Paris-Nice 2021

Absent en 2020 pour cause de déferlement de COVID-19 sur l’Europe, Primoz Roglic aura cette année écrasé Paris-Nice avec trois succès d’étapes à la clé… avant de chuter deux fois le dernier jour et d’abandonner la victoire finale au tenant du titre Maximilian Schachmann. Après avoir déjà laissé filer l’an passé le Dauphiné sur chute puis le Tour en s’effondrant la veille de l’arrivée, l’empereur slovène aurait-il du mal à terminer ses courses en France ? La réplique vaut également pour l’équipe Ineos, transparente après les cabrioles prématurées de ses deux leaders Richie Porte et Tao Geoghegan Hart. Dans une Course au soleil qui ne sera une nouvelle fois encore pas arrivée à Nice à cause du confinement, on retiendra également la révélation au plus haut niveau de nos deux jeunes coureurs suisses Stefan Bissegger et Gino Mäder.

Le réchauffement climatique permet à Roglic de rouler en cuissard court dès la mi-mars…

1° Roglic n’arrive pas à finir ses courses en France

Avec Primoz Roglic, c’est toujours plus ou moins la même rengaine depuis deux ans. Le Slovène se pointe au départ de chaque épreuve à laquelle il participe en tant que favori numéro 1. Sur la route, son équipe Jumbo-Visma cadenasse la course comme la formation Sky le faisait lors de la dernière décennie, un modèle directement copié sur l’US Postal de notre cher et brave Lance Armstrong. À la différence de la Sky et du grand imposteur américain, Roglic a pris pour habitude de s’effondrer dans le money time, ce moment critique qui s’apparente aux arrêts de jeu en football ou au tie-break du cinquième set en tennis (toute allusion à la dernière finale de Wimbledon opposant le plus grand sportif de tous les temps à un vulgaire coton-tige restant évidemment fortuite).

Sur ce Paris-Nice, le numéro 1 mondial se pointe au départ dans les Yvelines sans le moindre jour de course dans les jambes. Si Roglic n’a pas encore couru en compétition en 2021, il a passé un mois cet hiver à Tenerife, à 2300 mètres d’altitude sur le volcan Teide, perché au fameux hôtel Parador qui a acquis sa célébrité il y a une vingtaine d’années grâce à un certain… Lance Armstrong. Avec la crise sanitaire qui paralyse le monde depuis un an déjà, les contrôleurs antidopage sévissent à la même fréquence que les contrôleurs aériens voient décoller des avions. C’est par conséquent la fête à tous les étages pour ceux disposés à enfreindre les règles. Les performances depuis un an de Roglic et de toute son équipe Jumbo-Visma, comme celles de son compatriote Tadej Pogacar, apparaissent clairement stratosphériques. Des records d’ascension tombent sur chaque course sans que personne ne s’offusque de quoi que ce soit. Jusqu’à quand ?

Sur la Course au soleil, Roglic est évidemment largement au-dessus de la mêlée toute la semaine. S’il laisse par courtoisie le contre-la-montre de Gien à la concurrence, il écœure tout le monde le lendemain vers Chiroubles, dans le Beaujolais. Pas allergique au bon vin français, il remet ça deux jours plus tard à Biot au sprint et surtout samedi dans la grande étape de montagne arrivant à la Colmiane. Pour ce faire, il déboite ce pauvre Gino Mäder, dernier rescapé de l’échappée matinale, à moins de 100 mètres de l’arrivée. Le jeune Suisse avouera, dépité : « Roglic m’a passé tellement vite que je crois que je vais avoir froid demain matin. Sur le moment, j’étais proche de pleurer. C’était ma victoire… »

Cette gloutonnerie coûtera cher au Slovène le dernier jour dans l’arrière-pays niçois. Si le peloton l’attendra sur sa première cabriole lui arrachant tout le côté gauche de son cuissard dans la descente de Levens, il n’en fera pas de même sur sa deuxième cascade au tour suivant. Son équipe Jumbo qui avait tout maîtrisé jusqu’à présent se liquéfiera inexplicablement dans le final au moment de le ramener sur la tête de course. En effet, le numéro 1 mondial viendra mourir à moins de cent mètres de la queue du peloton avant de rabattre définitivement les ailes. Malgré trois victoires d’étape et une domination sans partage toute la semaine, il laissera échapper ce Paris-Nice 2021 comme le Dauphiné et le Tour de France 2020 pour des raisons sensiblement similaires. Alors comme ça, Primoz n’aimerait-il pas la France ?

2ème Paris-Nice de rang pour Max Schachmann sous l’œil attentif d’un bouvier bernois.

2° Maximilian Schachmann, le doublé sous COVID-19

Les années se suivent et se ressemblent pour Maximilian Schachmann. Deuxième Paris-Nice couru sous COVID-19 et deuxième victoire de rang pour celui qui réussira vraisemblablement le triplé ici-même l’an prochain si l’Union Cycliste Internationale valide une troisième saison de vélo avec comme seul public des vaches charolaises et des bouviers bernois sur le bord de la route.

Si Schachmann avait paradé en jaune toute la semaine en mars 2020 avant que ne soit prononcé l’arrêt des courses et la fin du monde pour une durée indéterminée, il aura avancé masqué cette année dans l’ombre de Roglic. Régulier comme souvent sur les épreuves d’une semaine, le leader de Bora-Hansgrohe allait finir premier des outsiders derrière le cannibale slovène… avant que celui-ci ne parte inexplicablement à la faute dans la dernière heure de course.

