2018 : l’édition Atlas

En 1998, lors de la dernière journée de la phase de groupe, le Maroc bat l’Écosse 3-0. Ils pensent être qualifiés mais la Norvège crée la surprise et élimine le Maroc en battant le Brésil à l’aide d’un penalty litigieux. Comme l’Algérie en 82, la dernière participation du Maroc à un mondial avait été donc marquée du sceau de la frustration et du dégoût. Ce cru 2018 sera-t-il plus favorable aux joueurs du royaume chérifien ? Le Maroc, ce pays au drapeau rouge et au pentagramme vert, promettra-t-il l’enfer à ses adversaires ? Rien n’est moins sûr si l’on s’en tient à la réalité froide des chiffres de l’indice « FROTI ».

Pourquoi j’ai choisi de présenter cette équipe ?

Je pourrais tenter de faire croire à une passion historique pour ce pays, un intérêt particulier pour son football ou un autre pieux mensonge du genre mais non je vais jouer carte sur table. J’ai juste mis du temps et beaucoup de mauvaise volonté à comprendre la plateforme d’organisation du rédac-chef. Du coup j’ai été parmi les derniers à répondre et il restait curieusement le Maroc.

Comment se sont-ils qualifiés ?

20 ans que les Marocains l’attendaient cette qualification. Et ils l’ont obtenue au panache et avec talent. Le début de la campagne fut pourtant poussif puisqu’ils ont peiné pour se débarrasser au deuxième tour à élimination directe de la Guinée Equatoriale en gagnant 2-0 à domicile mais en se faisant des frayeurs au retour en perdant 1-0. Le troisième tour fut, à la surprise de tous, une promenade de santé. Sans en être les favoris, ils se sont extirpés d’un groupe délicat sur le papier avec le Mali, le Gabon et la Côte d’Ivoire, le grandissime favori, sans perdre un seul match et sans prendre un seul but. Le mérite en revient sans conteste au sélectionneur français Hervé Renard qui personnifie mieux que personne le proverbe : nul n’est prophète en son pays. L’Afrique, le Renard, il la connaît bien. Il a gagné deux CAN, une avec la Zambie en 2012 et la deuxième avec la Côte d’Ivoire en 2015. Ce tour du continent lui a permis d’observer le football africain et l’état de ses pelouses et ainsi d’y appliquer deux stratégies gagnantes. Lorsqu’ils jouent sur des champs de patates, chose assez fréquente dans les pays d’Afrique subsaharienne, leur tactique est de miser davantage sur la solidité, sur l’impact dans les duels. Chez eux en revanche, où les terrains sont de meilleure qualité, ils proposent un jeu offensif. Alors, certes deux tactiques ça fait peu sur le papier mais c’est apparemment suffisant pour se qualifier facilement. Et puis ça fait toujours deux de plus que la Squadra Azzura.

Les médias ont révélé que le Maroc avait une troisième stratégie, officieuse celle-là, et qui a pris totalement de court les Gabonais: la tactique dite de la diarrhée. Le but de cette tactique ne fut pas de proposer un jeu de merde pour dégoûter l’adversaire, mais d’empoisonner l’équipe adverse avec du jus d’orange avarié. Résultat ? 3-0 pour le Maroc. Mauvais perdants, les Gabonais n’ont simplement pas digéré leur défaite.

Quelles sont les chances de les voir soulever le trophée ?

Comme bon nombre d’équipes « outsider » de la compétition, le Maroc ira en Russie pour jouer sa chance à fond et ne pas faire de la figuration. Je ne veux pas passer pour un Rabat-joie mais pour voir un Marocain soulever le trophée cet été, il faudra que deux conditions soient remplies : qu’Adil Rami soit sélectionné en équipe de France et que la France aille au bout. Il y a donc peu d’espoir car la première condition va être quand même sacrément difficile à remplir.

Présente-nous la star de l’équipe.

Mehdi Benatia sans aucun doute. Le Djourou marocain est une star nationale et internationale. Comme notre joueur suisse, c’est un défenseur central et qui a connu beaucoup de clubs européens. Malheureusement la comparaison s’arrête là. Lui, il a réussi à percer dans les plus grands clubs européens, tels que Clermont, la Roma, le Bayern Munich et il a fini par convaincre la Juventus de le garder jusqu’en 2020. Il a également raflé de nombreuses récompenses, comme être élu joueur maghrébin 2017. Ce n’est pas rien. Capitaine des Lions de l’Atlas, il sera un des joueurs africains les plus attendus du mondial. La renommée de Benatia a pris de l’ampleur tout récemment lorsqu’il dénonça une sordide affaire de viol collectif dont il fut la victime. L’affaire a fait la Une des journaux du monde entier. Les défenseurs de la cause footballistique sont rapidement montés au créneau pour dénoncer cet énième cas d’agression sexuelle.

On parle du foot marocain, mais il ressemble à quoi le championnat du Maroc ?

La Botola Maroc Telecom est un championnat de 16 clubs en matches aller-retour hebdromadaires. A la fin de chaque saison, le club champion et le vice-champion sont qualifiés pour la Ligue des champions de la CAF et ceux classés entre la 3^e et la 4^e place sont répartis entre la Ligue des champions arabes et la Coupe de la CAF, tandis que les 2 derniers du classement sont relégués en Botola 2. Le titre se joue généralement entre deux clubs d’une même ville, le Wydad et le Raja de Casablanca. Des médecins ont trouvé une vertu thérapeutique à ce championnat. Pour lutter contre ce fléau qu’est l’éjaculation précoce, ils préconisent de regarder les matchs des équipes marocaines de football, de préférence ceux du Wydad de Casablanca, et de s’en rappeler les temps forts pendant l’acte.

