Quand un Nico peut en cacher un autre

« Rodriguez coule l’AC Milan », « Shaqiri douché contre City », « Les gardiens suisses prennent l’eau ». Si les uns disent que l’eau est belle et surtout bonne pour la santé, les autres en déduiront que dans ces cas l’eau rouille bel et bien. A croire qu’avec une Feldschlösschen dans le nez, les rédacteurs pourraient aisément mettre à jour les nouvelles à propos des stars de l’étranger. Retour sur les perfs’ de nos joueurs suisses exilés, migrants, pérégrins ou mercenaires, parfois un peu trop délaissés sur la touche médiatique de notre pays.

Selon la presse nationale, force est de constater les dégâts causés par nos joueurs voyageurs. D’ailleurs, des psychologues l’affirment : il faut cinq bonnes nouvelles pour rattraper la bourde que t’as commise dans ton couple. Au final, que Xhaka touche 106 fois le ballon, réussisse 90% de passes, finisse homme du match avec les Gunners, que la modeste Atalanta (avec Freuler en dix!) étrille les riches d’Everton, que Zakaria soit le futur Viera, que Gaetano ait le même nom que Domenico Berardi, c’est pas le Pérou ? Quoi qu’il en soit, on est bien loin de la foire d’empoigne journalistique. Les bonnes nouvelles sont poussées sur le banc aux dépens de nos Suisses décidément sous la flotte. L’ennui leur a-t-il nui ? Un jour t’es bon, cinq jours t’es con.

Mais sapristi! Le pays veut en savoir plus. Et puis, le pain quotidien des Oberlin, Akanji & Cie ne suffit pas. Quelle passion pour la Super League si Dimitri n’en mettait pas 10 aux Portugais ? Si Constantin n’étrillait pas de temps à autre une Rolls-Fringer ? Bref, la réputation de notre championnat manquerait largement de piquant sans ces faits divers exceptionnels.

NICO ELVEDI LE MÂLE ADROIT DEVENU ARRIÈRE DROIT

Ce mois-ci, on prend la température du côté du jeune zürichois évoluant à Gladbach en Allemagne. Bien que récemment asphyxié 1 à 5 par les rivaux de Leverkusen, Nico Elvedi est devenu en un rien de temps une pièce clef de l’équipe de Dieter Hecking. C’est souvent quand on veut louer un joueur qui semble s’épanouir à une période précise, qu’il devient maladroit, comme lors de ce fameux match tout juste cité où il loupe une passe qui offre ensuite le 4e but à Leverkusen. La RTS aurait dû s’y attarder plus longuement.

Mais revenons à nos moutons et laissons de côté ce hic de 5 buts. Titulaire indiscutable depuis le début de la saison, Nico montre à ses concurrents à quel point sa place augmentera de valeur prochainement. A l’image de son excellente sortie à Hoffenheim le week-end dernier. Si bien que la presse allemande le qualifie de « Dauerbrenner ». D’homme tout bonnement régulier vois-tu.

Depuis la nomination du nouvel entraîneur Hecking, Nico a largement pris pied surtout en tant qu’arrière droit. Lui, qui a débuté en position centrale au FC Zürich, jouant même ensuite dans six positions différentes sous les ordres de l’ex-coach du Borussia André Schubert. Aujourd’hui, le jumeau de Jan Elvedi (oui maman, quand on réussit bien, autant en faire deux), qui évolue lui au FC Wohlen, a gagné en confiance dans l’équipe offensive des Poulains.

Vladimir Petkovic, le sélectionneur de la Nati, quant à lui le préfère pour l’instant en défense centrale. Notons quand même la précocité du joueur, tout juste 21 ans et 4 sélections, qui devra encore attendre avant de faire vaciller la paire Schär-Djourou ou douter l’infatigable Lichtsteiner sur le flanc droit. Quoiqu’après l’épisode lisboète des qualifications, Elvedi ne doit rien envier à Djourou, qui joue chaque fin de semaine dans le Kulübü imprononçable de l’Anatolie. Laissons lui ça, le championnat turc a le même nom que notre championnat, il a de la gueule. Djourou s’est-il trompé de pays ? Pensant peut-être qu’un club suisse allait lui verser les pécunes du richissime président Ali Safak Öztürk, à peine plus vieux que lui. Et puis le logo fait vaguement penser à un stylo statique ou fusée avec son équipage vétéran de Eto’o, Ménez et autre Nasri. Mercenaires, tu dis ? Parenthèse close.

Nul doute qu’un jour, le jeune Elvedi deviendra l’intouchable de la défense suisse, où qu’il joue, Dieu sait s’il sera capable de faire changer de bord un CR7, de rapercher Irina Shayk jusqu’à finalement enrôler André Silva comme témoin de mariage. Allez, pourquoi pas en Russie. On y croit.

