Vuelta 2019 : étapes 1 à 9

First Stage

Après le Giro et le Tour de France, la Vuelta est le troisième Grand Tour de la saison cycliste. C’est quelque part aussi le dernier gros rendez-vous de vélo avant l’automne, la fin de saison et la dépression de l’hiver. Toujours dans l’attente de récupérer ma jambe droite fracassée stupidement à bicyclette il y a 3 mois au Pays basque en consultant un SMS captivant de mon rédac’ chef (et donc de visualiser autre chose à l’horizon que cet infâme col du fémur que je n’arrive décidément pas à finir d’escalader…), je me suis donné comme objectif de vous relater un Tour d’Espagne particulièrement indécis cette année. Attention chaud devant !

1. Salinas de Torrevieja –> Torrevieja : 13,4 km (c.l.m par équipes)

Le Tour d’Espagne s’élance des salines de Torrevieja par un contre-la-montre par équipes. Voulant toujours concurrencer davantage le Giro et le Tour de France, les organisateurs de la Vuelta offrent un décor lunaire en hors-d’œuvre. Si le cadre est comme souvent spectaculaire, le tracé n’est lui pas des plus sécuritaires. 17 équipes sur 22 le parcourent cependant sans encombre… avant qu’une piscine gonflable n’explose et n’inonde la chaussée dans un virage aveugle. L’équipe UAE est la première à en faire les frais puisque six de ses coureurs se retrouvent violemment projetés au sol. Grande favorite du chrono comme de la Vuelta, la formation Jumbo-Visma part à son tour à la faute quelques minutes plus tard. Évitant le jeu de quilles, Astana l’emporte. Son leader Miguel Angel Lopez se pare d’entrée du maillot rouge de leader.

Alberto Contador, invité d’honneur déguisé en taureau, s’essaie au flamenco au départ de la Vuelta.

2. Benidorm –> Calpe : 199,6 km

Initialement promise aux sprinteurs, l’étape s’emballe à 28 kilomètres de l’arrivée dans la bosse hyper sélective de Puig Llorença. Débarrassé de son leader Romain Bardet en dépression après son Tour de France catastrophique, Pierre Latour accélère en compagnie de Formolo et Valverde. Une échappée royale se forme 10 kilomètres plus loin avec Roglic, Uran, Aru, Roche, Nieve et Quintana. A la surprise générale, ce dernier attaque en plongeant sur Calpe et franchit la ligne en vainqueur avec 5 secondes d’avance sur ses compagnons d’échappée. Pour sa dernière course chez Movistar avant de rejoindre la maison de retraite Arkéa-Samsic, Nairoman part piquer une tête dans la Méditerranée et dédie son succès aux personnes âgées bronzant sur les plages de la province d’Alicante. Alejandro Valverde, co-leader de son équipe à 39 ans et régional de l’étape, prend son coup de boule en plein buffet.

3. Ibi Ciudad del Jueguete –> Alicante : 188 km

Si Quintana a remporté la veille une étape inattendue pour se placer d’entrée de jeu idéalement au classement général, c’est Nicolas Roche qui parade en rouge dans la Communauté de Valence. Équipier modèle en juillet au Tour, le vieil Irlandais de la Sunweb bénéficie de davantage de liberté sur la Vuelta où ses leaders ne daignent souvent pas se rendre par fainéantise. Tom Dumoulin, trop occupé à signer un juteux contrat avec la Jumbo-Visma, ne déroge pas à la règle. A Alicante, un autre Irlandais surgit au sprint en la personne de Sam Bennett. Barré par Paul Ackermann au Giro et Peter Sagan au Tour de France, Bennett fait enfin valoir ses droits chez Bora-Hansgrohe qu’il s’apprête lui aussi à quitter.

4. Cullera –> El Puig : 175,5 km

La Vuelta remonte à toute vitesse le long de la Méditerranée vers la Catalogne. Steven Kruijswijk, fantomatique troisième du dernier Tour de France, abandonne, n’ayant pas récupéré de sa chute causée par la fameuse piscine gonflable percée comme un ballon de baudruche le premier jour. Deuxième pour 2 petites secondes du chrono inaugural de Torrevieja derrière Astana, la Deceuninck-Quick Step prépare la riposte. Elle envoie Rémi Cavagna seul à 5 kilomètres de l’arrivée, obligeant les autres équipes de sprinteurs à travailler prématurément. Fabio Jakobsen en profite et offre au Wolfpack sa première victoire d’étape sur cette Vuelta, pour moins d’un boyau sur Sam Bennett, au Puig, où Alejandro Valverde reçoit une bien curieuse bénédiction.

L’arc-en-ciel, le pape, l’anti-dopage et 2 policiers au Puig ou le résumé des 20 ans de carrière de Valverde.

5. L’Eliana –> Sierra de Javalambre : 170,7 km

La première étape de montagne voit une échappée surprenante aller à son terme. Composée de coureurs de seconde zone, elle consacre Angel Madrazo, le meilleur grimpeur de ce début de Vuelta évoluant sous les couleurs de Burgos-BH. Recalé chez Movistar, ce dernier fait le mort dans l’ascension finale du Javalambre pour mieux surprendre ses deux compagnons d’échappée dans le dernier kilomètre. La marque BH représentée habituellement par les losers d’Arkéa-Samsic au Tour de France accède à la gloire sur cette Vuelta. Derrière, Superman Lopez fait la java pour récupérer le maillot rouge. Roglic et Valverde limitent bien la casse tandis que Quintana montre déjà d’inquiétants signes de faiblesse.

