Tour de la Provence 2021

L’année 2021 commence comme 2020 s’est refermée : la majorité des courses de vélo sont reportées voire annulées. Il n’y a finalement qu’en France qu’on arrive à courir malgré la pandémie de coronavirus, prouvant une nouvelle fois que nos voisins gaulois ont toujours eu réponse à tout en temps de crise. Par conséquent, les meilleurs coursiers ramènent leurs guiboles et leurs fioles en région PACA, avec en premier lieu le champion du monde Julian Alaphilippe qui effectue là une rentrée remarquée. Pendant que l’équipe Ineos pose des mines à tout-va sur le Ventoux enneigé, le maillot arc-en-ciel exploite toutes les opportunités entre Aubagne et Salon-de-Provence. Résumé de ces quatre jours de course intense…

Alaphilippe, Ciccone et Moscon : échappée royale dès la 1ère étape vers Six-Fours-les-Plages.

1. Rentrée inédite pour Julian Alaphilippe en Provence

Habitué à débuter ses saisons sous le soleil d’Amérique du Sud, Alaphilippe a cette année choisi les routes de France pour démarrer, une première depuis 2016. Le Tour de la Provence n’est cependant pas un choix effectué par hasard. Marion Rousse, sa compagne avec qui il attend prochainement un enfant, est directrice adjointe de la course. Les bons comptes faisant les bons amis, tout le monde s’y retrouve dans cette opération marketing en ces temps moroses. Non content de dynamiter la course, Julian rentre tous les soirs à l’hôtel avec un énorme sac à dos isotherme contenant probablement de la nourriture qu’il distribue ensuite gratuitement aux gens ne pouvant se ravitailler dans les supermarchés à cause des horaires contraignants du couvre-feu. A moins que l’exilé fiscal andorran ne préfère y cacher à l’intérieur les derniers produits magiques lui permettant de gravir maintenant le Mont Ventoux jusqu’au Chalet Reynard sous la demi-heure dans le sillage des grimpeurs colombiens…

On ne sait pas et on ne veut pas savoir à vrai dire. Sur ces quatre jours de compétition, on constate surtout qu’Alaphilippe aura fait la course tous les jours. Échappé le premier en compagnie des Italiens Ciccone et Moscon, il lui manque deux bornes sur le bord de mer, à Six-Fours-les-Plages, pour aller au bout. Le deuxième jour, il chute dans le dernier kilomètre en roulant sur Vlasov alors qu’il était le grand favori de l’arrivée en bosse à Manosque. Le troisième, il est le seul à tenir tête sur le Ventoux aux Ineos emmenés par Ivan Sosa et Egan Bernal. Le quatrième et dernier jour, il empoche encore trois secondes de bonifications pour doubler in extremis Bernal au classement général. Grâce à cette manœuvre, Alaphilippe s’intercale sur le podium final entre les deux Colombiens de l’armada britannique. Soit une fin de semaine plutôt réussie en Provence pour l’actuel champion du monde !

En 2021, Alaphilippe est à la fois champion du monde et coursier chez Uber Eats…

2. Les Grenadiers d’Ineos dominants d’entrée

Depuis l’arrivée du COVID-19, la pénurie de courses rehausse depuis maintenant huit mois systématiquement le plateau des différentes compétitions réussissant à se maintenir au calendrier par le biais d’une organisation sanitaire implacable. Il n’y a donc plus de petites courses ni de petits vainqueurs. Les grosses armadas du World Tour ont pris pour habitude d’envoyer systématiquement leur dream team sur le peu d’événements auxquels elles participent. Sur l’Étoile de Bessèges disputée la semaine précédent ce Tour de la Provence, les Grenadiers d’Ineos ont démarré en fanfare en remportant deux étapes sur cinq avec leur machine à rouler Filippo Ganna, tout en finissant parallèlement deuxième du classement général grâce à Michal Kwiatkowski.

A l’intersaison, les hommes de Dave Brailsford se sont encore renforcés en recrutant Laurens De Plus (équipier modèle chez Jumbo-Visma), Adam Yates (maillot jaune pendant quatre jours et 9ème du TDF 2020), Richie Porte (3ème du TDF 2020) , Tom Pidcock (la nouvelle star montante) et Daniel Felipe Martinez (vainqueur du Dauphiné et d’une étape du TDF 2020). Ineos peut maintenant se targuer de présenter au départ de n’importe quelle course par étapes sept gars capables de remporter le classement général en fonction des aléas. Alors, lorsqu’on attend Egan Bernal démarrer sur les pentes abruptes du Ventoux, c’est Ivan Sosa qui sort de sa boîte. Le lieutenant de luxe écœure la concurrence sur le Géant de Provence, y compris son propre leader et compatriote Egan Bernal, trop occupé à toiser Julian Alaphilippe du regard, avec qui il traîne un contentieux depuis le Tour de France 2019, où les deux hommes se sont écharpés pendant trois semaines à la conquête du maillot jaune.

Après quatre jours de course, Sosa l’emporte devant Alaphilippe et Bernal à Salon-de-Provence sous les applaudissements inexistants du public convié à rester chez lui devant sa télé et Patrick Chassé. En deux courses disputées sur le sol français, l’équipe Ineos aura donc placé trois coureurs différents sur le podium final. Et dire que les hommes en noir n’ont pas encore fait courir en compétition cette année leurs leaders Richard Carapaz, Geraint Thomas, Tao Geoghegan Hart ou Rohan Dennis… Les sélections à établir pour les plus grandes compétitions du calendrier comme le Giro d’Italia ou le Tour de France s’annoncent difficiles à effectuer. Chris Froome ne sera lui pas concerné par ces choix puisque l’ex-leader emblématique de l’armada britannique a rejoint cet hiver, à 35 ans, la jeune équipe Israel Start-Up Nation toute dévouée à sa cause. Pas con le Kényan blanc !

Toujours une bonne idée d’organiser une course cycliste sur le Mont Ventoux en février !

3. Le Ventoux ne dépasse pas le Chalet

Les organisateurs voulant toujours rajouter de la visibilité et du sensationnel à leurs évènements, le Tour de la Provence s’adjoint les services du Mont Ventoux pour la deuxième année consécutive. Mais en février, la route est enneigée et l’accès au sommet évidemment impossible à vélo. Pas grave, l’étape reine s’achèvera au Chalet Reynard, soit un peu plus de six kilomètres en contrebas du Géant de Provence.

Cette stratégie de communication ressemble à annoncer la présence exceptionnelle de Scarlett Johansson en bikini sur la lune… et à finir classiquement avec Marion Rousse en imperméable dans la neige. C’est survendu et ça sonne faux. Pour preuve, la soi-disant étape du Ventoux se résume à une course de côte où même Julian Alaphilippe parvient à garder les roues des grimpeurs colombiens descendant tout droit de leurs montagnes perchées à 3000 mètres d’altitude. En haut, « Alaf » reçoit évidemment un bisou de Marion et non de Scarlett. La supercherie s’arrête là. Vivement cet été que le Tour de France se pointe ici pour de vrai !

A propos Thierry Bientz 47 Articles
Après avoir parcouru 250 000 kilomètres à vélo en 20 ans, j'ai décidé de prendre un peu la plume pour raconter le cyclisme...

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