Les malheurs du numéro 1 mondial vers Levens, nouveau lieu d’arrivée pour éviter le confinement sur Nice et la Côte méditerranéenne, lui permettent d’obtenir un doublé inespéré dans un contexte particulier : « J’ai des sentiments mitigés. C’est super d’être ici avec le maillot jaune, mais j’aurais aimé gagner différemment. » Qu’on te rassure Max, tu ne pouvais pas gagner différemment donc ne fais pas la fine bouche au moment de te payer le scalp de Roglic ! Beau joueur dans la défaite, le Slovène conclura élégamment cette passe d’armes : « J’ai fait des erreurs en chutant. Je n’en veux pas à Schachmann, c’est une course de vélo, on n’est pas là pour se faire des politesses. »

Chute et abandon de Richie Porte dès la 1ère étape dans la région parisienne ! En 2021, l’Australien a changé d’équipe et de matériel mais il ne tient toujours pas sur son vélo…

3° Ineos Grenadiers perd ses deux leaders sur chute

Comme l’équipe Jumbo-Visma, la formation Ineos Grenadiers court mal chez nos voisins français depuis la pandémie de coronavirus. L’an dernier, elle a été inexistante au Dauphiné comme au Tour de France suite aux mésaventures de sa tête de gondole Egan Bernal. Pour régler ce problème, Dave Brailsford a recruté cet hiver de nouveaux leaders potentiels afin d’avoir des solutions de rechange en toute circonstance. Les Britanniques se présentent donc au départ de Paris-Nice avec le tandem Richie Porte – Tao Geoghegan Hart comme chefs de meute.

Mais l’abondance de biens n’est pas forcément gage de réussite dans le cyclisme. Pour preuve, l’Australien Richie Porte, de retour au bercail après une parenthèse mitigée de cinq ans chez BMC puis Trek, se casse la figure dès la première étape. C’est l’abandon prématuré, une habitude chez lui depuis plusieurs saisons déjà. Par souci de solidarité, Tao Geoghegan Hart lui emboîte le pas trois jours plus tard dans la descente du Mont Brouilly.

Dylan Van Baarle se retrouve donc promu leader dans l’urgence mais ne finira que treizième au classement général final à Levens. Nouvel échec donc pour les hommes en noir qui ont de plus en plus de mal à gagner depuis le décès brutal de leur stratège de directeur sportif Nicolas Portal il y a un peu plus d’un an, une époque où couvre-feux et confinements n’existaient même pas en rêve…

Jolie performance de remporter un contre-la-montre avec un casque canard rose.

4° Stefan Bissegger – Gino Mäder, la relève suisse est là

Stefan Küng engagé sur Tirreno-Adriatico et Marc Hirschi toujours au repos après son transfert rocambolesque cet hiver de Sunweb chez UAE, la Suisse ne semblait pas pouvoir peser sur ce Paris-Nice 2021. A notre grande stupéfaction, il n’en fut rien.

À 22 ans, Stefan Bissegger effectue des débuts remarqués en World Tour sous le maillot d’EF Education-Nippo depuis le mois d’août dernier. Bête à rouler, il surgit sur le contre-la-montre de Gien avec un casque canard rose pour mieux narguer Rémi Cavagna, alias « le TGV de Clermont-Ferrand », de 83 centièmes de secondes. En plus d’être radins, ces Auvergnats sont marrants à se donner des surnoms de trains grande vitesse, l’emblème de la richesse, lorsqu’on sait que leur préfecture du Puy-de-Dôme, perdue au milieu de la France, a autant de chance de voir passer un jour un TGV que Romain Bardet de remporter le Tour de France…

Après avoir battu Cavagna sur le chrono, Bissegger s’empare du maillot jaune de leader mais il craque dès le lendemain vers Chiroubles face à un vrai train grande vitesse ce coup-ci : un TGV jaune nommé Jumbo-Visma, rappelant étrangement le TGV Postal de la SNCF des grandes années, dont Primoz Roglic, son commandant de bord, préfère distribuer des coups que le courrier. Trois jours plus tard, Gino Mäder fera également connaissance avec le champion slovène dans des conditions particulières comme nous l’avons mentionné au début de cet article.

A peine plus âgé que Bissegger, Mäder rayonne lui en montagne grâce à son gabarit de pur grimpeur (1m84 pour 61 kg). L’automne dernier, il a fini vingtième de son premier Grand Tour, la Vuelta, et pourrait bien devenir ces prochaines saisons le grand cycliste de courses par étapes que la Suisse attend depuis Tony Rominger, Alex Zülle, Laurent Dufaux et les fameuses années EPO. Déjà deuxième il y a quatre mois à la Covatilla derrière Gaudu, Mäder finit ce coup-ci deuxième à la Colmiane, seulement débordé par Roglic dans les ultimes mètres d’ascension. Comme le fameux vaccin, sa première victoire chez les professionnels ne devrait maintenant plus tarder à arriver…

A propos Thierry Bientz 47 Articles
Après avoir parcouru 250 000 kilomètres à vélo en 20 ans, j'ai décidé de prendre un peu la plume pour raconter le cyclisme...

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1 Commentaire

  1. C fou on reparle jamais d indurain, hinault, mercks.. tjs le mechant armstrong et les annees epo mais avant que dalle.. c un peu derangeant qu ils soient vu comme des grand champions alors que armstrong est un paria. De plus, mercks avait été positif sauf erreur..

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