6. Mora de Rubielos –> Ares del Maestrat : 198,9 km

Humilié la veille au Javalambre par Madrazo, José Herrada a beaucoup pleuré dans l’aire d’arrivée en repensant à cette étape improbable qui aurait pu boucler de façon admirable sa carrière de gregario. Vers Ares del Maestrat, son frère Jesús prépare la vengeance des Herrada. Il suit Dylan Teuns dans le col d’Ares qui s’envole vers le maillot rouge et le règle au sprint sans pitié, comme il l’avait déjà fait en juin avec le pauvre Romain Bardet sur le Mont Ventoux Dénivelé Challenges. En souffrance au Tour depuis dix ans, l’équipe Cofidis marche toujours mieux sur la Vuelta. Derrière, Tadej Pogacar montre les dents pour la première fois dans le Maestrazgo. Il ne reprend que deux secondes aux favoris mais ces derniers sont prévenus qu’à 20 ans, le jeune Slovène ne fait déjà pas de complexe.

7. Onda –> Mas de la Costa : 183,2 km

La traversée de la province de Castellón est des plus meurtrières. L’équipe EF Education First, qui a déjà perdu Rigoberto Uran et Hugh Carthy sur chute la veille, voit Tejay Van Garderen abandonner à son tour. Les grands favoris ne donnent cette fois-ci aucune chance de réussite aux échappées afin de pouvoir se disputer la victoire d’étape entre eux. Dans le mur final de Mas de la Costa, Quintana attaque à plusieurs reprises et met son vieux capitaine de route Valverde au supplice. Ce dernier recolle à l’arrachée pour s’offrir au bout des 4 kilomètres à 12% de moyenne un triomphe prestigieux devant Roglic, Lopez et son prétendu équipier Quintana. En conférence de presse, Movistar manie toujours plus l’ambiguïté sur la stratégie autour de ses deux leaders.

8. Valls –> Igualada : 167 km

Au départ de Valls, pas de trace de Manuel. Cette Vuelta est à l’image des partis socialistes européens, c’est-à-dire en décomposition. Entre monts ibériques et Pyrénées, l’étape de transition en Catalogne profite à de nouveaux fuyards. Sous la pluie de Igualada, c’est Nikias Arndt qui s’impose devant un Alex Aranburu inconsolable. Nicolas Edet profite de cette échappée fleuve pour s’emparer à son tour du maillot de leader. Meilleur grimpeur de la Vuelta 2013 pour sa dernière venue ici, le coureur de Cofidis sait comment faire en Espagne. Derrière, le peloton fait du cyclotourisme pour éviter les chutes dans la descente du port de Montserrat et récupérer un peu avant la grande bagarre du lendemain dans les Pyrénées andorranes. Superman Lopez se frotte déjà les doigts.

Maillot vert sous le déluge pyrénéen, Nairo Quintana rappelle bien qui est le chef chez Movistar.

9. Andorra la Vella –> Cortals d’Encamp : 94, km

L’étape reine de cette Vuelta se court en Andorre avant la première journée de repos. Miguel Angel Lopez démarre dès le col de la Comella mais un violent orage de grêle éclate à 10 kilomètres de l’arrivée. Parti pour assommer la course, Superman chute le long du lac d’Engolasters dans la partie en terre rendue extrêmement glissante par les intempéries. Comme au dernier Giro, il aurait voulu frapper un spectateur qui le narguait au sec, en bermuda, un cigare au bec, sous un parasol. Rattrapé par les autres favoris, le leader d’Astana doit se résoudre à les laisser filer, diminué par son coude gauche ensanglanté. Sous le déluge, Quintana accélère ensuite avec Pogacar dans sa roue. Alors que Marc Soler, échappé depuis le départ, va logiquement gagner l’étape en solitaire, Movistar le fait relever à 3 kilomètres du sommet afin qu’il attende son leader colombien en poursuite. Tadej Pogacar n’en demandait pas tant. Il contre les deux Movistar et s’en va décrocher à 20 ans sa première victoire dès son premier Grand Tour aux Cortals d’Encamp. Fier d’avoir fait perdre l’étape du jour à son équipe qu’il quittera en fin de saison, Quintana bombe le torse en enfilant le maillot rouge de leader devant Roglic, Lopez et Valverde respectivement à 6, 17 et 20 petites secondes au classement général. La deuxième partie de Vuelta s’annonce aussi serrée qu’explosive.

A propos Thierry Bientz 47 Articles
Après avoir parcouru 250 000 kilomètres à vélo en 20 ans, j'ai décidé de prendre un peu la plume pour raconter le cyclisme...

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1 Commentaire

  1. Sur l’étape 9, la stratégie de Movistar, pro Valverde, est tellement risible…
    Ca fait 3ans qu’ils veulent faire gagner le papy dopé. Quintana a bien plus de chance de gagner..
    Enfin bref

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