UNE ORIGINE QUI EN A RENDU DUBITATIF PLUS D’UN

Joli coup de Gladbach, lorsqu’à l’été 2015, les Allemands allaient chercher un défenseur inconnu aux yeux de l’Europe, au nom d’Elvedi. Quand on pense que la saison qui suit son départ a vu le FC Zürich en fin de cycle, qui plus est relégué. Cette année-là, Nico Elvedi s’en est allé au même titre qu’un certain Oberlin, ce dernier en partance pour le Redbull Salzbourg en Autriche, club à qui il appartient encore aujourd’hui. Il est souvent difficile d’imaginer un Suisse de classe biberon s’imposer si vite au sein d’une écurie de Bundesliga. Prudence bonhomme, il faut savoir raison garder lorsqu’on décampe du bercail de manière aussi véloce. Mais le jeunot a relevé le pari tout en ripostant de plus belle. Bien aidé peut-être par un entraîneur amateur de talents helvètes dans son effectif, qui sait ? Depuis, le natif ambidextre zürichois accumule de l’expérience et les bonnes prestations, comptabilisant à ce jour quelques 70 matchs de première division allemande. Chapeau bonhomme, qu’il continue!

Il ÉTAIT UNE FOIS LE  FOOTURO FREULER

On pouvait réfléchir à cette comparaison l’été dernier, lorsque Nicolas Haas s’exilait lui aussi à l’étranger pour rejoindre Remo Freuler à Bergame en Italie. Formé au FC Lucerne, le milieu central de 21 ans n’a pas hésité à répondre aux appels du pied de son homologue suisse depuis la Lombardie. Une ville aux allures chevaleresques qui rappelle la vieille Italie médiévale telle qu’on se l’imagine.

Quoi de mieux, surtout si on sait que le premier des deux ex-Lucernois y a réussi. Titulaire régulier depuis la saison passée où l’équipe transalpine a terminé 4e de Serie A, Freuler est devenu un élément indispensable au dispositif de Gasperini. Nicolas Haas a certainement suivi de très près son évolution fulgurante. Si bien qu’il décide ainsi de tenter sa chance à 280 km de Lucerne dans le même club italien. « Freuler m’a dit que la Dea était une grande famille et que les fans étaient chauds » dixit Haas. A première vue, une décision qui paraît osée, tant son expérience au premier plan est frêle. Néanmoins, lointain semble le temps où Nici foulait les pelouses de la Kanti lucernoise et les équipes M17 de la cité. Chaque matin, à son arrivée au gymnase, Haas venait nous toucher la main, à nous mais aussi au restant du collège ou presque. Le gamin, sans cesse le sourire aux lèvres, la gueule ouverte aux punchlines les plus terribles de l’Alpenquai, à faire amenuiser les nerfs des profs aussi pète-secs que le canton. Naguère, l’ami lucernois possédait une technique au dessus de la moyenne, toujours au coeur du jeu, tant en salle de classe que sur le terrain, démontrant sa classe çà et là. Révolue l’équipe de la 4SA de laquelle lui et moi faisions partie, les pâtes de la gare à n’en plus finir, les siestes du cours de chimie de Rothenfluh, la cour à la belle Valentina. Il a débarqué, il a marqué, il s’est fait remarquer.

EN BALLOTTAGE AVEC L’ATALANTA

Un parcours a priori similaire à Freuler puisque lui aussi n’a pas connu un début évident avec sa nouvelle équipe. Haas est aujourd’hui dans une situation délicate avec la Dea noire et bleue. Après 11 journées de Serie A, même s’il a toujours été sélectionné, il n’a pas eu encore l’occasion de faire une entrée en jeu. C’est dire la concurrence présente au sein de l’effectif italien : 27 joueurs au total! De plus, la qualité y est excellente et c’est tout sauf pour nous déplaire. Gomez en pleine bourre est international argentin, Caldara et Spinazzola sont de jeunes pépites de la Juventus, Ilicic est ancien florentin, et j’en passe. Nul doute que l’occasion se présentera cependant pour le novice suisse.

Heureusement, Nico Haas a pu s’illustrer ce mois-ci sous les couleurs des M21 de Heinz Moser. Dernière échéance en date, la victoire 0-2 lors des qualifications pour l’Euro contre le Liechtenstein. Aux côtés d’Albian Ajeti et de Djibril Sow, le Lucernois semble avoir trouvé ses marques et surtout une place de titulaire en numéro six. Il y a soit dit en passant revanche à prendre contre le Portugal le 14 novembre prochain. A lui de saisir l’occasion de s’illustrer afin de remédier à son début de saison cahin-caha.

A propos Thomas Christen 27 Articles
C'est dans la chronique FOOTURO, chers lectrices et lecteurs, que vous en apprendrez plus sur les perfs' actuelles des athlètes suisses qui ont joué les mercenaires du monde. A vous de voir : footuro ou footu pour la Nati ?

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