La Pogfrance a t-elle vraiment grise mine ?

La voilà, celle que tous les Romands se plaisent à détester, l’équipe aux 60 millions de sélectionneurs et aux 23 grévistes, la grande, la seule et unique, l’Equipe de France. Tombée dans un groupe a priori abordable avec l’Australie, le Pérou et le Danemark, les bleus viennent à la Coupe du Monde avec des ambitions claires et assumées. Mais quel est le véritable niveau de l’équipe de Didier Deschamps, à qui il est souvent reproché de n’avoir aucun « plan de jeu » alors qu’il dispose de l’un des, si ce n’est du meilleur potentiel offensif du moment ? Et pourtant, après vérification, attendre l’adversaire en ne proposant rien et le contrer grâce à un savant mélange d’opportunisme, de chance et de talent juvénile peut suffire à définir un système de jeu.

Pourquoi j’ai choisi de présenter cette équipe ?

Parce qu’en tant que Frouze, quitte à voir les bleus se faire descendre par l’équipe de Carton-Rouge avant, pendant et peut-être même après la Coupe du Monde, autant porter le coup moi-même. J’ai donc répondu avec grand plaisir à l’invitation du rédacteur en chef, et me voilà prêt à phagocyter le site et les articles sur l’Equipe de France, de sa présentation jusqu’à son dernier match le 15 juillet.

Comment se sont-ils qualifiés ?

Pas si facilement. Commençant par un nul contre la Biélorussie, à peine plus d’un mois après une finale d’Euro 2016 toujours pas digérée, ils ont enchaîné les bons résultats jusqu’à une défaite en Suède sur une boulette de leur gardien et capitaine. Puis ils ont signé une victoire convaincante face aux Pays-Bas avant de nous livrer une grosse purge et ce 0-0 face au Luxembourg. Match dont on se souviendra aussi pour les désormais fameux dix-sept centres tentés pour zéro réussi de Layvin Kurzawa. En position délicate à ce moment-là, ils ont fini « au métier » en Bulgarie et contre les Biélorusses, avec la prise de pouvoir de Coco Tolisso au milieu du déluge à Sofia.

Le bilan de ces éliminatoires est donc mitigé (seulement 18 buts marqués, loin de ce qu’on pourrait attendre avec une attaque si talentueuse sur le papier) et l’impression générale laissée par cette équipe est loin de les mettre au niveau des cadors mondiaux que sont l’Allemagne, l’Espagne ou encore le Brésil. Si, dans un bon jour, ils semblent pouvoir taper qui ils veulent, les joueurs français montrent parfois un niveau affligeant contre des adversaires qui leur sont inférieurs en talents individuels.

Quelles sont les chances de les voir soulever le trophée ?

Si l’indice FROTI et sa méthodologie on ne peut plus sérieuse voit les bleus en 9ème position, il ne prend pas en compte la variable la plus importante quand il s’agit de l’Equipe de France : la désormais fameuse chatte à DD. Celle-là même qui les placerait en position de favoris tant le parcours de joueur et d’entraîneur du sélectionneur recèle de victoires inespérées, de « faits de jeu » favorables et de tirages au sort à vous combler d’extase un Michel Platini.

Mais attention tout de même, pour d’obscures et buissonneuses raisons, la chatte à DD est d’une totale inutilité face aux Portugais, comme en attestent les défaites contre le FC Porto en finale de Champions League en 2004 ou la finale du dernier Euro…

Présente-nous la star de l’équipe.

Elle est sûrement à trouver au sein du trio Pogba, Griezmann, Mbappé. Ces trois-là ont en commun d’avoir été « starifiés » très jeunes, et dès lors on ne peut qu’à moitié leur en vouloir d’avoir un peu trop pris le melon. Entre Pogba qui s’évertue à créer une novlangue à partir de son patronyme, Griezmann qui se voit dans les trois meilleurs joueurs du monde actuellement et Mbappé qui a déjà sa statue au musée Grévin, les trois fers de lance de l’attaque française se présentent au mondial avec les chevilles enflées et donc fragiles.

Parmi les joueurs bien moins exposés médiatiquement, la réussite de l’association ou du turn-over au milieu entre l’humble N’Golo Kanté, l’inépuisable Blaise Matuidi et un Corentin Tolisso plein de vice pourrait déterminer le parcours des Bleus.

On a les ambassadeurs qu’on mérite

Niveau douzième homme, la star sera à coup sûr le célèbre Clément d’Antibes (pour ceux qui ne le connaissent pas, c’est l’équivalent à l’équipe de France de ce qu’a été Yves Martin au LS en termes d’assiduité. Pour ceux qui ne connaissent pas Yves Martin, ne vous inquiétez pas, c’était encore mon cas aussi avant de le rencontrer il y a deux mois, mais ne me balancez surtout pas !). Clément d’Antibes donc, qui devait se retirer après l’Euro 2016, est sorti de sa retraite internationale pour une dernière grande compétition, comme l’avait fait Zidane en 2006. Accompagné ou non de son coq Balthazar en tribunes, gageons qu’il sera une fois de plus le sujet préféré des journalistes télé rôdant aux abords des stades. Rêvons même d’une sortie à la Zizou et d’un coup de tête en plein thorax de Manolo, le tambour espagnol, en prolongations de la finale.

