Top 10 des espoirs déchus du foot suisse, partie 1

La carrière d’un footballeur n’est pas sans surprise. Si certains se découvrent sur le tard des talents de grands joueurs, il est plus fréquent que des espoirs du ballon rond, estampillés « futur ballon d’or » par les médias alors qu’ils ne sont pas encore secs derrière les oreilles, se plantent dans les grandes largeurs. Si les destins brisés du foot sont nombreux et concernent des joueurs de tous pays, Carton-Rouge reste un site suisse. C’est la raison pour laquelle je vous offre, pour bien commencer 2019, un petit Top-10 en deux parties des grands espoirs suisses qui n’ont jamais pu ou su confirmer les attentes placées en eux.

(Je précise avant toute chose que je n’ai gardé que les joueurs ayant officié ces 15 dernières années, étant trop jeune pour vraiment connaître les ex-futurs espoirs plus âgés. De plus, il est bien possible que j’aie oublié un ou deux incontournables. Je vous remercie de me les noter dans les commentaires pour que je trouve un moyen de ne pas les épargner !)

10) Face à la mer ou face Affolter ?

Pour débuter notre classement, voilà un défenseur central romand. Tant pour son poste que pour son origine, il n’est de loin pas le seul à posséder ces qualificatifs dans ce top 10. Pour ceux qui l’auraient oublié, Affolter est donc un Biennois né en 1991. Il a surtout crevé l’écran avec Young Boys entre 2008 et 2011 et avec l’équipe de Suisse M21, récoltant même 5 sélections avec la Nati entre août 2010 et février 2012. Mais tout se gâte peu après. Alors qu’il joue très peu à YB depuis que Christian Gross a repris les rênes, il est prêté au Werder de Brême, en Bundesliga.

L’expérience n’est pas concluante et il retourne donc à Berne un an plus tard, où il ne rejouera presque pas. Il est finalement transféré en janvier 2014 à Lucerne où il retrouvera une place de titulaire indiscutable pendant 3 saisons… Avant de partir se dorer la pilule aux San José Earthquakes, en Californie ! Si on a déjà vu pire comme descente aux enfers (comme vous allez pouvoir le lire), rappelons qu’Affolter n’a aujourd’hui que 27 ans et était présenté comme le futur patron de la défense helvétique. A l’heure où on rappelle Timm Klose, avouez que c’est bien dommage que le Biennois soit aux Etats-Unis…

Affolter cherchait déjà le soleil quand il jouait à Lucerne

9) Rossini tourne le dos au haut niveau

Vous souvenez-vous de Jonathan Rossini ? Probablement pas. Je vais donc me charger de vous administrer un petit rappel. Rossini est un défenseur central italo-suisse, né en 1989 au Tessin. À l’âge de 16 ans, alors qu’il évolue dans les équipes de jeunes de Bellinzone, il est transféré à la Sampdoria de Gênes pour y poursuivre sa formation. On verra au passage dans ce top que le choix de terminer sa formation dans un plus ou moins grand club étranger est souvent une garantie pour foirer sa carrière dans les grandes largeurs.

Pour résumer un peu sa carrière, on peut dire que tout n’avait pas trop mal commencé pour le droitier tessinois. Il prend une part importante dans la conquête du « titre » de vice-championne d’Europe de la Suisse M-21 en 2011, étant même nommé dans l’équipe type du tournoi. Il porte en outre le maillot de la Nati pour la première (et probablement unique) fois de sa carrière le 3 mars 2010 contre l’Uruguay. Mais la suite de son parcours est bien plus chaotique, puisqu’il aura enchaîné durant sa carrière depuis son arrivée en Italie pas moins de douze transferts ou prêts, évoluant dans onze clubs différents, tous en Italie. Autant dire que le brave Jonathan, qui n’est pas jaune mais qui attend probablement d’avoir du temps de jeu, pourra aisément se reconvertir en guide touristique dans la botte à la fin de sa carrière. Et si le Tessinois a joué il y a quelques années pour d’honnêtes clubs transalpins comme la Sampdoria ou Sassuolo, on peut dire que la suite de son parcours n’a rien à envier à celui d’un vol du concorde. Pour reprendre ses trois dernières équipes, il jouait en 2017 en prêt chez la toute puissante équipe de Pistoiese, 10ème de Serie C (3ème division italienne), puis a été prêté au premier semestre 2018 chez la non moins impressionnante Pontedera, 11ème de la même division, et a enfin été transféré vers la solide équipe d’Albissola, fraîchement promue avec tout ce joli monde après son titre de Serie D. A ce rythme-là, ce ne serait pas étonnant de le voir rejoindre dans un an ou deux le Aglientu 98, prétendant aux places d’honneur dans la 3ème division régionale du nord de la Sardaigne.

