« Letton », phonétiquement, ça veut quand même dire « deux fois moche »

Jouer contre des mecs qui donnent l’impression d’être aussi heureux qu’un gosse à qui on annonce qu’il va faire un échange linguistique dans la Ruhr à la place d’aller à Disney World, ça ne devait pas être facile. Pourtant, la Suisse a mis de côté son empathie et a fait ce qu’il fallait en remportant une jolie victoire.

D’abord il y a ces joueurs lettons, respirant la dépression avancée à devoir continuer à jouer au football après des défaites à répétition. Dans une époque où des Chypriotes, des Islandais ou des Luxembourgeois (oui, oui vous savez de quoi je parle) commencent à montrer un visage fier et combatif, la consternante Lettonie apparaît comme une équipe qui n’a plus du tout confiance en elle. Les visages sont paniqués, fatalistes, avouant, avant même de toucher le ballon, que c’est déjà foutu. Un peu comme un comptable qui aurait réservé ses deux semaines de vacances dans un club pour célibataires à Bali espérant enfin rencontrer des femmes et qui réalise qu’il tombe la même semaine qu’une sortie d’équipe de rugby et qu’une amicale de surfers. Un manque d’estime de soi qui fait vraiment peine à voir sur un terrain. Les joueurs lettons quand ils rentrent dans un bus et qu’ils entendent des gens rire ils se disent « Merde pourquoi ils se moquent de moi ? J’ai la braguette ouverte ? Je me suis pas coiffé ? »

Face à, sans doute, ce qui constitue donc une des nations les plus faibles d’Europe, Vladimir Petkovic avait décidé d’aligner son « onze idéal » bien traditionnel. Behrami, Djourou et Dzemaili reprenant leur poste et les jeunes et prometteurs Akanji, Elvedi ou encore Zakaria restant sur le banc. En même temps, le coach national n’a pas tort, on ne peut pas tout envoyer bouler comme ça du jour au lendemain même si certains cadres commencent à être en bout de course. Quand on rencontre une nouvelle personne plus jeune et plus attirante, on attend de voir si elle en vaut vraiment la peine avant de larguer sa conjointe qui commence à ne plus être de la dernière fraîcheur (ou « son » conjoint, ça marche dans les deux sens). Ça Vlado l’a bien compris. Quel renard ce Vlado.

Kermit et Gonzo.

Donc c’est l’équipe type de l’Euro 2016 qui démarre ce match. Elle le fait d’ailleurs d’une très belle manière. Seferovic ouvre rapidement la marque d’un but hyper habile et à nouveau, on se demande où est passé notre Haris, le vendangeur de l’extrême. A-t-il été échangé par un clone qui sait jouer au football ? A-t-il signé un pacte avec le diable en échange d’une place de trieur de noix en enfer ? A-t-il bêtement compris les règles du jeu et en fait, il a toujours été aussi bon mais était juste trop bête ? Quoiqu’il en soit « In Haris we trust » est un autre homme, et celui-là fait plaisir à voir. On espère vraiment qu’il restera avec nous (et que le vrai Haris Seferovic, coincé dans une cave, obligé de regarder en pleurant les performances de son clone à la télé par de sadiques extra-terrestres autrichiens restera enfermé à double tour). Grâce à lui et à Lichtsteiner, Shaqiri et Behrami surtout, la Suisse est en voie de livrer son match référence. Transition de ballon fluide, phases offensives menées rapidement, couloirs (surtout le gauche de Rodriguez et Mehmedi) dangereux et solides, le jeu de la Nati est enthousiasmant et on se prend à rêver que la Suisse peut effectivement bien être une des meilleures équipes d’Europe (mais pas la 4ème mondiale, il faut pas déconner).