On parle du foot français, mais il ressemble à quoi le championnat français ?

À un championnat à dix-neuf équipes. La Ligue 1 Raymond Poulidor, comme la LFP a hésité à la renommer cet été (avant de céder aux sirènes du capitalisme et du naming en optant pour un magasin de meubles dont on taira volontairement le nom), a pour seul enjeu de savoir qui va monter sur le podium et accompagner Paris en Ligue des champions. À ce petit jeu, Monaco, Lyon et Marseille sont seuls au monde et se battent pour les deux places restantes.

Derrière ce « gros quatre » comme diraient les Québecois, la Ligue 1 est fidèle à sa réputation de championnat dur physiquement et tactiquement, rugueux, exigeant, parfois très chiant il faut le reconnaître, au grand dépit de Neymar Jr. qui se demande encore ce qu’il est venu y foutre. Bien fait, j’ai envie de dire.

Au fait, c’est qui la personnalité française la plus célèbre dans le monde ?

La liste des personnalités françaises connues à travers le monde étant d’une longueur telle qu’elle risque une fois de plus d’éveiller la rancœur et l’animosité de ma patrie d’accueil à l’égard de ma patrie d’origine, autant faire un pas de côté en se mettant directement à l’heure russe et adopter la vision de la France qui est celle des hôtes de la prochaine Coupe du Monde.

A ce petit jeu là, la Palme de la personnalité la plus célèbre dans le monde vu depuis la Russie semble revenir sans conteste à Mireille Mathieu. Oui, Mireille Mathieu, le gobelin à la tête de playmobil, sorte de sous-Edith Piaf anachronique, celle-là même qui chantait pour célébrer l’élection de Sarkozy, est une star au pays des tsars. Sa récente nomination comme ambassadrice de la langue russe par l’institut Pouchkine atteste, s’il en est besoin, de la place qu’elle occupe dans le coeur des Russes.

Une pensée au passage pour Gérard Depardieu qui, sans sa récente naturalisation, aurait peut-être pu concourir et gagner là sa première Palme…

Fais-nous rêver avec la France mais dans un autre sport…

J’aurais aimé parler tennis mais je vous entends déjà rire. J’aurais aimé parler hand-ball ou rugby, mais les Suisses y sont si peu réceptifs que ces sports pourraient se retrouver dans la section « Jeux du cirque » sur Carton-Rouge. J’aurais aimé parler biathlon, mais j’ai envie que les lecteurs finissent cet article.

Et puis faire rêver les Romands avec la France, quel que soit le sport, c’est par définition impossible. Donc je passe.

Au fait ça mange et ça boit quoi les Français ?

Les meilleurs vins, les meilleurs plats, la gastronomie mondialement reconnue, les terroirs aux mets riches et variés… Non mais c’est quoi cette question, vous voulez vraiment qu’on se fâche, c’est ça?

 Coq au vin

Une coutume surprenante de ce pays ?

La principale coutume du pays, qui laisse d’ailleurs perplexes les chercheurs en sciences sociales du monde entier, repose sur un ensemble de rituels consistant, entre autres, à ne jamais sortir de ses propres frontières, à s’adonner chaque matin à un exercice d’auto-masturbation collective sur une grandeur passée sans jamais regarder ce qu’elle a de suranné et à soutenir sans sourciller devant n’importe quel étranger que la France est le plus grand pays du monde. Principalement vraie au coeur de la capitale, un tout petit peu moins à mesure qu’on s’en éloigne, cette coutume a contribué à la naissance de la Ve République. Simulacre démocratique, ce système a l’avantage de répondre à intervalles réguliers, tous les cinq ans actuellement, aux deux principaux besoins du peuple français : se trouver un chef et le guillotiner.

Ton pronostic ?

Ils devraient assez facilement s’extraire de leur poule. Si elle était, au moment du tirage au sort, la plus relevée en termes de place moyenne à l’indice FIFA, elle reste dans les cordes de quiconque voudrait prétendre au titre final.

En croisant les doigts pour que les Argentins finissent premiers de leur poule, la route leur serait ouverte jusqu’aux quarts de finale où les choses sérieuses commenceraient avec le Portugal ou l’Espagne… Et on verra alors leur capacité à se transcender et à sortir des équipes ayant plus de certitudes collectives.

Pour concevoir qu’ils puissent produire du beau jeu, là, il faudrait être plus croyant que je ne le suis. Mais même les athées savent rêver, et je me prends déjà à espérer chanter un nouveau son disco bien pourri aux oreilles du monde entier pour deux nouvelles décennies.