« Bonjour, je m’appelle Jonathan et je serai votre guide lors de votre séjour dans le Barolo »

8) Beg Fera-t-il un bon choix dans sa carrière ?

Pour clôturer notre trio de défenseurs centraux et dans la même veine que Rossini, qui se souvient de Beg Ferati ? Probablement pas grand monde. Pourtant le natif de Pristina, qui a fêté ses 32 ans l’automne dernier, compte également une sélection avec la Nati et a effectué quelques belles saisons au sein du FC Bâle avec qui il a été triple champion de Suisse. Après trois ans et demi passés entre 2008 et 2011 avec les Rotblau, marqués aussi par une Coupe de Suisse, une participation en Europa League mais surtout deux campagnes de Champion’s League assez convaincantes, ce brave Beg – promis, je résisterai à la tentation de faire une blague sur son prénom – a la merveilleuse idée de s’engager libre avec Freiburg en Allemagne. Spoiler alert, ça ne s’est pas super bien passé…

N’ayant joué que sept bouts de matchs en six mois avec le club du Bade-Wurtemberg, miné par les blessures, il est ensuite prêté au FC Winterthur pour la deuxième partie de saison. Si l’on se rappelle qu’il jouait un huitième de finale de coupe d’Europe un an auparavant, la chute est brutale. C’est alors qu’une seconde chance s’offre à lui lorsqu’il est acheté par le FC Sion. Il réalise une saison pleine en 2013-14 en Valais… Avant d’être rétrogradé avec l’équipe B l’année suivante. Depuis lors, Ferati creuse toujours alors qu’il a touché le fond depuis longtemps : Prêté d’abord au FC Bienne puis à Chiasso, clubs dans lesquels il ne s’imposera pas, ne jouant même que deux petits matchs avec les Tessinois, il finit par signer libre l’été dernier dans le club de son enfance, le FC Pratteln. Celui-ci se trouve être actuellement solide 9ème de 2ème ligue régionale du Nord-Ouest de la Suisse (vous n’avez pas idée du temps qu’il m’a fallu pour trouver cette info), soit la 6ème division nationale. Rien que ça.

Pas étonnant que CC ait écarté Ferati s’il se rendait à l’entraînement en gilet jaune

7) Benjamin souffre de Siegristrose

Si l’on cherche de jeunes espoirs qui n’ont jamais réussi à confirmer les attentes placées en eux, il est facile de se tourner vers les membres de sélections juniors ayant réussi de grands résultats. D’ailleurs, tant Rossini qu’Affolter étaient des joueurs de l’équipe de Suisse M21 vice-championne d’Europe en 2011. De plus, je pourrais faire un article entier à parler de la situation actuelle des anciens champions du monde M17 de 2009, allant d’un arrêt du football pro a un changement d’équipe nationale, en passant par le plus dramatique, un poste à la pointe de la Nati pour un certain Haris S.

Mais pour revenir à celui qui nous intéresse, Benjamin Siegrist a réussi l’exploit d’être à la fois champion du monde et vice-champion d’Europe avec les deux équipes précitées. Il a donc tout pour être dans cette liste. En fait, il réunit même tous les éléments pour se planter en beauté, lui qui a également fini sa formation à Aston Villa, en Angleterre. Le portier Bâlois avait pourtant tout ce dont il avait besoin. Mais une nouvelle fois, une mauvaise transition équipe junior-footballeur pro ainsi que des choix de carrière douteux l’ont amené un peu partout sauf au sommet.

Siegrist ne jouait tellement jamais qu’ils ne lui ont même pas filé de numéro sur son maillot à Aston Villa

Comme nous l’avons vu, Siegrist est parti très jeune en Angleterre. Dans le même temps, il s’illustre tout particulièrement lors du titre M17, puisqu’il est nommé meilleur gardien du tournoi après avoir franchement impressionné. Comme pour bon nombre de ses coéquipiers d’alors, on se dit que sa carrière est lancée. Sauf qu’en 6 ans de contrat à Aston Villa, il ne jouera pas un seul match avec l’équipe première, se contentant de quelques minutes de jeu avec la réserve et surtout de prêts, peu fructueux, avec des clubs prestigieux tels que Burton Albion, Cambridge United ou encore Wycombe Wanderers, navigant entre la 4ème et la 5ème division anglaise. La saison 2016 marque le retour du Bâlois dans le championnat suisse, à Vaduz (non, cette phrase n’a aucun sens pour une personne ne suivant pas le football helvétique). S’il retrouve à cette occasion un peu de temps de jeu, Siegrist ne s’y impose pas franchement et signe libre l’été dernier à Dundee United, en 2ème division écossaise. Au passage la blague aurait été parfaite si le prénom du gardien avait été Mick. Toutefois, en parlant de blague, un tel parcours en est une bien mauvaise quand on pense combien les sauvetages de Siegrist nous avaient enthousiasmés il y a (déjà) bientôt 10 ans au Nigéria. Le Ten Years Challenge est bien cruel pour certains.