Et puis ce penalty de Dzemaili à la Baggio va mettre un gros morceau de sable dans l’engrenage. En soi, son geste dilettante est emblématique du mal qui commence à envahir les joueurs suisses : un début de petite suffisance à deux francs (et non pas une suffisance à 1,4 milliard comme certains qui se demandent s’ils vont être champions du monde avant de ne pas battre le Luxembourg). A partir de ce penalty, les choses commencent à aller bien plus mal. Les ballons se perdent trop vite, les gestes sont imprécis. Et la Suisse se retrouve même à se faire peur face à des adversaires qui, jusque là, avaient l’air aussi concernés par l’enjeu qu’une assemblée d’eunuques dans un cours de sensibilisation à la contraception. Le danger de se sentir trop beau, trop fort sonne comme un bon avertissement. Ce n’est pas parce qu’on danse en slip dans son salon qu’on est Beyoncé et ce n’est pas parce qu’on enchaîne quatre passes qu’on est le Barça.

À gauche le pied de l’ancien Seferovic. À droite ceux de son clone.

Heureusement, cela ne dure que jusqu’à la pause. Le temps pour Petkovic de remonter quelques bretelles. Le temps pour nous, pauvres téléspectateurs de nous farcir la collection des plus affligeantes publicités que notre Seigneur a créé (si tant est que Dieu soit Suisse allemand).

On ouvre les festivités avec ce pauvre Thomas Lüthi, faisant la promotion d’une app de paris sportifs, à qui on a forcé à péniblement parler en français comme s’il avait trois neurones et, parce que comme on l’a sous la main et qu’on pourrait l’humilier encore un peu, on le place sur une toute petite moto. Ça a tellement fait rire en Argovie, il n’y a pas de raison que ces débiles de Romands ne trouvent pas ça lustig aussi. On retrouve ensuite les aventures interminables de la vache et du footballeur qui boivent du lait et qu’on se farcit depuis 1994. Puis, on monte en puissance avec ce chef d’oeuvre de misogynie beauf pour la chaîne MySports (mention spéciale au gag avec le mec qui ne peut pas voir la télé à cause de sa connasse de femme qui se met devant comme toutes les connasses de femmes le font tout le temps c’est bien connu) et son speaker nous expliquant avec un jeu d’acteur digne de Fred et Jamy qu’il s’agit de la nouvelle chaîne de sport pour les fans (donc nous, les beaufs misogynes avec nos connasses de femmes). Et enfin, vient le spot qui est déjà un classique… l’oeuvre prodigieuse que nous offre Swiss. Non mais sérieusement qui est le pervers qui a pu toucher sans doute une somme astronomique pour livrer cette merde avec un pilote d’avion d’Appenzell qui nous souhaite de regarder un bon match depuis le hublot ?! Il y a un gars qui a proposé cette idée et les gens du marketing chez Swiss ont dit « Oh génial ». Moi je ne rentre pas dans un avion où le pilote me dit, en plein vol, qu’à ma gauche « il y a une cholie match ».

Passé cet interlude, les Suisses reviennent sur le terrain. Vladimir a fait son boulot et les joueurs sont bien plus concernés. Pour ainsi dire, ils maîtrisent allègrement la partie. Un but de Dzemaili (qui lui sauve sans doute sa place au prochain match) sur une passe du clone de Seferovic et un penalty de Rodriguez achèvent les boîtes de Xanax des Lettons. Malgré quelques éléments loin d’être parfaits (la complicité entre Shaqiri et Dzemaili est un fiasco), et une crise de petit bébé de la part de Xhaka, trop fâché d’être sorti, la maîtrise collective et le score sont vraiment des motifs de satisfaction. Certes, ce soir, ce fut contre une équipe de Lettonie qui est au foot ce que la Guggenmusik est à la Renaissance italienne mais voir le besogneux Behrami toujours en train de racler le moindre ballon, Djourou être franchement solide et un Zakaria qui fait une entrée pleine de promesses cela fait plaisir pour la suite.

Avec une équipe qui va enfin pouvoir construire une défense centrale avec ses jeunes joueurs, une attaque qui n’aura pas une vilaine gueule si Embolo revient aussi en forme, deux gardiens de grande classe et un milieu qui sera solide si Behrami tient encore sur ses jambes un moment et que bébé Xhaka confirme en Angleterre… et ben ça ferait bien chier de perdre un vieux barrage et de ne pas aller en Russie. Oh que oui. Surtout qu’avec deux matches nuls, ça serait OK.

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