enfer dans un stade.

Certains d’entre vous vont probablement se demander comment on peut gaspiller autant de papier toilette en cette période. Un Argentin vous répondrait probablement « Le bidet mon ami ! Le bidet ! »  

Par ailleurs, je vous propose cet excellent article de Ricardo Accolla paru sur Carton-Rouge (2008) qui illustre à merveille ce qu’est le football à Buenos Aires.

Une pépinière pour l’Europe

La Superliga fait également parler d’elle par les grands joueurs qui y sont passés. Nombreux sont ceux qui ont débuté au sein du championnat local, avant de briller en Europe : Diego Maradona, Alfredo Di Stéfano, Javier Zanetti, Gabriel Batistuta, pour ne citer qu’eux. Pour ceux qui seraient surpris de ne pas voir Lionel Messi dans cette petite liste, c’est uniquement parce que je n’aime pas sa gueule… (et accessoirement parce qu’il est parti de Rosario à 13 ans). Et ce phénomène n’est pas près de prendre fin, à l’image de Lautaro Martínez, fraîchement débarqué en Europe (2018) et dont la valeur actuelle est estimée à 64 millions d’euros.

De plus, les joueurs argentins décident fréquemment de terminer leur carrière en Superliga, en témoignent Diego Simeone, Juan Sebastián Verón ou encore Carlos Tévez. Ce dernier, surnommé « le joueur du peuple », a décidé de revenir à Boca Juniors, son club formateur, après un bref passage en Chine où il aura autant fait gonfler son compte en banque (38 millions d’euros annuels) que sa panse. Néanmoins les Argentins ne sont pas les seuls à le faire comme le démontre Daniele De Rossi qui s’est engagé pour Boca Juniors l’été passé en expliquant qu’il ne pouvait pas terminer sa carrière sans avoir joué pour ce club.

Avec une telle « boca » peut-on considérer que la prise de poids de Tévez en Chine était surprenante ?

En conclusion, le championnat argentin est très intéressant bien que le niveau ne soit pas excessivement élevé du fait que les meilleurs joueurs argentins évoluent en Europe. Cependant, l’ambiance dans les stades et la ferveur des supporters sont d’assez bons arguments pour motiver n’importe quel amateur de football à se pencher sur ce championnat. Je vous préviens quand même que les matchs sont généralement diffusés aux environs d’une heure du matin… Avis aux amateurs !

A propos Bastien Ndo 13 Articles
Petit, j'étais un grand fan des blagues de Toto et de football. Du coup je me suis retrouvé chez Carton-Rouge.

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