6) De Mor’héros à Costanzéro

11 août 2011, Wörthersee Stadion, Klagenfurt, Autriche. Moreno Costanzo, à peine entré en jeu, ouvre la marque et offre la victoire à la Suisse lors d’un match amical face à nos voisins de l’est. Le joueur, alors titulaire indiscutable avec Young Boys, est encensé par les journaux et présenté comme le futur meneur de jeu de la Nati. Aujourd’hui ? Le St-Gallois joue un peu, quand il n’est pas sur le banc, avec Thoune. Le tout après avoir croupi 3 saisons entre Aarau et Vaduz. Quand on se rappelle le niveau que le milieu offensif avait lors de ses années en jaune et noir, lorsqu’il était aisément l’un des meilleurs joueurs du championnat suisse, on se dit que c’est un beau gâchis.

Costanzo du temps où il était craint par les défenses adverses

Mais que s’est-il passé pour le finaliste de l’Euro espoir 2011 (oui, forcément…) ? Un petit mix de tout ce qu’il faut pour rater une belle carrière. Une relative pression sur lui de la part des médias alors qu’il était tout jeune et probablement encore trop vulnérable, des blessures aux mauvais moments, un manque de constance (Oh !) et des problèmes avec un entraîneur, en l’occurrence Uli Forte. Il ne manquerait que le départ trop jeune pour une plus grosse écurie européenne pour avoir le Grand Chelem. A presque 31 ans, les belles années de Moreno Costanzo sont de plus désormais malheureusement derrière lui et, même si quelques dernières saisons lors desquelles il retrouverait son niveau d’antan pourraient sauver un peu le bilan de sa carrière, celle-ci restera pour le football suisse comme l’un des plus grands gaspillages de talent de ces dernières années.

Rendez-vous prochainement pour la suite et fin de ce classement !

A propos Joey Horacsek 84 Articles
Bon ça va, je vais pas vous sortir ma biographie

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8 Commentaires

  1. Beg Ferati a surtout eu beaucoup de malchance. Alors qu’il retrouvait un très bon niveau au sein de Sion il a été frappé d’une mononucléose (source : https://www.lenouvelliste.ch/articles/sports/football/beg-ferati-souffre-d-une-mononucleose-336005 ). Suite à cette longue maladie qui laisse souvent des séquelles il n’a jamais retrouvé son niveau de jeu d’avant, d’où son passage en M21 et ses transferts dans des clubs de moins haut niveau.

    • Merci pour la précision et au temps pour moi, j’étais passé à côté de cette info.

      Cependant, est-ce que le fait de signer à Sion n’est pas déjà en soi le début de la descente aux enfers ? 😉

      • Je dirais que le FC Sion est plutôt un enfer pour ses supporters ces temps (perte de la 14e, manque d’identité, matchs inintéressants, pas d’enjeu vu la suspension Coupe d’Europe).
        Pour les joueurs il me semble que c’est un endroit pépère qui permet d’avoir des voitures de luxe et des appartements à Montreux 😉

  2. Quelques noms qui pourrait apparaître dans les cinq premiers:
    -Johan Vonlanthen
    -Davide Chiumiento
    -Julian Esteban
    -Innocent Emeghara
    -Xavier Margairaz
    -Eldin Jakupovic
    -Swen König
    -Sandro Burki
    -Nassim Ben Khalifa
    -Salim Khelifi
    -Frédéric Veseli
    -Fabrizio Zambrella
    -Guilherme Afonso
    -Goran Antic (aka le Haris S. du pauvre)

    • Merci pour les recommandations. Autant certains y seront pour sûr, autant j’avais complètement oublié l’existence de certains autres joueurs de cette liste et pourtant je pensais avoir ratissé large pour mon classement !

    • Pour ce qui est d’Afonso, je pense que son but en finale de coupe en 2009 et le penalty provoqué contre le Celtic dans la fameuse campagne d’europa league par notre grand ami Masterovic rendent sa carrière pas si mal. Entendre la voix de Yannick Paratt nous dire qu’Afonso à la lutte avec Portillo et qu’Afonso a passé, et qu’il a marqué sur une passe parfaitement millimétrée donnera des frissons à tout supporter du club sédunois qui se respecte.

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