Au fait, c’est qui la personnalité marocaine la plus célèbre dans le monde ?

Question complexe. Quand un Marocain est talentueux et devient célèbre dans un domaine, il obtient de facto une double nationalité, généralement française ou belge. A partir de ce moment, sa nationalité change en fonction du média qui en parle. Du coup je ne sais toujours pas si Gad Elmaleh est parti à la conquête des USA en tant qu’humoriste Français ou Marocain…

Fais-nous rêver avec le Maroc, mais dans un autre sport…

Si le Marocain n’excelle pas balle au pied, ce n’est pas faute d’avoir des jambes. Comme bon nombre d’Africains, il s’est aguerri dans la course d’endurance avec brio. Pour s’en rendre compte, il suffit de se pencher sur une compétition hors normes créée par et pour des cinglés : le marathon des Sables. Mais attention, malgré son nom trompeur, il ne s’agit pas d’un marathon classique. Non, on parle d’une épreuve qu’il faut parcourir sur environ 200 km repartis en 6 étapes, dont une d’environ 80 km non-stop. La course se déroule au Maroc, dans le désert du Sahara ce qui ajoute bien sûr une double difficulté : la chaleur et le sable. Autre spécificité de cette course, les coureurs sont en autosuffisance, c’est-à-dire qu’ils doivent porter leur nourriture, un réchaud, des vêtements, un sac de couchage et le matériel de survie. L’organisation ne fournit que l’eau, entre 10 et 12 litres par jour suivant les étapes. Pour de nombreux fans de la spécialité, cette course a la réputation d’être l’une des courses les plus difficiles au monde

Alors certes les Marocains jouent à domicile mais ça n’enlève en rien leur exploit : sur les 33 éditions effectuées à ce jour, un Marocain l’a remportée 23 fois. Pendant de nombreuses années, l’épreuve a accouché d’un duel fratricide au suspense insoutenable : la rivalité entre les frères Mohamad et Lahcen Ahansal ; Lahcen ressortit vainqueur à dix reprises (dont 7 fois devant son frère Mohamad) et Mohamad fut vainqueur à 5 reprises puis à 4 reprises depuis que son frère ne participe plus à la course. De quoi nourrir la légende de cette épreuve mythique. Depuis 4 ans, Rachid El Morabity un nouveau cador de l’ultra-trail, a émergé pour continuer brillamment la glorieuse destinée du Maroc dans cette compétition.

Lahcen Ahansal : the Prince of Morocco

Au fait ça mange et ça boit quoi les Marocains ?

Cuisine et tourista font bon ménage au Maroc, même si l’office du tourisme fait tout pour nier l’évidence. Passé ce léger inconvénient, la nourriture marocaine est plutôt riche et variée. Il n’est pas surprenant d’apprendre que la cuisine est une affaire de femmes. Les hommes, eux, s’occupent du thé et n’ont pas accès aux fourneaux. La cuisine marocaine est considérée comme l’une des plus riches au monde. Elle se caractérise par une très grande diversité de plats : couscous, tajines, pastilla, méchoui, soupes, épices, olives, salades, thés, pâtisseries, etc.

En ce qui concerne les boissons, on y boit beaucoup de thé vert, de l’eau et des jus de fruits. Si on veut boire de l’alcool, c’est possible mais il faut se planquer pour ça. Pays musulman oblige, il est mal vu de siroter son petit jaune en public. Toutefois, ce pays est un des plus souples en ce qui concerne cette règle. Une étude britannique (et ils s’y connaissent dans ce domaine) a montré que les Marocains consomment chaque année pas moins de 131 millions de litres d’alcool, dont 400 millions de bouteilles de bière, 38 millions de bouteilles de vin, 1,5 million de bouteilles de whisky, 1 million de bouteilles de vodka et 140 000 de champagne. Y aurait-il un lien entre la souplesse du roi sur cet écart religieux et la jolie marge qu’il se fait en surtaxant ce produit ? Hélas, l’étude ne le démontre pas formellement !

Une coutume surprenante de ce pays ?

Petit conseil aux Marocains qui iront en Russie : si chez vous le fait que des jeunes hommes se promènent main dans la main (ou plutôt doigt dans la main) est un signe d’amitié et rien d’autre, les Russes n’auront peut-être pas la même souplesse d’esprit.

Ton pronostic ?

Ils sont en forme les Marocains. Je n’ai vu aucun de leurs matches, je l’avoue, mais avec des éliminatoires en forme de promenade de santé et des matches de préparation rondement menés, preuve en est cette dernière victoire en Serbie, ça fleure bon la surprise dans ce groupe B. Ils vont facilement s’imposer dans le premier match contre l’Iran, puis arracher un point contre le Portugal, équipe idoine quand on parle de nuls. Par contre je ne parviens pas à les imaginer battre les Espagnols lors du dernier match. Du coup, avec 4 points, sur un malentendu, ça peut passer. Et puis une qualif’ aux dépens du Portugal, je signe de suite.